Le Net
2. Le nouveau discours des capitaux-risqueurs
Rentabilité, coûts d'acquisition, effectifs... Le capital-risque invente une certaine "rigueur" pour les start-up. --> (Mercredi 13 septembre 2000)
         
Ce qui a changé depuis l'e-krach
Financement, stratégie, perspectives...
La correction boursière du printemps a déstabilisé les "jeunes pousses" du Web. Enquête en cinq volets sur les nouvelles règles du jeu de l'Internet business.

Sur le baromètre de la "nouvelle économie", c'est le capital-risque qui donne le "la". En apparence, cette position flatteuse semble même affranchir les VC's de l'agitation boursière. Au deuxième trimestre 2000, au coeur de la première tempête essuyée par l'Internet business, les start-up françaises ont ainsi bénéficié de 2,2 milliards de francs de fonds. Pour les trois premiers mois de l'année, donc avant l'e-krach, ce montant s'élevait à 1,6 milliard... La locomotive capital-risque se serait-elle déconnectée des marchés ? Rien n'est moins sûr. Le printemps dernier a laissé des traces en profondeur et a bouleversé l'échelle de valeurs des capitaux-risqueurs. Accusés de pratiquer un financement façon bulle de champagne et de favoriser des business plan fantaisistes à la rentabilité illusoire, le capital-risque opte aujourd'hui pour une certaine rigueur. Jusqu'au prochain cycle.

"La nouvelle donne pousse la start-up à se PME-iser"

Les critères utilisés par les capitaux-risqueurs pour retenir lesdossiers ont sensiblement évolué au cours des derniers mois. "La rentabilité est revenue au centre du débat, estime Patrick de Giovanni, directeur associé chez Apax Partners. Ce glissement se traduit par une gestion plus étroite sur le coût d'acquisition du client ou de l'abonné." En clair, les seuils de rentabilité situés à 5 ans et plus, les coûts d'acquisition du client à plusieurs dizaines de milliers de francs sont proscrits. Une ligne de conduite d'autant plus facile à tenir quand le glissement des activités se fait en faveur du BtoB. "Il y a eu clairement des excès, notamment sur les sommes engagées dans la publicité, souligne Jean-Marc Dumesnil, le président de MGT. La nouvelle donne pousse la start-up à se "PME-iser" et à revenir à des règles élémentaires." Autrement dit, back-to-basics.

Dans cette quête de la rentabilité, une catégorie de créateurs de start-up trinque tout particulièrement : les juniors. "Une des leçons du premier semestre 2000 est la nécessité d'avoir dans une équipe dirigeante plus expérimentée, même si la créativité et l'enthousiasme restent des valeurs importantes, reconnaît Patrick de Giovanni. Les start-up pilotées par des patrons encore étudiants seront de plus en plus rares." Objectif recherché avec ce retour en force des séniors : pousser à nouveau la start-up à rentrer dans le rang des entreprises classiques. En revanche, ce revirement risque d'handicaper la nouvelle économie dans son recrutement, les séniors étant une monnaie rare, et de grever la masse salariale. "Je pense également que d'ici la fin de l'année les dossiers favorisés seront ceux qui seront apportés par des entrepreneurs de l'Internet seconde génération, qui ont déjà réussi avec leur précédente start-up", ajoute Thierry Chetrit, président d'Intuitu-Capital.

L'avant e-krach était une phase de débroussaillage

La fin 1999 et le début 2000 ont été marqués par de véritables phénomènes de mode sur les levées de fonds. Portail féminin, crédit en ligne, achats groupés, loterie... Par vague entière, la "nouvelle économie" faisait naître en quelques semaines un business model, ses acteurs et leurs propres concurrents. "Mais si l'activité est toujours aussi forte - nous recevons une vingtaine de dossiers par jour - ce phénomène va clairement s'estomper, explique Jean-Marc Dumesnil. Nous allons vers un système où les projets devront s'inscrire d'emblée dans une dimension européenne et pour lesquels les tours de table seront beaucoup plus conséquents. La barre des levées de fonds à 200 millions de francs et plus sera régulièrement franchie." Les 200 millions de francs levés par Kelkoo en juin dernier -une start-up pilotée par des seniors justement- semblent annonciateurs d'une nouvelle époque. Curieusement, tout laisse à penser que l'avant e-krach aura été une phase de débroussaillage pour le capital-risque : beaucoup de projets pour beaucoup d'opérations d'investissement. Du quantitatif, le financement de l'Internet glisse désormais vers le qualitatif. Et ce revirement a déjà un impact très évident. Le BtoC, grand consommateur de business models, recule face au BtoB mais encore plus face aux fournisseurs de solutions. Aux Etats-Unis, la National Venture Capital Association indique ainsi que les fonds attribués aux e-marchands ont baissé de plus de 40% au second trimestre 2000 par rapport aux trois premiers mois de l'année. "Mais avant de mettre de l'argent dans de nouveaux projets, les investisseurs vont surtout essayer de faire passer les seconds tours ou les troisièmes tours au société en difficulté", avertit Jean-Luc Rivoire, le président de Tocamak.

L'arrivée du phénomène
BtoBB

Si l'e-krach a cristallisé certaines déviances dans l'Internet business, d'autres facteurs sont venus s'ajouter depuis mars dernier dans cette mutation de la "nouvelle économie". Au premier rang d'entre eux se trouve le retour des grandes groupes issus de l'économie traditionnelle. Nouvelles Frontières, France Télécom, RTL, M6, NRJ, Vivendi... Ces "marques" jouent aujourd'hui dans la cour des grands de l'Internet parfois via des filliales aux faux-airs de start-up. "L'arrivée des grands groupes dans l'Internet dessine une porte de sortie de plus en plus séduisante pour les start-up, commente Bernard Maître, directeur associé de Galileo Partners. Les fusions-acquisitions vont prendre le pas sur la Bourse." Depuis quelque mois, une nouvelle race de start-up voit ainsi le jour : les BtoBB, pour "born to be bought" ("né pour être acheté"). Pour France Télécom (avec Ridingzone.com), le Crédit Lyonnais (avec Image Force) ou encore NRJ (avec BestOfCity.fr), la pêche au contenu et aux prestataires passe ainsi par l'absoption ou la prise de participation dans une start-up.

Autre facteur de poids : le durcissement annoncé des critères pour s'introduire en Bourse. Le comportement du Nouveau Marché fin 1999 et début 2000 a en effet laissé quelques aigreurs chez les capitaux-risqueurs. "Certaines introductions se sont déroulées dans des conditions limites, constate Bernard Maître. Le rôle du Nouveau Marché n'est pas de faire du capital-risque." Etonnamment, le retard de l'Internet business européen face aux Etats-Unis joue cette fois en faveur du Vieux Continent. Outre-Atlantique, l'e-krach a en effet balayé en quelques mois les valorisations boursières des start-up. L'action Amazon est ainsi passée du pic de 170 dollars en 1999 à 40 dollars aujourd'hui. Mais, en Europe, la période d'euphorie boursière n'aura duré "que" 6 mois. Pas vraiment le temps de se laisser tourner la tête. "Mais attention, note Thierry Chetrit. En mal de fonds, il est bien possible que des start-up tentent de se replier sur le Marché Libre, un marché peu réglementé."

"L'Europe est en passe de devenir la zone d'investissement la plus attractive, remarque Denis Champenois, président d'Innovacom-Gestion. Les taux de rentabilité y sont meilleurs qu'aux Etats-Unis et l'Internet mobile européen offre des perspectives séduisantes." Un constat que reprennent aujourd'hui en choeur l'ensemble des capitaux-risqueurs et qui écorche quelque peu l'air de la "rigueur" entonné en cette rentrée 2000. L'Internet mobile, secteur d'activité encore peu exploité, risque de provoquer la même frénésie que celle qu'a connu l'Internet de l'avant e-krach.

[Jérôme Batteau, JDNet]
 
 
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