Thierry Breton a pris tout le monde de court. Il a dévoilé, dans le Journal du Dimanche, les principales lignes de son projet de loi sur la consommation. Elles concernent en premier lieu les opérateurs télécom, qu'ils soient FAI ou opérateurs mobiles. Au programme de ce projet qui pourrait être examiné au mois d'octobre : le délai de résiliation des abonnements Internet et de téléphonie mobile passerait de deux mois à dix jours, les opérateurs auraient alors dix jours pour rembourser le dépôt de garantie (sur les Box, par exemple), le temps d'attente des hotlines devra être entièrement gratuit. Enfin, la loi pourrait ouvrir la voie à une forme de "class action", un recours collectif devant la justice pour dénoncer les conditions abusives.
Des annonces qui ont provoqué la colère des FAI. Régulièrement, ceux-ci ont des réunions avec le ministre délégué à l'Industrie François Loos et le ministre de l'Economie et des Finances Thierry Breton. Et les dispositions exposées par celui-ci n'iraient pas du tout dans le sens de ces dernières réunions. "Cela ressemble à de la communication pré-présidentielles", affirme-t-on chez l'un des opérateurs français. "C'est dommage, d'autant que les discussions avançaient plutôt bien, sur un ton consensuel", indique-t-on ailleurs.
Le ministre aurait donc décidé de passer en force, en annonçant par ailleurs un examen du projet de loi dès l'automne, alors que l'on pouvait s'attendre à un report pour le début de l'année 2007. Mais les opérateurs apparaissent inégalement positionnés devant cet effet d'annonce. Certains ont commencé à mettre en oeuvre les mesures réclamées par le gouvernement depuis plusieurs mois. Orange a ainsi rendu gratuite sa hotline depuis décembre 2005 pour ses clients Internet (ex-Wanadoo), emboîtant le pas à Alice, puis pour ses clients mobiles depuis le mois de juin.
Conditions générales de vente des principaux FAI et opérateurs mobiles |
Opérateur |
Délai de résiliation |
Facturation de la hotline |
Free |
40 jours |
0,34 euro la minute |
Neuf Cegetel
|
1 mois |
0,34 euro la minute |
Alice |
60 jours |
gratuite |
Club Internet |
1 mois |
0,34 euro la minute (en option : hotline illimitée pour 4 euros par mois) |
Orange (Internet) |
1 mois maximum |
gratuite |
Orange (mobile) |
1 mois |
gratuite |
SFR |
1 mois |
Appels inclus dans le forfait ou prix d'un appel vers un mobile SFR |
Bouygues Telecom |
1 mois |
Iinclus dans le forfait ou 0,46 euro la minute |
Source
: Journal du Net, août 2006 |
Peu à peu, les opérateurs se faisaient également à l'idée de la gratuité du temps d'attente des hotlines, même si cela représentait, selon eux, un manque à gagner compris entre 15 et 20 millions d'euros (lire l'article du 29/09/2006). Mais, selon certains, des difficultés techniques empêcheraient toujours la mise en oeuvre effective. Chez Club-Internet, notamment, on met en avant la difficulté à distinguer, dans le décompte, temps d'attente et temps de communication pour certains appels. C'est ce qui explique que, pour le moment, les opérateurs concernés ont rendu leur hotline complètement gratuite.
Concernant l'abaissement des délais de résiliation,
il subsiste encore de grosses différences entre ce qu'appliquent les opérateurs et les souhaits de Thierry Breton. Actuellement de deux mois, en règle générale, celui-ci a déjà été abaissé par la plupart des FAI et des opérateurs mobiles à un mois. Mais la volonté du ministre de le réduire à dix jours, pour l'aligner notamment sur les pays anglo-saxons, risque de se heurter à la résistance des opérateurs.
Mais ils ne sont pas les seuls à se montrer mécontents des annonces. Le projet de loi ne satisferait pas non plus les associations de consommateurs. En particulier la disposition visant à faciliter des actions juridiques
collectives. Le mois dernier, déjà, l'UFC-Que Choisir avait dénoncé les démarches compliquées comprises dans le projet, pour un consommateur qui souhaiterait se joindre à une démarche collective. Selon elle, "les victimes ne seraient pas directement associées à la procédure. Il faudrait dans un premier temps qu'un tribunal constate la faute du professionnel pour que les victimes puissent ensuite être indemnisées." De l'avis de tous, donc, le ministre devra revoir sa copie avant de la présenter à l'Assemblée... |