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La réforme de la Cnil sous haute tension
Adoptée par le Sénat, la nouvelle loi "informatique et libertés" dispense les entreprises, sous conditions, de formalité déclarative et autorise les sociétés à constituer des fichiers d'infractions. Les critiques affluent.   (20/07/2004)
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L'adoption de la nouvelle loi "informatique et libertés" aurait pu passer inaperçue au milieu d'un mois de juillet morose. Pourtant, le changement de régime de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) suscite déjà de nombreuses polémiques. A peine adopté par le Sénat, le projet de loi sur "la protection à l'égard des traitements de données à caractère personnel" est l'objet de vives critiques de la part d'anciens membres de la Cnil et d'associations de défense des libertés individuelles.

La réforme de la loi "informatique et libertés" du 6 janvier 1978, imposée par une directive européenne de 1995, a pour ambition d'accompagner l'essor du réseau Internet, l'évolution de l'informatique et l'explosion du nombre des fichiers à données personnelles dont la Commission est l'instance de surveillance. Le texte a été définitivement adopté jeudi 15 juillet par un vote du Sénat, sans les voix des parlementaires socialistes et communistes dont les 45 propositions d'amendement ont été rejetées.

"Le projet proposé accouche d'une réforme présentée comme étant a minima, sans enjeux autres que techniques", écrivaient, dans Le Monde daté du 13 juillet, quatre anciens membres de la Cnil et deux avocats spécialisés dans les NTIC. Ils dénoncent notamment de nombreuses incohérences qui sont susceptibles de nuire aux libertés des citoyens.

Pour simplifier l'activité de la Cnil, le texte dispense désormais de toute formalité déclarative les entreprises, collectivités ou associations ayant nommé "un correspondant à la protection des données". Les signataires de l'article dénoncent le "flou juridique inquiétant" qui entoure les attributions et les garanties d'indépendance de ce correspondant.

Deux autres propositions suscitent également l'inquiétude. La constitution de fichiers comportant des données relatives à la sécurité publique, à la défense ou à la sûreté de l'Etat ne sera plus soumis à l'aval de la Cnil. Les anciens membres de la Commission voient dans ces dérogations au principe d'interdiction de collecter des données sensibles "une volonté affichée de se libérer de l'influence ou du pouvoir de persuasion d'une autorité indépendante."

Dernier point de désaccord, et non le moindre : la possibilité pour les personnes morales (entreprises, associations) victimes d'infraction de constituer des fichiers d'infraction et de condamnation. Explicitement mentionnées dans le texte adopté, les société de gestion de droits d'auteurs sont l'illustration la plus flagrante de ces personnes morales. Le collectif d'associations Delis (Droits et Libertés face à l'informatisation de la société), l'association Iris (Imaginons un Internet solidaire) et la Ligue des droits de l'homme dénoncent, dans un communiqué commun, la "constitution de véritables casiers judiciaires privés."

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En conclusion, les auteurs de l'article paru dans Le Monde estiment que "le projet de loi est à refaire", "aucun fichier sensible ne ne doit être créé sans l'autorisation de la Cnil". Les groupes de l'opposition parlementaire ont déposé un recours devant le Conseil constitutionnel. Dans l'éventualité d'une décision négative, Delis, la LDH et Iris se réservent la possibilité d'une plainte auprès de la Cour de justice des Communautés européennes pour infraction à la législation européenne.
 
 
Emilie LEVEQUE, JDN
 
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