(Réactualisation
13/12/02, 13h00) Mi-novembre, le Conseil économique
et social (CES) a adopté un avis sur le thème
"Technologies de l'information et de la Communication
: une chance pour les territoires ?" Une problématique
qui devrait faire l'objet d'une attention particulière
au cours de la réunion du Comité interministériel
de l'aménagement et du développement du territoire (CIADT),
qui a eu lieu vendredi matin et qui a abouti à
une proposition gouvernementale visant à donner
un statut d'opérateur télécom local
aux collectivités (cf article
JDNet du jour). Une mesure qui fait partie de la
stratégie "d'accompagnement de l'aménagement numérique
du territoire" du gouvernement Raffarin.
Le CES, lui, a esquissé
dans son avis des pistes pour favoriser le développement
local du haut débit. Dans ses conclusions, il
évoque les risques de duplication systématique
des réseaux filaires, "génératrice de gaspillage d'argent
public". L'institution consultative a également
proposé de tirer parti des réseaux existants
sur la base d'un service public de réseaux intermédiaires
et locaux à haut débit. Dans
ce cas, France Telecom jouerait un rôle central.
André Marcon, rapporteur
de l'avis, maire de Saint-Bonnet-le-Froid (Haute Loire)
et président de la Chambre régionale de commerce et
d'industrie d'Auvergne, souhaite que le gouvernement
mène une politique plus volontariste pour harmoniser
l'accès au haut débit sur l'ensemble du
territoire français.
JDNet
: Quels réseaux les collectivités territoriales
doivent-elles privilégier pour développer
le haut débit dans les zones rurales ?
André Marcon Les
zones rurales constituent une alternative intéressante
d'un point de vue démographique et économique
mais il faut y installer de nouvelles infrastructures
dont des réseaux d'accès haut débit.
Il
est nécessaire d'avoir une vision plus prospective
: si l'on veut équiper correctement notre territoire
en haut débit, il faut partir de l'existant.
Sur un total de 3 600 cantons en France, 3 000
sont accessibles en fibre optique.
Je trouve que les collectivités
se rabattent trop souvent sur la solution de dupliquer
les réseaux existants. Ce qui revient à
mettre en place des tuyaux alternatifs à ceux
de France Télécom et, du coup, à
faire perdurer la fracture numérique sans aucune
possibilité de rentabilité.
Deuxième
possibilité : financer des lignes téléphoniques
de France Telecom, seul acteur capable de répondre
à toutes nos demandes. On peut regretter le manque
de concurrence. Troisième cas : l'achat de bande
passante auprès d'opérateurs. Mais là
encore, seul France Telecom, qui dispose d'un réseau
homogène en France, est prêt à répondre.
Nous
sommes encore en situation de sortie de monopole dans
le monde des télécommunications : les
appels d'offres régionaux dans ce domaine sont
ouverts à tous mais les acteurs alternatifs n'ont
pas les moyens techniques d'y répondre.
Dans
quelle mesure un service public de réseaux intermédiaires
et locaux favoriserait l'essor du haut débit
dans les régions ?
Il
faudrait passer par la constitution d'une nouvelle société
de service public de télécommunication
- pourquoi pas France Telecom ? - qui gèrerait
les réseaux locaux. Les collectivités
régionales se placeraient en chef de file et
accorderaient des concessions à des opérateurs
qui pourront développer des contenus. Les
projets haut débit montés en collaboration
avec la Caisse des Dépôts et Consignations
risquent d'aboutir à une duplication excessive
de réseaux.
Pour
illustrer mon idée de service public de réseaux
haut débit locaux, je ferais un parallèle
avec le réseau électrique : les collectivités
locales en sont propriétaires, EDF est en charge
de leur entretien et le modèle économique
est tourné vers le client. Pourquoi ne pas transposer
ce modèle au réseau télécom
?
Je
souhaite un développement progressif du haut
débit sur l'ensemble du territoire français
en exploitant l'éventail de technologies mises
à notre disposition. Cela
peut aller très vite s'il existe une réelle
impulsion politique.
Dans
les années 70, la France a pris du retard dans
le monde des télécommunications. Sous
une forte impulsion politique, il n'a fallu que trois
ans pour que l'on déploie des lignes télécom
sur l'ensemble du territoire.
Pourquoi ne serait-il pas possible de réaliser
la même chose avec le haut débit ?
Qu'attendez-vous
du CIAT dans ce domaine ?
Je suis de plus en plus perplexe dans la capacité
à l'Etat de prendre des mesures de bon sens.
L'Etat a peur de son ombre avec les problèmes
financiers que rencontre actuellement France Telecom,
qui constitue par ailleurs un lobby très puissant.
Je
constate que, jusqu'ici, les discours politiques sur
la "société de l'information",
tous bords politiques confondus, sont restés
du pipeau.
Je
souhaite que l'on définisse des objectifs clairs
en dehors des envolées lyriques autour de l'Internet.
Sur le terrain, on retrouve également une certaine
frilosité des élus locaux sur ce sujet.
Ils ont une perception trop technique du sujet. En
tant que maire d'une
petite commune
qui dispose parallèment d'une
casquette de chef d'entreprise, je vais proposer un
accès haut débit par satellite aux particuliers
et aux entreprises. Quitte à ce que l'initiative
soit à la limite de la légalité.
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