Retranscriptions
Christophe Cousin (SNCD) : "Une loi doit structurer un marché, pas le brider"
Le projet de loi sur l'économie numérique inspire méfiance dans le monde de l'e-mailing. Le président de la commission Internet du Syndicat national de la communication directe s'en explique.   (Jeudi 19 février 2004)
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Pour son baptême du feu en matière de Chat, Christophe Cousin, président de la commission "eDirect" du SNCD (Syndicat national de la communication directe) est revenu sur la position et sur les actions du syndicat concernant les principaux débats qui animent le monde de l'e-mail marketing. Et les débats sont nombreux, au sujet de la Loi pour la Confiance dans L'Economie Numérique (LEN), mais aussi du spam. Plus de trente questions posées par les lecteurs du JDN pour comprendre et faire le point.

Le SNCD c'est quoi exactement ?
Christophe Cousin.
Le Syndicat National de la Communication Directe, un syndicat professionnel donc, qui a été créé en... 1933.

Quelle est l'action du SNCD concernant l'e-mailing ?
Nous travaillons sur plusieurs axes pour structurer et développer ce marché en définissant des best pratices.

Quelle est la taille du marché du mail marketing (nombre de prestataires, CA, effectifs...) ?
En 2004, c'est plusieurs dizaines de millions d'e-mails envoyés pour environ 10-15 millions d'euros de CA.

Ces chiffres c'est en France ?
Oui. J'ajoute que c'est aussi un grand nombre d'acteurs (propriétaires, courtiers, agences, routeurs) dont les effectifs globaux sont plus difficiles à estimer.

Quelle est votre position concernant la LEN ? Etes-vous favorable à une réglementation ?
Ça commence fort ! Nous ne sommes pas contre une loi sauf si elle cause un préjudice trop important aux acteurs de ce marché. Cela pourrait être le cas avec la LEN dans sa version actuelle. Il faut aussi tenir compte de l'auto-régulation des acteurs, qui est très forte en France. Une loi doit permettre de structurer et de développer le marché plutôt que de le brider.

Que reprochez-vous au projet de loi LEN ?
Tout d'abord, je parle ici d'une partie de la LEN (l'article 12). Beaucoup d'articles ne concernent pas l'e-mail et la prospection directe. Il y a plusieurs reproches : le premier concerne l'objectif de la loi. Il nous semble illusoire de réduire le spam avec une loi franco-française alors que la majorité du spam provient des Etats-Unis et d'Asie. Par ailleurs, l'ambiguïté de certaines phrases ne va rien résoudre, bien au contraire. Enfin la création d'un régime transitoire obligeant à resolliciter des personnes ayant déjà exprimé un consentement peut amener certains acteurs à de grandes difficultés économiques alors qu'ils ont toujours bien géré leur "relation client".

Parmi les acteurs du marché, qui est impacté par la LEN ? Pourquoi ?
Dans la version actuelle de la loi, toutes les sociétés qui collectent et exploitent des données personnelles sur les médias électroniques nous semblent être impactées. Elles vont être impactées sur leur façon d'exploiter les bases déjà constituées (c'est le fameux régime transitoire) et sur la façon de collecter des consentements à moyen terme.

La LEN en France va-t-elle être plus souple ou plus dur que dans le reste de l'Europe ? Le SNCD a-t-il une action sur l'application de cette loi ?
Elle est dans la lignée des autres textes (ce qui est logique puisque c'est une déclinaison d'une directive européenne). Le SNCD, avec d'autres syndicats, mène de nombreuses actions de lobbying pour faire avancer cette loi. Et pour l'instant, cela fonctionnent bien puisque les textes ont déjà évolué, et plutôt dans le bon sens. Mais rien n'est fini.

Pardon pour les non-inités mais pourquoi l'article 12 de la LEN pose un souci ?
Pour le SNCD, il reste trois sujets importants : le périmètre de la loi et son application dans le monde B2C et B2B (qui doivent être différents de la nature même des communications échangées), la façon dont doivent être collectés les consentements (il existe de nombreuses façons de le faire respectueusement sans être contraint par une modalité unique) et le régime transitoire de six mois après la promulgation de la loi. Ce régime pourrait obliger les propriétaires de base à resolliciter les internautes pour leur redemander un consentement.

Comment faites-vous du lobbying auprès des politiciens pour faire changer cela ?
La démocratie française est bien faite pour cela : le SNCD est allé voir les députés, les sénateurs, le gouvernement pour expliquer et faire avancer le texte en proposant des amendements.

Le régime transitoire dont vous parliez a-t-il déjà été appliqué dans d'autres pays ?
Pas à ma connaissance.

Le SNCD a-t-il noué des alliances avec d'autres lobbies ou association pour avoir plus de poids face aux politiciens ? Si oui, lesquels ?
Oui bien sûr. Nous travaillons en particulier avec l'AACC et la Fevad pour avoir plus de poids et éviter de s'éparpiller.

Vous réfléchissez à des moyens de lutte contre le spam au sein du SNCD ?
Il faut définir de quoi on parle : le spam c'est environ 15 à 20 milliards d'e-mails par jour. La communication directe par e-mail de prospection c'est quelques dizaines de millions par AN. Ce n'est donc pas la prospection commerciale qui créé du spam. Qui plus est, les membres du SNCD n'envoient des messages qu'à des individus ayant accepté de recevoir des newsletters, des promotions, etc. Nous sommes donc dans un régime de consentement qui n'a rien à voir avec le spam.

Comment définiriez-vous le spam ?
Ce n'est pas facile ! Mais généralement c'est un envoi très massif d'e-mails envoyés à des personnes qui n'ont pas donné leur accord pour être sollicitées et sans possibilité de désabonnement. Et généralement c'est pour des produits et services très identifiés (réduction de dettes, viagra etc.).

Collaborez-vous avec des homologues américains pour lutter contre le spam qui vient des Etats-Unis ?
Pas encore. Cela pourrait venir car une nouvelle loi contre le spam est en train d'être appliquée là bas. Il faut dire que l'ampleur du spam est beaucoup plus important outre-Atlantique. Et nous souhaitons travailler avec les webmails et les FAI (dont certains américains) pour que les e-mails provenant des membres du SNCD ne soient pas blacklistés.

Vous parliez des différences d'application du texte actuel entre BtoC et BtoB. Quelles sont-elles ?
Dans le B2B, il est normal d'envoyer un e-mail non sollicité. C'est ce qui arrive dans le cadre d'une démarche commerciale et de relations normales entre les sociétés. Interdire ce type de communication, c'est tuer le commerce ! Avant d'envoyer un e-mail à un de mes contacts commerciaux, je ne peux pas lui demander son autorisation préalable à chaque fois. Le serpent se mord la queue. Par contre, nous pensons qu'il faut aussi dans le B2B pouvoir se désabonner d'une liste de diffusion pour éviter des envois répétés et non souhaités.

A part être président de la commission eDirect, comment occupez-vous votre temps ?
Je co-dirige une société qui accompagne des clients dans leur projets CRM B2C et B2B avec une approche très "terrain".

L'e-mailing est-il plus performant ou non que le mailing postal ?
Vaste question. Qui nécessite de définir la notion de performance. Cela dépend pour qui (la cible) et pour quoi faire (par exemple les produits & services proposés). C'est donc des médias plus complémentaires qu'autre chose. Et qui fonctionnent très bien lorsqu'ils sont couplés (envoi simultané d'un courrier postal et d'un e-mail).

Pas performance, parlons de coûts, de retours...
Pour les coûts, l'e-mail est bien sûr moins cher à créer, router etc... Pour les retours c'est déjà plus difficile à analyser : il est compliqué de savoir qui a lu un courrier postal et qui ne l'as pas lu. A mon sens, il ne faut pas mettre en concurrence ces deux médias : pour vendre une Maserati il vaut mieux faire un mailing très luxueux (comme un livre qu'un de mes amis a reçu et qui est magnifique). Pour créer du trafic sur un site de voyage (au hasard), l'e-mail reste bien entendu plus adapté et performant.

En juin dernier, vous avez lancé le baromètre de l'e-mailing. Pensez-vous bientôt publier une deuxième édition ?
Oui. Et nous travaillons sur un autre baromètre concernant le blacklistage "abusif" des e-mails envoyés aux FAI et webmails.

On estime que le spam sera complètement résolu d'ici trois ans, y croyez-vous ?
Je ne sais pas. Mais il y a plusieurs pistes de réflexions aux Etats-Unis comme le timbre e-mail par exemple...

Quel est le coût moyen d'un e-mail ?
Entre 0.20 et 0.30 € pour une adresse.

Quels conseils pouvez-vous donner aux sociétés d'e-mailing qui souhaitent appliquer les nouvelles dispositions législatives de la LEN ?
D'adhérer au SNCD. Nous travaillons en effet sur des documents très opérationnels pour expliciter ce que la loi va changer.

Lorsque que vous recevez des mails publicitaires, les lisez-vous ?
Généralement oui, mais je ne suis pas forcément représentatif de l'internaute moyen...

Quelle est votre position sur les bases contacts qui se constituent, se louent et se vendent sur le Net ?
Pouvez vous préciser votre question ?

Quelle différence y a-t-il en terme de taux d'ouverture entre un mail marketing et un courrier papier ?
Si le taux d'un e-mail marketing est facile à calculer (les bons routeurs le font), il est plus difficile de calculer le taux d'ouverture dans le papier (on ne peut pas savoir ce que font les gens dans ce domaine...). C'est donc difficilement comparable.

Comment s'assurer de la qualité d'une base de contacts ?
Voilà une bonne question ! Il y a plusieurs critères : comment et par qui elle a été collectée ? Est-ce que les personnes qui sont dans cette base ont donné leur consentement pour y figurer ? Il y a des critères techniques : l'âge des adresses, sont-elles nettoyées, dédupliquées etc. Ensuite, il y a la façon dont ces contacts sont exploités (souvent/pas souvent), possibilité de se désabonner... La meilleure façon d'avoir une idée, c'est donc de tester la base et d'analyser les résultats.

Je précise : ne trouvez-vous pas opaque le marché du trading sur les bases ?
Non. Il y a bien quelques acteurs qui ne sont pas recommandables mais la très grande majorité des courtiers font bien leur travail. En tout cas, tous ceux qui font partie du SNCD sont des références dans ce domaine.

Quelles sont les solutions pour éviter d'être blacklisté abusivement ?
C'est un sujet assez technique. Globalement, l'idée c'est d'avoir une base de bonne qualité c'est-à-dire une base qui pour le FAI qui blackliste a un très faible taux de NPAI (bounces).

Qui sont les plus gros clients du marketing en ligne en France ?
Aujourd'hui tous les secteurs font du marketing en ligne : les Telcos, FAI, services en ligne, VPCistes...

Un annonceur ou une agence a-t-il le droit d'adhérer au SNCD ?
Il a le droit et le devoir.

La pub par SMS a-t-elle de l'avenir ?
Sûrement, si elle est gérée de façon respectueuse.

Les virus, c'est un autre risque pour votre activité ?
Non parce que les campagnes d'e-mails envoyées par les membres du SNCD sont toujours signées. L'expéditeur est donc clairement mis en avant.

Quel est l'avenir de l'e-mailing dans les quelques années qui viennent ?
Incontournable ! L'e-mailing c'est comme l'Internet : cela fait désormais partie de notre vie. Il faut simplement trouver la meilleure façon de l'utiliser dans chaque cas de figure. Et pour cela les professionnels français me semblent avoir une démarche à la fois créative et pérenne. Je suis donc confiant.

Christophe Cousin : Merci beaucoup. A bientôt au SNCD...

[Rédaction, JDNet]
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