Quel est votre parcours professionnel ?
Alain Cadix : Un parcours d'ingénieur qui
s'est vite intéressé au management : enseignant
à l'ESCP, directeur des ressources humaines chez Dassault Aviation, Directeur
de l'école d'ingénieurs ESIEE. Et aujourd'hui directeur général adjoint de
la CCI de Paris, chargé des études et de l'information.
Une récente étude de l'Idate
et de Rexecode montre que la France est en perte de
vitesse sur le marché mondial des TIC depuis 1991.
Comment expliquez-vous cela, et que préconisez-vous ?
C'est une affaire de mentalités comme de niveau d'investissement.
Il faut investir sur la formation et sur la recherche
développement.
Y
a-t-il des secteurs de la nouvelle économie qui sont plus
en forme que d'autres ? Et si oui, lesquels ?
Le téléphone mobile GSM
est en voie de saturation. Les potentialités des croisements
des technologies ? Réseaux, voix sur IP, images,
etc. Nous n'en sommes qu'aux balbutiements des applications
et des possibilités, au moins sur le plan technique. Après
se pose la question des schémas mentaux, des rigidités
organisationnelles, sociales et économiques...
Quels sont les principaux
indicateurs de cette croissance ?
Le taux d'équipement des ménages, des entreprises,
le temps de connexion... Mais attention,
la diffusion de ces technologies n'a pas d'effet mécanique
sur le taux de croissance global de l'économie.
Internet modifie-t-il le management
des entreprises ?
Oui, sûrement. A ce sujet,
voir l'étude parue dans Les Echos du 31 août. Les
modifications principales: une facilité de communication,
la réactivité, les échanges d'informations, mais une prise
de recul amoindrie. Cela va vite, on ne prend plus le
temps de prendre du recul...
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La
CCIP soutient la création d'entreprises
high-tech." |
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Quelles
sont les actions de la CCIP pour aider les créateurs de
la nouvelle économie ?
Une aide à la création
d'entreprise en général, plus des aides spécifiques :
recherche de partenaires, étude de faisabilité du projet,
aide au business plan et, bien sûr, formation. En particulier,
l'école d'ingénieurs ESIEE ou l'école des métiers de l'image
Les Gobelins. Une aide aussi à la recherche de financements.
La CCIP soutient-elle des
projets de start-up Internet ?
Elle n'a pas d'action spécifique
au-delà de ce que j'ai indiqué juste avant. Elle soutient
surtout l'existence d'incubateurs très tournés vers les
nouvelles technologies, surtout Internet.
La nouvelle économie doit-elle s'appuyer sur les anciens
modèles économiques (ou bien les groupes en place
comme CDiscount) pour réussir leur croissance ? Y
a-t-il de nouveaux schémas ?
Le phénomène de la Bulle a remis du plomb
dans les têtes. Rien ne remplacera jamais la valeur ajoutée
"mesurée" par le client potentiel, le retour sur investissement
sur la base d'indicateurs rationnels. Et surtout il ne
faut pas se faire d'illusions.
Quels sont les métiers d'avenir dans Internet ?
Quand on regarde la profusion de l'offre
d'informations, en particulier distribuée par ce canal,
et quand on se met dans la peau d'un patron de PME qui
court après sa trésorerie, ses clients, on voit bien
qu'un besoin d'intermédiation devient de plus en plus
fort. Les métiers tournant autour de l'évaluation de la
qualité de l'information, de l'intermédiation seront des
métiers qui se développeront dans l'avenir. J'ajoute tous
les métiers qui vont naître de l'interpénétration des
technologies encore disjointes aujourd'hui (y compris
venant des matériaux et des sciences du vivant).
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Investir
sur l'industrie de la connaissance, c'est
se donner
un avenir." |
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La France ne pourrait-elle
pas utiliser sa main d'uvre qualifiée et investir plus
en R&D pour se positionner en TIC au même niveau
que les Etats-Unis ou les pays scandinaves ?
Sûrement, mais les TIC n'expliquent que 10 % de la croissance
des Etats-Unis, peut-être moins. Car l'innovation, ce
n'est pas que de la technologie. Le modèle américain,
cependant, me laisse songeur, quand on voit les déficits
abyssaux de leur balance commerciale, difficile de les
prendre pour modèle... Cela étant oui, investir sur
l'industrie de la connaissance, c'est sûrement se donner
un avenir.
Kelkoo s'est fait racheté par Yahoo. N'avez-vous
pas peur que l'Internet français devienne américain ?
C'est un risque réel qui n'est
malheureusement pas spécifique au monde d'Internet.
Des petites sociétés biotech prometteuses se font acheter
par des laboratoires étrangers, dont nord-américains.
Le problème majeur est dû au manque de mobilisation de
l'épargne sur les entreprises et probablement au manque
d'envergure capitalistique des grandes entreprises nationales.
Quel est votre sentiment sur l'entrepreneuriat high-tech
en 2004 ? Est-ce le moment de se relancer après
les claques prises en 2000 ?
Oui, car on ne tombera plus dans les
mêmes illusions. Un des problèmes
rencontrés au moment de la bulle est celui de la dimension
temporelle. On surestime toujours les effets à court
terme d'une technologie (et on sous estime toujours
les effets à long terme). On sait maintenant que la
diffusion des TIC suppose de faire tomber des barrières
culturelles, de faire évoluer des schémas mentaux et
que cela prend du temps. On a donc moins tendance à
spéculer. Une des difficultés à mes yeux, même si nos
amis banquiers la nient, est une certaine faiblesse
des fonds d'amorçage et une certaine frilosité de leur
part, compte tenu de leurs déboires passés... Mais je crois qu'on peut y aller, avec réalisme.
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La
plupart des patrons du CAC 40 sont bien "branchés" |
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Risque-t-on, avec le retour
des valeurs technologiques sur le devant de la scène,
de voir réapparaître une bulle Internet. Ou bien la
situation est-elle plus saine ?
Je crois que les choses ont beaucoup
changé depuis trois ou quatre ans, car en plus de la
bulle, il ya eu des affaires de "mal-gouvernance" qui
ont conduit à un renforcement des outils, des procédures
de management, notamment financier. On avance de façon
beaucoup plus prudente.
Quel est
selon vous le plus high-tech des grands patrons ?
Je ne citerai pas de nom, mais j'observe
la place prise par l'usage des high-tech dans le mode
de travail des patrons d'entreprises internationales qui branchent leurs portables sur réseau dès qu'ils sont
dans leur chambre d'hôtel ou qui s'équipent de Wi-Fi
pour travailler un peu partout. Je considère que la
plupart des patrons du CAC 40 sont bien "branchés".
On parle encore aujourd'hui
de la nouvelle économie comme un secteur à part. Mais
qu'en est-il de l'intégration d'Internet dans les entreprises
industrielles ?
Je ne parle pas pour ma part de nouvelle
économie. Les TIC créent de nouveaux produits et services
et génèrent de nouvelles entreprises. Certes. Mais elles
pénètrent largement dans les entreprises existantes.
99 % des entreprises françaises de plus de vingt
salariés ont de l'informatique, ce qui est déjà bien,
et 96 % ont une connexion Internet. Quand on connaît
la structure du tissu économique français (loin d'être
tout high-tech) on voit bien que la pénétration des
TIC et d'Internet concerne toutes les sociétés et les
fait bouger, plus ou moins, plus ou moins vite, mais
le mouvement est parti.
Quels sont les projets Internet de la CCIP ? Alain
Juillet vous met-il la pression ?
Alain Juillet, "monsieur intelligence
économique" auprès du Premier ministre, a entrepris
une (nouvelle) croisade pour l'intelligence économique,
notamment vers les PME. On ne peut pas parler de "pression"
de sa part, mais il essaye de susciter de nouvelles
initiatives et de les stimuler, voire de les soutenir. En ce qui concerne la CCIP, ce que
nous avons engagé avec notre "stratégie web", les activités
de la cybermédiathèque au profit des PME, le prochain
lancement de la "cyberveille"... Tout cela montre que
nous avons engagé le mouvement il y a plusieurs années
avec l'objectif (une constante pour nous) de faciliter
la vie du patron de PME qui a d'autres choses à faire
que de surfer des heures sur Internet à la recherche
de l'information pertinente.
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Vous-même, êtes-vous un
grand utilisateur d'Internet ? Et si oui, quels
sont vos site préférés ?
J'utilise régulièrement Internet. Pour
des raisons professionnelles (sites juridiques, économiques,
dont le site de la CCIP !, sites technologiques). Pour
des raisons personnelles aussi, étant assez engagé dans
des activités humanitaires en Afrique, le site de l'OMS/WHO
par exemple.
Alain Cadix : Merci à vous tous !
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