Attribuer une partie du dividende numérique à la téléphonie
mobile : c'est l'une des recommandations les plus incisives
parmi la dizaine de conclusions du rapport intitulé "De la fracture
numérique à la convergence des réseaux, téléphonie mobile, Internet
et TNT dans les territoires de 2002 à 2007". Présenté le 19
décembre par Emile Blessing, député du Bas-Rhin et président
de la Délégation à l'Aménagement et au développement durable
du territoire de l'Assemblée nationale, ce rapport dresse un
bilan du déploiement de la couverture numérique sur le territoire
national, fil directeur des travaux de la Délégation depuis
cinq ans, et pose les enjeux futurs liés à la convergence des
réseaux numériques en France.
Comment, et à qui attribuer les fréquences libérées par le basculement
de la télévision au tout analogique ? Comment contrôler
les contenus diffusés ? Faut-il réorganiser le mode actuel
de régulation du spectre ? Autant de questions laissées
en suspens par le gouvernement dans son projet de loi sur la
télévision du futur (lire l'article
du 18/10/2006), auxquelles le rapport de la délégation apporte
en contre-pied des éléments de réponse tangibles.
La première
proposition du rapport Blessing porte sur l'indispensable pérennisation
du réseau de téléphonie mobile sur tout le territoire dont la
couverture sera définitivement achevée en 2007. L'enjeu futur
identifié par la Délégation à l'aménagement et au développement
durable du territoire est de faire passer sur ce réseau les
téléphonies 3G, puis 4G qui s'annoncent. "Les populations des
territoires les moins denses ou les plus difficiles doivent
avoir accès aux services qu'elles vont offrir. Pour cela il
faut dans l'avenir que continuent à être attribuées à la téléphonie
mobile des fréquences permettant de faire passer les communications
dans leur nouvelle définition (3G, 4G) sans qu'il soit besoin
de construire des relais supplémentaires." Autrement dit :
le rapport Blessing préconise qu'une partie des fréquences hertziennes
libérées via le basculement de la télévision analogique au tout
numérique, le fameux "dividende numérique", soit attribuée à
la téléphonie mobile point à point.
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le dividende numérique entre services audiovisuels
et télécoms |
Toujours sur la question du dividende numérique, alors que le
gouvernement a choisi de ne pas se prononcer sur le partage
futur de ces fréquences basses de la bande UHF, afin de ne pas
préempter ce potentiel de ressources dites en or, le rapport
Blessing évoque pour sa part, la nécessité de partager équitablement
ce dividende entre services et opérateurs : "il n'a vocation
à être réservé ni à de seuls services de télévision, ni aux
éditeurs actuels de programmes."
Dans ce cadre, poursuit le rapport, il est nécessaire d'adapter
l'organisation de l'Etat à la "convergence numérique", qui permet
de faire passer les mêmes contenus, et notamment la télévision,
par des réseaux autrefois spécialisés (câble, ADSL, téléphone
mobile). Celle-ci pose la question de l'instance de la régulation
des ressources hertziennes. L'organisation de régulation du
spectre radio est actuellement partagée entre trois organismes :
l'Agence nationale des fréquences (ANFR), l'Autorité de régulation
des communications électroniques et des postes (Arcep) et le
Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Cette organisation
"devra sans doute être modifiée", affirme le rapport Blessing
qui s'inscrit ainsi dans le sens des réflexions de l'Arcep.
Son président, Paul Champseur, évoquait en effet, en novembre
dernier, l'éventualité d'une fusion entre les autorités de régulation
des télécoms et de l'audiovisuel.
Autre pavé jeté dans la mare par la Délégation : la nécessité
de permettre aux opérateurs ADSL de diffuser toutes les chaînes
de télévision numérique, alors qu'aujourd'hui "certaines chaînes
hertziennes analogiques refusent à des opérateurs ADSL le droit
de les diffuser, même à des conditions économiques fonctionnelles",
souligne le rapport Blessing. Un constat qui sonne comme un
soutien inespéré pour les fournisseurs d'accès Internet, actuellement
en phase de renégociation de l'accord sur la VOD avec l'industrie
du cinéma (lire le verbatim
de novembre 2006).
A l'aube de l'examen à l'Assemblée Nationale du projet de loi
relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et
à la télévision du futur, prévu les 20 et 21 janvier 2007, le
rapport d'information sur le déploiement de la couverture numérique
du territoire pose avec clairvoyance les questions clés sur
lesquelles le gouvernement sera amené à légiférer pour soutenir
la convergence numérique. |