Le Net
Loi sur la société de l'information : "undeliverable message"
L'avant-projet de la LSI, qui tente de poser un cadre juridique à l'Internet français, s'attire déjà les foudres des hébergeurs et fournisseurs d'accès. --> (Lundi 9 avril 2001)
         

Après deux années d'élaboration, l'avant-projet de la Loi sur la Société de l'information (LSI) du gouvernement Jospin vient de voir le jour et d'être envoyé, pour consultation, à diverses autorités (CSA, CNIL, ART...). Une première étape d'un marathon constitutionnel qui devrait amener la LSI devant le Parlement au mieux courant 2002. Mais ce premier texte, dont l'objectif numéro un est d'offrir un cadre juridique à la Toile hexagonale, fait déjà couler beaucoup d'encre parmi les professionnels de l'Internet français : "A côté de la plaque", "un accommodement complexe", "en retard sur son temps"...

Premier grief : la responsabilité que le texte donne aux hébergeurs, qui doivent signaler "promptement aux autorités publiques compétentes des activités ou des informations illicites". Le cas échéant, l'avant-projet stipule que le président du Tribunal de grande instance peut "prescrire en référé toutes mesures propres (...) telles que celles visant à cesser de donner accès à ce contenu". Une orientation qui n'est pas s'en rappeler la décision du juge Gomez dans l'affaire des objets nazis sur les enchères de Yahoo. "Nous nous retrouvons dans une situation où l'Internet est plus pénalisé que le monde réel, explique Jean-Christophe Le Toquin, délégué permanent de l'Afa (Association des fournisseurs d'accès). Les hébergeurs ont une responsabilité énorme et le texte laisse plein d'interprétations possibles : où commence le caractère illicite ? Les e-mails sont-ils concernés ? Le champ de surveillance est donc tout à fait ingérable."

Dans le cadre de ce contrôle des "activités et informations illicites", l'avant-projet de la LSI jalonne également le stockage des informations sur les échanges d'information afin d'offrir une traçabilité technique pour les autorités publiques. "Le hic, poursuit Jean-Christophe Le Toquin, c'est que nous passons d'une période de stockage de trois mois à un an. Or c'est une usine à gaz très coûteuse pour les FAI afin de conserver ces informations. En plus, il faut savoir jusqu'où doit aller la démarche : les FAI doivent-ils garder les e-mails envoyés, les adresses des expéditeurs, l'heure des envois ?" En l'état, l'avant-projet semble donc poser plus de questions qu'il n'apporte de réponses aux hébergeurs et fournisseurs d'accès. D'autant que d'autres points de la LSI, comme le dépôt légal qui, selon le texte, s'adresse à tous les éditeurs, et les mesures anti-spam (avec la création d'une "liste rouge" des adresses e-mails) sont aussi montrés du doigt par les professionnels de l'Internet. "Une mesure obsolète, selon Jean-Christophe Le Toquin, qui est uniquement dans une logique opt-out."

Les différentes instances qui viennent de recevoir cet avant-projet ont un mois pour adresser leurs remarques sur cette première mouture de la LSI. Les prochaines étapes devraient être ensuite le Conseil d'Etat puis le Conseil des ministres, normalement d'ici la fin du printemps. Mais face à la levée de boucliers qu'a provoqué le texte au sein de l'Internet français, il est désormais fort probable que les différents ministères impliqués dans le dossier (Justice, Intérieur et Bercy) revoient leur première copie afin d'éviter un parcours qui s'annonce déjà semé d'embûches.

[Ludovic Desautez, JDNet]
 
 
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