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Gérard Haas (Avocat) : "Deux points du texte me paraissent anti-constitutionnels"
Le nouveau texte qui encadre la Cnil pourrait se voir gratifié d'un avis défavorable du Conseil constitutionnel.   (20/07/2004)
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Cnil

La nouvelle loi "informatique et libertés" a été définitivement adoptée par un vote du Sénat jeudi dernier. Le texte est critiqué par d'anciens membres de la Cnil et par des associations de défense des libertés individuelles en raison d'atteinte à la protection des données personnelles des citoyens. L'analyse de Me Gérard Haas, avocat spécialisé dans les NTIC.

JDN. Que penser d'un point de vue légal du projet de loi sur la "protection à légard des traitements de données à caractère personnel" adopté par le Parlement ?
Gérad Haas. La nouvelle loi "informatique et libertés" est une menace pour nos libertés de citoyen. Au départ, il s'agissait de transposer dans le droit français une directive européenne datant de 1995. Or, le gouvernement est allé beaucoup plus loin que ce qui lui était demandé. Pis, il s'agit d'une véritable érosion de l'esprit de la loi "informatique et liberté" dans sa version originelle de 1978. Quatre grands axes me semblent dangereux : l'allègement du contrôle par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) des fichiers touchant à la souveraineté, le renforcement des pouvoirs de sanction de la Cnil, la création de "correspondants à la protection des données" au sein de l'entreprise et la possibilité pour des personnes morales de constituer des fichiers d'infraction et de condamnation. Quelles seront les attributions et les garanties d'indépendance du "correspondant à la protection des données" dès lors que celui-ci, en tant que salarié à part entière de l'entreprise, ne bénéficie pas des mêmes libertés et de la marge de manoeuvre des délégués syndicaux ?

La possibilité pour des personnes morales de constituer des fichiers d'infraction est-elle une faveur accordée par le pouvoir politique à l'industrie du disque ?

Derrière toute loi, il y a des lobbies et dans le cas présent, la pression des majors de l'industrie du disque et des sociétés d'auteurs est palpable. Il existe aujourd'hui une volonté affichée du gouvernement de lutter contre le piratage de fichiers musicaux sur Internet. Cette volonté est clairement transposée dans le texte de loi. Mais au nom du monopole de la propriété intellectuelle, on autorise un fichage des internautes soupçonnés d'échanger illégallement de la musique. Que devient la présomption d'innocence ? La possibilité de créer des fichiers d'infraction porte évidemment atteinte aux libertés du citoyen face à la collectivité. Ces casiers d'infractions sont de véritables casiers judiciaires privés, contre lesquels le citoyen n'a aucune garantie. Les auteurs sont mieux protégés que les consommateurs.

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Quels sont les recours possible face à cette loi ?
Les députés et sénateurs de l'opposition ont déjà déposé un recours devant le Conseil constitutionnel. Sans prétendre connaître la décision que prendra le Conseil, il faut rappeler que ce dernier est toujours intervenu de manière positive pour redresser la barre en cas de maltraitance des principes constitutionnels et donc des libertés fondamentales des citoyens. Il faut donc avoir confiance. Juridiquement, le Conseil constitutionnel doit attester de la légalité des textes de loi en référence aux principes de la constitution. Or, dans le cas de la nouvelle loi "informatique et libertés", deux points me paraissent juridiquement anti-constitutionnels : la statut du correspondant à la protection des données et l'article 9 qui autorise la création de fichiers d'infraction par une personne morale. Sous cet angle, il y a de bonnes raisons d'espérer que le Conseil constituionnel rendra un avis défavorable. Dans le cas contraire, il reste toujours la possibilité de déposer un recours devant la justice européenne.


 
 
Rédaction JDN
 
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