Fabrice
Cavarretta
36
ans, ancien directeur
de BOL France |
(Mise à jour
: 23/11/01) C'est l'histoire d'un mercenaire de
haut vol qui voudrait se bâtir un royaume bien
à lui. Lorsqu'il apparait aux commandes de l'ambitieux
projet de Vivendi et Bertelsmann, la libraire en ligne
BOL France, Fabrice
Cavarretta impressionne : sa formation (X, Harvard),
son parcours (la gestion du projet Havas On Line au
sein de Cegetel), ses puissants patrons
(Jean-Marie Messier en premier lieu) font de lui l'archétype
du nouveau manager Internet. L'échec commercial
de BOL qui n'a pas pu désserrer l'étreinte
de la Fnac et de Alapage aura raison de ce CV un peu
trop léché : Fabrice Cavarretta a
quitté BOL fin 99, dix mois après le lancement
du magasin culturel en ligne.
Surprise. Après
un long passage dans l'ombre des journaux et au soleil
du Pacifique Sud, Fabrice Cavarretta revient, en "entreprenaute"
cette fois : aujourd'hui
âgé de 36 ans, il a créé
fin 2000 la SARL iPropi,
qui va exploiter le service en ligne du même nom.
L'idée ? "iPropi vous permet de gagner des
récompenses en espèces ou en nature si vous aidez vos
amis ou les amis de vos amis". En clair, un service
d'intermédiation qui permet de lier des contacts
pour échanger et proposer des services contre
rémunération. Par exemple, si un internaute
A cherche un véhicule utilitaire, il peut faire
appel à un internaute B qui possède un
véhicule de ce type, moyennant des frais de location
ou en adoptant un système de troc. "C'est
une sorte de marketing viral pour résoudre tout
type de problèmes de la vie quotidienne",
commente Fabrice Cavarretta. Le modèle économique,
le commissionnement, s'apparente à celui des
enchères en ligne. Un concept novateur, viral
et grand public, une nouvelle marque prônant la
désintermédiation ? Comme un air
de "First Tuesday". Audacieux par les temps
qui courent.
Fabrice
Cavarretta s'explique : "Dans la période
96-2000, j'aurais aimé apporter ma contribution
à l'effervescence de projets Internet. Mais j'étais
bien assez occupé à développer
des projets soutenus par des grands groupes (...) Maintenant,
j'ai envie de créer un service qui sera un peu
mon bébé". Son service en ligne "bouche
à oreille sur Internet" est actuellement
en béta-test. Le lancement officiel devrait intervenir
début 2002.
Dans un contexte où
la ferveur des investisseurs vis-à-vis des projets
Internet B to C s'est éteinte, le nouveau Net-entrepreneur
a réussi à trouver un financement auprès
d'un business angel après cinq mois de recherche.
Il a également apporté une contribution
financière personnelle pour montrer son attachement
au projet. Comment interpréter ce virage spectaculaire ?
Fabrice Cavarretta se défend d'être "fatigué
des grands groupes". "J'avais réellement
envie de savoir comment créer de la valeur en
retroussant mes manches". Aujourd'hui, il dispose
d'une petite équipe (12 personnes), apparemment
prête à en découdre.
Beaucoup plus qu'un bon
élève, Fabrice Cavarrettta a fait partie
de la génération des managers qui ont
participé activement à l'émergence
des activités e-business en France. "Je
suis complètement tombé amoureux de la
technologie IP dès son apparition. Je m'y consacre
entièrement depuis 1994", souligne-t-il,
en rappelant en aparté son expérience
de développeur dans la Silicon Valley en Californie
dans les années 80. De retour en France, il occupe
un poste d'observation privilégié en qualité
de directeur Internet chez Cegetel dans la période
1996-1997. A ce poste, il a développé
le service de fourniture d'accès Internet Havas
On Line (HOL) avant que le groupe Vivendi opte pour
une prise de participation dans AOL France, jugée
à l'époque plus stratégique.
Fabrice Cavarretta a basculé
à cette occasion sur le management d'un autre
projet Internet tout aussi ambitieux : le développement
de la libraire en ligne BOL.fr, détenue à
parité par Vivendi et Bertelsmann. Sa nomination
parvient à rassurer les deux camps. "Jean-Marie
Messier m'avait confié les rênes de ses
activités Internet et Thomas Middelhof, le patron
de groupe Berteslmann, m'avait repéré
en 1996 à peine sorti de Harvard Business School",
se souvient Fabrice Cavarretta. Le développement
de BOL en France a nécessité une implication
et une disponibilité totale. Le manager reconnaît
la difficulté à cette époque de
"conquérir une position de leader"
dans un secteur où la concurrence est vivace
avec un acteur français bien implanté,
la Fnac et des challengers Internet comme Alapage.com
et plus tard Amazon.fr. Lorsque le pionnier américain
du commerce électronique débarque en France
en septembre 2000, Fabrice Cavarretta a déjà
quitté ses fonctions au sein de BOL France. En
juillet 2001, faute d'avoir trouvé ses marques
dans l'Hexagone, BOL.fr fermera ses portes. Une suspension
d'activité que le directeur historique ne souhaite
pas commenter.
"L'important,
c'est le timing"
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Converti de la première
heure, Fabrice Cavarretta a gardé des contacts
avec des représentants de la veille garde du
Net business français. Marie-Christine Levet
(ex-Lycos France aujourd'hui à la tête
de Club Internet) ou Patrick Robin (ex-imagiNet).En
1996, il était des soirées baptisée
"InterNote", les toutes premières réunions
dans des sous-sols
parisiens avec la poignée de décideurs
du Net de l'époque. Pourtant, au cours de la
glorieuse période de la la nouvelle économie
(1999-2000), Fabrice Cavarretta choisit de ne pas devenir
business angel. Tout juste avoue-t-il jouer le rôle
de conseiller pour le compte d'un fonds d'investissement
luxembourgeois. "Je ne sais pas si j'aurais eu
les moyens financiers pour suivre. Je n'ai toujours
eu qu'un statut de salarié dans mon parcours
professionnel. Je n'ai pas réalisé de
"coup" ou de sortie avantageuse", précise
Fabrice Cavarrettta.
Pourtant, la tentation
a été grande dans cette période
euphorique mais la sagesse semble l'avoir emporté.
"J'ai été dubitatif en voyant certains
modèles. Mais lorsque le marché s'accélère,
on doute sérieusement de leur viabilité.
Ce que je retiens au bout du compte lorsqu'on lance
un projet high tech, c'est le timing". Et le marché
actuel est-il mur pour adopter iPropi ? "C'est
un concept nouveau. J'ignore comment les internautes
vont réagir", glisse Fabrice Cavarretta.
Rafraichissant, non ?
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