Le Net
Robert Ménard (Reporters sans frontières) : "Internet est considéré comme un média à part, y compris dans les pays démocratiques"
A l'occasion de la publication du rapport 2003 "Internet sous surveillance", le secrétaire général de l'association qrevient sur les méthodes employés par les gouvernements pour entraver la libre circulation de l'information en ligne.  (Vendredi 20 juin 2003)
         
Le site
Reporters sans frontières
Reporters sans frontières (RSF) a rendu public son rapport 2003 "Internet sous surveillance" sur les entraves à la circulation de l'information sur le réseau. Le texte peut être téléchargé gratuitement sur le site de l'association (en préambule figure une introduction de Vinton G. Cerf). Le document de RSF scanne les pratiques dans 60 pays, des régimes autoritaires comme la Chine aux Etats démocratiques comme les Etats-Unis. Robert Ménard, Secrétaire général de l'association qui défend la liberté de la presse dans le monde, revient sur les diverses manières d'effectuer un contrôle du média Internet.

JDN. Dans son rapport annuel traditionnel sur la liberté de la presse dans le monde, RSF recense les entraves à la libre circulation de l'information dans les médias traditionnels (presse, radio, télévision). Peut-on calquer la cartographie sur le média Internet ?
Robert Ménard. Evidemment, parmi les 60 pays traités dans ce rapport Internet, on retrouve en bonne place la plupart des régimes autoritaires du monde. Mais qui pourrait s'en étonner ? Des pays comme la Tunisie ou la Chine sont bien placés dans le classement. Sur les 51 cyber-dissidents que recense RSF, les trois-quarts sont détenus en Chine dite populaire. Le régime a mis en place une immense cyberpolice (que l'on estime à plusieurs dizaines de milliers d'agents) chargée de surveiller les internautes. En Arabie Saoudite, on peut parler d'un immense intranet où l'information - filtrée sur les sujets religieusement non corrects - circule en vase clos. Autre pays marqué par les entraves sur Internet : Cuba. Là-bas, Internet est interdit de fait au commun des mortels. Au 1er janvier 2002 par exemple, le régime de Fidel Castro a interdit l'achat d'ordinateurs sans autorisation officielle. Du coup, les voix dissidentes détournent l'interdiction en diffusant par téléphone les informations à la communauté cubaine installée en Floride, qui répercute les éléments en ligne. Toutefois, il existe des différences avec notre rapport annuel traditionnel sur la liberté de la presse. Par exemple, certains pays africains soumis à des régimes dictatoriaux n'y figurent pas. Tout simplement parce qu'ils ne disposent pas de l'infrastructure télécom nécessaire au développement du Net. Nul doute que l'accès Internet y serait censuré le cas échéant, comme le reste de la presse. Seconde grande différence : certains pays démocratiques sont infiniment plus précautionneux voire plus autoritaires vis-à-vis du Net que les autres médias.

Généralement, on considère l'Internet comme une passoire. Comment parvient-on à effectuer un contrôle de l'information en ligne ?
Ce sont principalement des systèmes de filtre, des réglages spécifiques de serveurs proxy ou des changements d'adresses IP perpétuels. C'est le jeu du chat et de la souris. En Chine, il suffit de placer le mot "démocratie" sur un site pour qu'il soit interdit d'accès. RSF a mené un test sur les forums de discussions en Chine pour savoir si des messages subversifs à divers degrés parvenaient à s'afficher sur ces lieux de discussion. Des mails comprenant des mots écrits en chinois comme "dissidents", "Union démocratique" ou même "Tien An Men" n'arrivent jamais à bon port. Il y a une liste officielle de mots interdits qui sont automatiquement filtrés. Lorsqu'on échappe à ce premier barrage, les autres messages postés sur un forum et considérés comme un appel à la révolte ne tiennent que quelques minutes. Prochainement, RSF va lancer une opération concernant le Vietnam, un autre pays qui se distingue par les entraves à la circulation de l'information en ligne. Nous cherchons à savoir comment contourner le dispositif de surveillance pour que des sites Web interdits par le pouvoir soient consultables à l'intérieur du pays.

Le site
Reporters sans frontières

Début juin, le Conseil de l'Europe a réitéré le principe de la libre circulation de l'information pour les médias électroniques. Les pouvoirs publics des pays occidentaux placent-ils Internet sur un pied d'égalité avec les autres médias ?
Non. Internet reste un média à part. Il y a une telle crainte autour de cet outil de communication qu'on finit par le traiter différemment. Souvent, on affirme que beaucoup d'informations fausses circulent sur Internet. C'est oublier un peu vite qu'il y a également des choses fausses dans les médias traditionnels. La profession journalistique n'est pas prête à défendre le média Internet, considérant que cet outil permet de s'affranchir des médias. C'est ressenti un peu comme un privilège qu'on lui retire. Aux Etats-Unis, comme dans de nombreux pays européens, nous avons assisté à une vague de projets de loi déposés pour surveiller le réseau des réseaux. Un réflexe qui s'est amplifié après le 11 septembre en arguant qu'il faut lutter contre le terrorisme. Que l'on s'entende bien : les législations mises en place ne constituent pas une entrave directe à la libre circulation de l'information sur le Net mais elles placent le Net sous surveillance. Cela me semble légitime pour lutter contre les organisations criminelles et terroristes. Mais ce procédé d'écoute en ligne devrait recevoir au préalable le feu vert d'un magistrat. C'est ce qui fait la différence entre une mesure légitime et une mesure arbitraire.

Entrave à la libre circulation de l'information en ligne :
la Tunisie "à l'honneur"
Le cyberdissident tunisien Zouhair Yahyaoui, condamné à 2 ans de prison pour "propagation de fausses nouvelles" sur son site Internet Tunezine.com, vient de recevoir le premier Prix Cyberliberté de Reporters s@ns frontières, en association avec Globenet. C'est sa fiancé Sophie Piekarec qui a reçu le prix, doté de 7 600 euros.
Zouhair Yahyaoui a été arrêté en juin 2002 à Tunis pour avoir dénoncé ce qu'il considère comme une absence totale d'indépendance du pouvoir judiciaire en Tunisie dans une contribution diffusée en juillet 2001 sur son webzine TUNeZINE. Un an plus tard, il est condamné, en appel, à deux ans de prison pour "propagation de fausses nouvelles". Depuis le début 2003, Zouhair Yahyaoui a entamé trois grèves de la faim.
[Philippe Guerrier, JDNet]
 
 
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