Samedi 5 - Lundi 7 février
2000
Epinions,
le nouveau business model qui fait vibrer le Web
Les sites de e-commerce développent
de nombreux business models et espèrent tous avoir
trouvé le bon : enchères, prix fixé par
le consommateur (Priceline.com, Expedia), troc, marchandage,
group buying, galeries géantes, discounters, etc.
Un concept a le vent en poupe: les sites de "product
reviewer", fondés sur le bouche-à-oreille
et les critiques de produits rédigées par les
internautes eux-mêmes.
Une entreprise attise toutes les convoitises et est régulièrement
montrée en exemple: Epinions.com.
Une équipe de choc, un business model intelligent,
de très faibles coûts de fonctionnement, un tour
de table prestigieux, des résultats prometteurs: Epinions.com
est la nouvelle coqueluche du Net américain.
Les six fondateurs ont chacun quitté de très
bons emplois, et laissé derrière eux d'importants
montants de stock-options, pour fonder Epinions.com en avril
1999. Parmi eux, Nirva Tolia, responsable marketing chez Yahoo
(qui part en laissant 10 millions de dollars derrière
lui), Naval Ravikant, démissionnaire d'@Home (4 millions
de dollars de manque à gagner), Ramanathan Guha (4
millions aussi chez Netscape/AOL) et d'autres de profils comparables.
Des pros donc, que l'on appelle les "unhirables"
dans la Silicon Valley, les indébauchables, tellement
ils occupaient des postes en or. Ils se sont débauchés
eux-mêmes et ont bouclé un financement de 33
millions de dollars auprès de Benchmark Capital, August
Capital, Dell et Goldman Sachs.
Le concept est simple: si vous devez acheter une voiture,
à qui feriez-vous plutôt confiance, à
votre garagiste ou à un ami? A la publicité
ou au bouche-à-oreille? En fait, Epinions.com se définit
comme un "marché du contenu" qui "transpose
le bouche-à-oreille sur le Net" selon Nirva Tolia,
une sorte de compromis entre les newsgroups, les systèmes
de notation et les communautés, le tout sous forme
de guide d'achat.
Tout le système repose sur des critiques et commentaires
d'internautes de produits d'un éventail le plus large
possible, du vin aux restaurants en passant par les voitures,
l'informatique, les collèges et universités
etc.
Les rédacteurs sont notés par les visiteurs
du site en fonction de la pertinence de leur commentaire et
sont aussi rémunérés, entre 10 et 30
cents la page vue, et chacun peut personnaliser les critiques
qu'il reçoit et par exemple bloquer les critiques mal
notées. Dès la page de garde, les "most
popular" et "most trusted reviewers" sont mis
en exergue. L'exercice est sans pitié pour les rédacteurs
comme pour les produits, en particulier en ce moment pour
la FAI Aol.com, très mal noté. Un système
qui s'apparente à un "feedback loop", noter
les notes et critiquer les critiques contribue à améliorer
le contenu et la pertinence des commentaires. Un cercle vertueux
en somme.
Epinions compte des concurrents, comme eBay qui applique le
système de notation, Deja.com qui a créé
dans ses newsgroup un guide pour les consommateurs, Cnet,
Productopia et même, en France, Alaxis.com
qui développe un concept similaire.
Mais aucun n'a pour l'heure intégré une telle
variété de produits et n'a enregistré
de telles statistiques.
En septembre, le site comportait 5.000 critiques, aujourd'hui
100.000, pour un million de pages vues par jour.
Le business model repose sur trois sources de revenus. La
vente d'espace publicitaire ciblé tout d'abord, à
des prix qui se situent dans la fourchette haute du marché
(30 à 70 dollars du CPM).
Deuxième source de revenus, les commissions prises
sur les produits achetés par les visiteurs du site
qui passent directement d'une critique à un site marchand
affilié, parmi les 95 partenaires que Epinions compte
(Amazon, Barnes&Noble, etc). Les commissions vont jusqu'à
30%.
Enfin, Epinions se positionne comme guide d'achat intégré
à des portails, tels que Lycos ou Excite@Home.
Cette année, Epinions va lancer sa première
grande campagne de communication, accroître le nombre
de critiques jusqu'à plusieurs centaines de milliers
et signer de nouveaux partenariats.
Finalement, les "unhirables" vont peut-être
assez vite récupérer ce qu'ils ont laissé
derrière eux, voire beaucoup plus. [Rémi
Carlioz, JDNet].
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