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Comment prévenir l'usage abusif des marques dans les liens sponsorisés |
Depuis 2003, les affaires judiciaires concernant l'affichage abusif d'un lien sponsorisé vers un site ne bénéficiant d'aucun droit sur une marque se sont multipliées en France. Cinq conseils pour éviter ces dérives.
(21/04/2006) |
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En principe, les enchères placées par les annonceurs dans les programmes de positionnement
publicitaire online sont censées porter sur des termes génériques. Mais ce placement
n'est pas limité aux termes du langage courant et peut également intervenir sur
des marques. En effet, un annonceur peut naturellement vouloir voir son site apparaître
quand l'une de ses marques est saisie sur les moteurs de recherche. Cette médaille
a naturellement un revers : l'affichage abusif d'un lien sponsorisé vers
un site ne bénéficiant d'aucun droit sur une marque. Autrement dit l'usage abusif
de la marque d'un tiers.
Selon une étude de la société américaine Hitwise, 15 % des internautes ayant
tapé le nom d'une marque sur un moteur de recherche atterrissent soit sur
un comparateur de prix, soit sur le site d'un revendeur des produits de la marque,
ou pire, sur le site d'un concurrent. Une marque peut-elle éviter cette dérive ?
Oui, expliquent tour à tour Jérôme Hoerlé, directeur technique SEM de Takezo
(réseau Isobar, filiale interactive d'Aegis Media), Frédéric Glaize, Conseil
en Propriété Industrielle au sein du cabinet Meyer & Partenaires, et
Cédric Manara, professeur de droit spécialisé NTIC à l'Edhec
Business School. A condition de suivre ces quelques conseils.
1
Certifier sa marque. Les droits de propriété industrielle
confèrent à leur bénéficiaire un avantage économique qui consiste en un monopole
légal. Il existe différents "signes distinctifs" pouvant faire l'objet d'un droit
de propriété : dénominations sociales, noms commerciaux et enseignes, appellations
d'origine, noms de domaine et marques. La marque, signe distinctif d'un produit
ou d'un service, bénéficie dans le code de la propriété intellectuelle de l'arsenal
jurididique le plus efficace en termes de protection. Une marque ne devient une
marque, au sens juridique du terme, qu'après avoir fait l'objet d'une demande
de dépôt et d'un enregistrement auprès d'une autorité certifiante : l'INPI
(Institut national de la propriété industrielle) pour les marques française, l'OMPI
(Organisation mondiale de la propriété intellectuelle) pour les marques internationales
et l'OHMI (Office de l'harmonisation dans le marché intérieur) pour l'Europe.
Ces organismes délivrent un certificat d'enregistrement, document indispensable
pour garantir la protection de sa marque, dans le monde réel comme sur la Toile.
2
Marquer son territoire virtuel. Aucune régie de liens sponsorisés n'exerce
une protection a priori des marques. C'est à l'entreprise d'adopter une démarche
active auprès des réseaux, via une procédure de notification de marque. L'entreprise
doit donc lister sa ou ses marques - preuve du certificat de l'INPI à l'appui -
ainsi que les mots-clés associés. Elle peut également accorder des droits d'exception
aux sociétés de son choix, ses affiliés ou revendeurs par exemple. Elle envoie
ensuite cette liste par e-mail à une adresse qui lui est communiquée par la régie
(voir le tableau ci-dessous). Dès lors, la marque est "blacklistée".
Relativement simple, gratuite et rapide, cette pratique est devenue monnaie courante
dans les relations entre les marques et les régies de liens sponsorisées présentes
en France. Mais cette construction d'un "territoire de marque virtuel", comme
l'appelle Cédric Manara, n'a rien de légal dans le sens où la régie de liens sponsorisés
n'est pas contrainte de proposer cette option aux marques.
3
Rester vigilant. Malgré ces premières mesures, les cas d'usage abusif de la
marque par un tiers non titulaire des droits de propriété ne manquent pas. En
effet, la circonscription du périmètre des marques porte exclusivement sur les
mots-clés, non sur le message publicitaire associé au lien. Par ailleurs, lorsque
la marque contient un terme générique, "voyage" par exemple, il est plus ardu
de la protéger efficacement. En effet, certaines régies - Google notamment -,
proposent aux annonceurs des outils énumérant une base statistique des requêtes
les plus fréquemment formulées par les internautes contenant certains termes ou
se rapportant à certains concepts. Ce système de requêtes larges (ou "broadmatch")
peut amener l'annonceur à utiliser de manière abusive une marque alors associée
à un terme générique. Bref, pour assurer une protection efficace de sa marque,
l'entreprise titulaire doit adopter une stratégie de veille active sur tous les
réseaux de liens sponsorisés de la Toile française, en constituant une équipe
dédiée chargée de se rendre régulièrement sur les moteurs de recherche, ou en
utilisant par exemple un outil de benchmarking des mots-clés et positionnements
publicitaires comme Moklic.com, site du réseau Abondance.
4
En cas d'abus, attaquer ! Le Forum des droits sur l'Internet recommande
aux personnes s'estimant victimes d'un abus de marque de faire état de leurs griefs
en premier lieu auprès de l'annonceur, puis de signaler cet abus au prestataire
de liens sponsorisés pour tenter d'obtenir la cessation de cet usage. Si cette
procédure à l'amiable ne donne pas de résultat, les titulaires des marques peuvent
recourir à la voie judiciaire. Pour cela, la marque doit disposer d'une preuve
incontestable : un constat décrivant ce qui apparaît sur l'écran, daté et
signé soit par un huissier de justice, soit par un agent assermenté de l'APP (Agence
pour la protection des programmes). La marque peut alors enclencher une procédure
judiciaire, soit pour contrefaçon de marque (Code de la propriété intellectuelle)
devant un Tribunal de Grande Instance, soit pour concurrence déloyale (Code de
la consommation) devant un Tribunal de commerce. La partie plaignante peut d'ailleurs
engager un "référé marque", procédure d'urgence lui permettant d'obtenir en quelques
semaines un jugement ordonnant l'arrêt de l'usage abusif.
5
Identifier le responsable. Le cadre juridique français de la propriété intellectuelle
est clair : l'usage abusif de la marque d'un tiers est assimilé à la contrefaçon,
donc condamnable civilement et pénalement. Etonnemment, sur la dizaine d'actions
en contrefaçon de marques intentées en France depuis octobre 2003, les régies
de liens sponsorisés sont les premières à voir leur responsabilité recherché.
Parce qu'il est "souvent difficile, voire impossible d'établir l'identité de l'annonceur
contrefacteur", explique Frédéric Glaize. Parce que "attaquer une société qui
fait des bénéfices est plus rentable que d'attaquer un petit annonceur", estime
pour sa part Cédric Manara. Dans 80 % des cas, le moteur de recherche - Google
principalement - a été condamné, les juges considérant l'intervention du
prestataire de liens comme intermédiaire dans l'offre commerciale de ses annonceurs
- notamment via le système de suggestion de mots-clés - comme un acte
positif de contrefaçon.
Mais les affaires les plus récentes (affaire Kertel contre Google et Cartephone,
TGI Paris, décembre 2005 ; affaire TWD Industries contre Google France, TGI
Nice, février 2006), ont affirmé la non responsabilité du prestataire de liens
commerciaux. La jurisprudence évolue progressivement vers plus de souplesse envers
les régies, tandis que les annonceurs sont de plus en plus souvent mis en cause
et condamnés, dans 100 % des cas. Par conséquent, "une marque qui assigne
une régie doit être sûre de son coup, posséder des preuves irréfutable de sa responsabilité,
car la régie a les moyens financiers de soutenir une longue procédure", conclut
Frédéric Glaize.
Procédure
de notification d'une marque en France
auprès des prestataires de liens sponsorisés |
Réseaux
de liens sponsorisés
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Adresse |
Google France
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Ecrire une lettre signée sur
papier à en-tête de la société, avec les informations suivantes : nom, coordonnées,
liste des marques concernées, identification des publicités concernées, etc (consulter
l'intégralité de la procédure)
Envoyer la lettre au service au service juridique de Google France ou envoyer
un e-mail à marques@google.com
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MIVA France
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Envoyer un mail à editorialfrance@miva.com
expliquant le cas avec une copie du dépôt INPI
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MSN Keywords
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Yahoo Search Marketing France
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Ecrire un e-mail à l'adresse protectionvieprivee.fr@yahoo-inc.com
en indiquant les marques et les mots clés concernés et en joignant une copie du
dépôt INPI
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Source : Takezo
Développement, avril 2006 |
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