Essayer de quantifier aujourd'hui
ce phénomène explosif mais fuyant qu'est
le spam en France et en Europe relève de la gageure.
Les outils ou les démarches systématiques
pour le mesurer sont encore embryonnaires. Elles peuvent
toutefois permettre d'approcher des ordres de grandeur.
Auteur d'une étude sur le courrier électronique
en Europe en février 2002 réalisée
auprès d'un panel représentatif d'internautes
à domicile, NetValue, qui a été
depuis racheté par Nielsen//Netratings, évalue
à 75,6 millions le nombre d'e-mails à
usage marketing envoyés en France en décembre
2001, un chiffre en hausse de 80 % sur un an. Une pression
promotionnelle qui, selon le cabinet de mesure d'audience,
représentait en décembre 2001 36,8 % en
moyenne des mails reçus par les internautes,
contre 29,8 % en janvier 2001.
Cette pression promotionnelle
n'est toutefois pas entièrement assimilable à
du spam puisque, ainsi que le souligne NetValue, il
n'est pas possible
de faire le tri entre les mails commerciaux non désirés
et l'ensemble des mails envoyés à un internaute. Et
de préciser "qu'à l'heure actuelle, aucun
organisme de mesure d'audience Internet n'est capable
de fournir ces données qui requièrent une grande
technicité au niveau du logiciel 'mouchard' et une grande
précision des panels sondés".
Un manque
de données en France et en Europe que confirme
Etienne Drouard, avocat au sein du département MIT du
cabinet Gide Loyrette Nouel et rédacteur du rapport
pour la Commission européenne sur le marketing électronique.
"Contrairement aux Etats-Unis, les associations
de protection des consommateurs en France n'ont pas
les moyens de mettre en place les solutions lourdes
qui permettent de recenser le spamming", explique-t-il.
Par ailleurs, pour disposer de données fiables,
encore faut-il que tout le monde s'entende sur la signification
du spam.
Faut-il le rapeller, le
spam est un envoi massif et répété d'e-mails non sollicités,
l'adresse des internautes ayant été obtenue
à leur insu, la plupart du temps par des robots.
Recevoir un e-mail commercial envoyé par un marchand
chez lequel l'internaute a commandé précédemment
un produit et laissé ses coordonnées électroniques
n'est pas considéré comme du spam.
En fonction de l'expérience
américaine et de l'évolution des capacités
techniques, l'étude réalisée par
Etienne Drouard pour le compte de la Commission européenne
avançait toutefois quelques estimations en février
2001. Selon celle-ci, les internautes européens
payeraient un montant de 10 milliards d'euros par an
en frais de connexion pour les mails non sollicités...
Pour en finir avec cette
opacité, la CNIL (Commission nationale informatique
et libertés) a mis en place le 10 juillet une
boîte au lettre électronique, spam@cnil.fr,
chargée de recueillir les plaintes des internautes.
Depuis le lancement de l'opération, 100 000 messages
d'alerte envoyés par les internautes français y ont
été adressés. Charge à la
Cnil de les catégoriser et de remonter vers l'expéditeur.
Un service assez similaire à celui mis en place
par l'association américaine SpamCop.net, basée
à Seattle qui se charge d'analyser les spams
qu'elle reçoit et d'écrire aux administrateurs
des sites concernés pour faire fermer les comptes et
les sites web des spammeurs. Une initiative qui, au
rythme du développement su spam sur le Web européen,
ne manquera pas de créer d'autres vocations.
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