Spécial
Internet
à l'école
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En France, les fournisseurs
d'accès (FAI) observent avec une certaine frilosité
le marché de la connexion Internet des établissements
scolaires. Et pourtant, depuis trois ans, ce marché
semble en pleine explosion. Le ministère de l'Education
Nationale estime que 65 000 établissements
scolaires sont aujourd'hui reliés à la
Toile. Selon les statistiques ministérielles,
le taux de pénétration Internet atteignait
en début d'année 100 % pour les lycéens,
91% pour les collégiens et 50 % pour les
écoliers.
Mais,
comme le font remarquer certains observateurs privilégiés,
ces taux de pénétration apparaissent "largement
surévalués". Difficile d'ailleurs
de décortiquer ces estimations, l'Education
Nationale se gardant bien de diffuser la proportion
exacte d'ordinateurs connectés au Net et réellement
mis à la disposition des élèves.
Or en intégrant ces deux paramètres, estime
un spécialiste du marché, "le tableau
risquerait de s'assombrir assez rapidement".
Ce
constat mi-figue, mi-raisin se confirme à la
prise du pouls des FAI face au marché scolaire.
Malgré l'apparente percée du Web dans
les écoles, la
plupart des grands FAI restent très évasifs
sur le sujet. "Nous n'avons pas d'actions particulières
sur les écoles", admet sans autres commentaires
un porte-parole de Tiscali France.
La même tonalité
se retrouve parmi les acteurs de l'accès Internet
pour les entreprises. "Cegetel propose aux établissements
scolaires ses offres Internet bas et haut débit standards
sur tout le territoire grâce à son réseau national
de distribution, explique un représentant de
l'opérateur. Un certain nombre d'établissements
scolaires figurent parmi nos abonnés mais nous ne les
traitons pas de façon spécifique."
"Trouver
le bon interlocuteur"
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Comment alors expliquer ce
décalage entre un marché national en pleine
effervescence et le manque d'enthousiasme des FAI ?
La solution se trouverait dans la complexité
même du marché. "L'accès
Internet dans les écoles constitue une multitude
de micro-marchés qui constituent, au bout du
compte, un énorme gateau, explique un distributeur
indépendant sous le couvert de l'anonymat. Mais
pour pénétrer ce marché, il faut
trouver les bons interlocuteurs dans les méandres
des circuits de décision entre le ministère
de tutelle, les collectivités publiques en
charge des budgets des écoles primaires et secondaires
et les directeurs des établissements au bout
de la chaîne."
A cette
difficulté d'appréhender les "bons
interlocuteurs" s'ajouteraient des
obstacles de diverses natures : matériel informatique
obsolète, manque de formation NTIC parmi le personnel
d'encadrement, manque d'intérêt de la part
de certains enseignants... "Tout ce que demande
la plupart des écoles, c'est d'avoir un interlocuteur
dans l'administartion unique pour régler tous
les problèmes", explique le distributeur
indépendant qui estime que le marché de
l'accès Internet scolaire couvre deux
millions d'ordinateurs à fournir par an, accès
Internet compris. "Si je prend 2 % de ce marché,
je suis un homme comblé."
Un seul
acteur a réussi pour l'heure à tirer son
épingle du jeu : France
Télécom. Sa présence physique sur
l'ensemble du territoire et son ancien monopole dans
le monde des télécommunications lui ont
permis d'entretenir des relations privilégiées
avec le ministère de l'Education Nationale, les
collectivités et la communauté éducative.
"Aujourd'hui, France Télécom est leader sur le
marché de l'accès Internet pour les établissements scolaires
du premier et du second degré", explique Dominique
Juffroy, responsable marketing de la formation professionnelle
à la branche Education de l'opérateur.
France
Télécom actif depuis 1998
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Ce représentant
de France Télécom a pour mission de commercialiser
la gamme d'offres dédiées aux établissements
scolaires, baptisée Scolagora, qui a été
lancée en 1998. "Selon les usages des établissements
scolaires, nous proposons des accès Internet bas débit
et haut débit, ainsi que des services associés."
L'offre Scolagora comprend un pack de 50 adresses e-mail
pour les collèges et lycées, une adresse par enseignant
et par élève pour les écoles, 20 Mo de pages personnelles
associées à chaque e-mail et 100 Mo d'hébergement de
sites pour chaque établissement.
France Télécom
reste très discret sur le nombre exact d'écoles
ayant adopté cette offre. En cas de demande d'équipement
informatique, les branches régionales de l'opérateur
montent des accords avec des distributeurs informatiques
locaux pour proposer des packs "PC + Internet".
Les entités Wanadoo et Oleane sont naturellement
mises à contribution dans leurs domaines de prédilection
(accès Internet et réseaux).
La concurrence pour France
Télécom sur ce marché pourrait
bien venir des régions elles-mêmes, aujourd'hui
en pleine réflexion quant au développement
d'infrastructures haut débit. Dans le Tarn et
en Haute-Garonne, le programme public e-Téra,
dont le lancement est imminent, prévoit par exemple
une extension haut débit
(fibre optique et satellite) dédiée à
l'éducation, baptisée Synapse. Interconnectée
avec le réseau universitaire Renater, cette extension
sera mise à la disposition des écoles,
des collèges et des établissements d'enseignement
supérieur de la région.
Du côté de la
Bretagne et des Pays de Loire, un deuxième appel
d'offres a été lancée en début
d'année concernant le réseau haut débit
Megalis. Ce réseau portera sur un millier de
connexions destinées aux collèges
et aux lycées dans les deux régions. Face
au potentiel développement des accès Internet
publics scolaires, on comprend mieux la réticence
des FAI à s'attaquer au
marché et à trouver le "bon interlocuteur".
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