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Mihai Crasneanu
PDG
Glowria
Mihai Crasneanu
"Un film devrait idéalement sortir en même temps au cinéma et en vidéo"
Vidéo à la demande, résultats financiers, partenariats stratégiques, budget de communication, opérations marketing, levées de fonds... Le fondateur du site de location de DVD a répondu aux questions des lecteurs du JDN.
(03/03/2005)
 
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 Glowria
 Mihai Crasneanu
Participez-vous aux débats qui animent les FAI et les chaînes de télévision autour de la vidéo à la demande et de la chronologie des médias ?
On participe à certains de ces débats, mais pas à tous, car beaucoup ne nous concernent pas directement. Notre force est le fonds de catalogue, et les discussions portent surtout sur les nouveautés, qui ne sont qu'une partie de notre chiffre d'affaires.

Quelle est selon vous la place de la VoD dans la chronologie des médias ?
Il est normal aujourd'hui de protéger la vidéo, car elle représente 60 % des revenus des studios. Donc commencer avec des nouveautés à trois mois après la vidéo est un bon début. Mais dans l'avenir, l'idéal pour contrer le piratage et satisfaire tous les consommateurs serait d'avoir une simultanéité avec le cinéma, à quelque mois près, et que la vidéo y soit également alignée.

Comment attirer les internautes vers la VoD alors que la même chose existe gratuitement illégalement ?
Immédiateté, qualité, choix, disponibilité, avant tout. Et sans doute aussi, une certaine crainte de la répression.

Avez-vous déjà téléchargé illégalement sur Internet ?
Absolument ! Et je regarde de très près toutes les plateformes de téléchargement illégal car je veux comprendre les comportements et les consommateurs. Tout le monde parle de téléchargement illégal, mais qui a déjà essayé de le faire ? Très peu de personnes. En revanche, je n'en fais pas d'utilisation personnelle. J'adore acheter sur iTunes. L'expérience est excellente.

Le marché de la location de DVD sur Internet ne décolle pas en France. Glowria a-t-il actuellement les moyens de survivre, voire d'investir sur le nouveau eldorado de la VoD ?
La location DVD en ligne en France a été développée par Glowria essentiellement, qui est la seule société à "tracter" ce marché. Nous avons investi plusieurs millions depuis le début de notre activité, et nous doublerons ces investissements à l'avenir.

Est-il indispensable de passer des accords avec les FAI avant de lancer votre offre de VoD ?
Nous lancerons notre offre de VoD d'abord en accès Internet, sur notre site. Les accords FAI nous permettront dans un second temps de proposer l'offre Glowria sur les bouquets de la télévision sur ADSL.

Les FAI n'ont-ils pas plutôt intérêt à lancer leur propre offre de VoD ?
Bien sûr, et ils vont le faire. Ils n'ont pas besoin de Glowria pour discuter avec les cinq ou six majors. Mais Glowria leur apportera les fonds des catalogues des majors, ainsi que les autres catalogues, et une expertise qu'ils n'ont pas sur l'agrégation de contenus et sur le profiling média.

Pourquoi les FAI ne traiteraient-ils pas directement avec les éditeurs ?
Ils le font déjà avec certains. Mais la gestion de tous les éditeurs et des fonds de catalogue requiert des outils et une expertise qu'ils n'ont pas. Et ce n'est pas leur métier de l'avoir. Leur métier est de fournir un accès de qualité, des boîtiers dans les foyers, et un système de facturation. Notre métier est de fournir du service et du contenu à valeur ajoutée.

Nous vendrons des films en VoD avant l'été."
A quand une offre de VoD chez Glowria ? A quels tarifs ?
Probablement avant l'été, avec des tarifs allant de 3 à 5 euros par oeuvre, en fonction de la date de sortie et du format (film, documentaire, série).

Comment justifiez-vous un tel prix pour la VoD (plus cher que le DVD) ?
Ce sont les tarifs qui sont pratiqués aujourd'hui dans le monde, et qui sont proches du prix d'une location en vidéo-club. La diminution des coûts de la bande passante et des royalties à verser à Microsoft pour les DRM pourra certainement faire baisser les prix. Nous ferons tous les efforts possibles dans ce sens.

De quel ordre seront les temps d'attente pour télécharger les films ?
Tout dépendra du débit de l'utilisateur et de la qualité de sa ligne, mais pour des oeuvres en streaming, le film démarrera immédiatement. Pour ceux qui seront en téléchargement, entre 30 minutes et 2 heures.

Quelle sera votre stratégie commerciale pour la VoD, face à l'arrivée en Europe de concurrents comme Movielink ?
La VoD, comme la location en ligne, est une activité où le catalogue doit être très vaste avec beaucoup de variétés. Nous sommes aujourd'hui le plus gros aggrégateur de contenus vidéo en France avec plus de 70 accords éditeurs. Donc notre force est le catalogue, et l'expertise des abonnés médias "franco-français".

Si vous lancez un jour une offre de VoD, quel intérêt pour vous de continuer la location en ligne de DVD ?
Fin 2005, 80 % des foyers français seront équipés d'un lecteur de DVD. En même temps, combien de foyers auront les débits et les équipements suffisants pour la VoD ? Le DVD est encore là pour rester au moins 5 à 10 ans, en attendant que la VoD s'installe.

Quel partenaire technique avez-vous retenu pour la VoD ?
Nous faisons beaucoup de choses en interne. Mais nous avons confié le stockage, les DRM et la diffusion à iPercast.

Quels sont vos principaux concurrents sur le marché de la VoD ?
Je pense que tout le monde sera concurrent sur ce marché : les chaînes de télé, les bouquets satellite, les FAI, les éditeurs de logiciels (tels Apple ou Microsoft) et sans doute d'autres qu'on n'imagine pas encore. Le marché est en train de se composer, et chacun finira par trouver sa place et son offre.

Nous pensons multiplier par 5 notre chiffre d'affaires en 2005."
Quel est le chiffre d'affaires réalisé par Glowria en 2004 ? Quels sont ses objectifs pour 2005 ?
2004 a été notre première année d'exploitation complète, et en janvier 2005 nous avons réalisé dix fois notre chiffre d'affaires de janvier 2004. En 2005 nous tablons sur une croissance de 5 fois notre chiffre de 2004.

Glowria est-il rentable ? Si non, quand envisage-t-il de l'être ?
Comme je l'évoquais, Glowria pourrait être rentable dès maintenant. Compte tenu des investissements que nous allons réaliser, nous envisageons d'atteindre la rentabilité courant 2006.

Comment évolue votre part de marché ?
Nous estimons aujourd'hui à 60 % notre part de marché sur la location de DVD en ligne.

Face à Cinesnap, qui est le partenaire d'Allociné, envisagez-vous le même type de partenariat avec Commeaucinema ?
Pourquoi pas. Je suis ouvert à tout partenariat éventuel. Allociné a toutefois une cible plutôt jeune et très consommatrice de cinéma, alors que notre cible est plus âgée et va peu au cinéma.

Quel est la part de votre chiffre d'affaires aujourd'hui généré par France Loisirs ?
Notre partenariat avec France Loisirs a commencé en septembre, octobre 2004. Il est encore trop tôt pour faire un bilan. Mais les premiers résultats sont très bons !

Avez-vous des projets de partenariat avec des sites de commerce électronique ?
Nous y sommes très ouverts, bien que nous n'ayons pas été très pro-actifs jusqu'à présent.

Envisagez-vous de proposer à vos membres des tarifs préférentiels sur la vente de DVD ?
C'est un sujet que nous étudions actuellement, à la fois pour des DVD neufs et pour des DVD d'occasion. C'est une activité que nous ne connaissons pas, et je suis curieux de voir comment nos abonnés et les internautes en général vont réagir.

Comment vous situez-vous par rapport à Musicandfilm ? Que pensez-vous de leur croissance de ces derniers mois ?
Nous n'avons pas de contacts particuliers avec eux. Leur métier est la vente de DVD, qui est très complémentaire à notre activité. Les études démontrent toutefois que le nombre de DVD achetés par foyer équipé de lecteur DVD a tendance à diminuer avec le temps...

Que dire de Netflix Europe ?
Netflix a pour le moment annulé ses plans pour l'Europe.

Nous avons investi près de 2 millions d'euros en communication online depuis nos débuts."
Avez-vous été approché par Netflix pour un éventuel rachat ?
J'ai toujours eu des contacts avec Netflix, mais le marché ne se prête pas aujourd'hui à ce type de discussions. Pour Glowria l'aventure ne fait que commencer : il est trop tôt pour ce type de discussions, même si nous sommes approchés de temps en temps par différents groupes français ou internationaux.

Quelle est votre stratégie marketing (affiliation, liens sponsorisés, offline...) ?
Tout ce que vous venez de mentionner, plus beaucoup de partenariats, comme celui avec France Loisirs. Cette année nous serons plus agressifs, notamment sur le offline, pour éduquer le marché à la location en ligne et sensibiliser les français à ce mode de consommation.

A combien s'élève votre budget de communication annuel ? Comment l'utilisez-vous ?
Depuis les débuts de Glowria, nous avons investi près de deux millions d'euros, essentiellement en ligne.

Glowria a la réputation d'être un gros "cash-burner". Comment comptez-vous séduire de nouveaux investisseurs ?
Glowria pourrait être à l'équilibre dans deux mois mois s'il le souhaitait. Nous avons décidé, avec nos actionnaires et nos investisseurs, d'intensifier notre croissance en continuant à investir. L'expérience de tous les leaders de ce domaine en Europe (UK, Allemagne) et aux Etats-Unis, montre qu'on a dépensé moins de la moitié qu'eux pour des résultats meilleurs.

A quoi vous servirez une nouvelle levée de fonds ?
1. développer la VoD, 2. devenir l'acteur incontournable en France de la location en ligne, 3. se développer en Europe.

Quelle est, selon vous, la clé de la réussite sur ce marché ? Le marketing, la logistique ou l'offre ?
Un catalogue riche et disponible (d'ou nos accords avec les éditeurs, uniques en Europe), une plateforme industrielle (logistique, technologie, service client) et bien sur une offre attrayante et un marketing avec un message très clair pour "évangéliser" le marché.

Glowria, et ses concurrents, dépend beaucoup de La Poste. Envisagez-vous des solutions "privés" de livraison ?
En dehors de La Poste, aucune société ne sait livrer la France entière en 24 heures, à ces tarifs. Nous travaillons beaucoup avec La Poste, et la qualité du service s'est considérablement améliorée au cours des 6 derniers mois.

Nous comptons 17.000 abonnés actifs"
Quelle part de votre chiffre d'affaires est générée par les nouveautés ?
Environ 20 % à 30 %.

Pourquoi ne faites-vous pas de hard alors que c'est une vache à lait pour vos concurrents ?
Nous sommes un service grand public et nous nous adressons à un marché de masse. 90 % de nos abonnés sont des familles avec un à trois enfants. Vous imaginez des DVD "hard" arriver dans la boite aux lettres et que les enfants les ouvrent ? Le fait de ne pas proposer de "X" rassure énormément nos abonnés, qui laissent leurs enfants aller librement sur le site.

Vous avez récemment augmenté vos tarifs. Pourquoi une telle décision ?
Nos tarifs étaient entre 50 % et 70 % moins chers que ceux de la concurrence. Or, nous offrons le plus grand catalogue, la meilleure disponibilité avec plus de 200.000 DVD en stock, et un service client irréprochable. Etre le moins cher n'avait pas de sens. Nous avons augmenté nos prix pour offrir un service encore meilleur mais nous restons encore les moins chers.

Pourquoi ne pas proposer le paiement à l'unité en plus de l'abonnement ? L'abonnement permet d'offrir la souplesse de ne pas avoir à rendre ses DVD à une date fixe, ce qui ne serait pas possible avec le paiement à l'acte. Nous envisageons toutefois de faire des tests ciblés dans le courant de l'année.

Pourquoi ne pas proposer plutôt des DVD jetables au lieu de nous obliger à les renvoyer ?
La technologie n'est pas du tout fiable, et le catalogue très restreint (moins de 100 titres). L'expérience américaine menée par Disney a été un échec, et j'ai l'impression que celle menée par CDiscount n'a pas été un succès non plus.

Le délai de la réception pour un DVD loué via Internet n'est-il pas un frein ? Le service est utilisé par quel volume de clients environs ?
Nous avons aujourd'hui 17.000 abonnés actifs qui paient leur abonnement tous les mois. Un échange de DVD a lieu en général en trois jours (80 % des cas), ce qui est très rapide. Et pendant l'échange, il vous reste encore des DVD à regarder chez vous.

Combien avez-vous de DVD en catalogue ?
Nous avons 6.000 titres en catalogue, tous disponibles, et qui n'incluent pas de films classés "X".

Comptez-vous développer votre offre de DVD ? De quelle manière ?
Nous dédions beaucoup de ressources (argent et personnel) pour rencontrer tous les éditeurs et ayant-droits et intégrer le plus de titres possibles à notre catalogue. Nous avons aussi une approche similaire avec des détenteurs de contenus à l'étranger. C'est essentiel pour nous d'offrir le catalogue le plus riche possible, qui couvre jusqu'aux niches.

Nous allons lancer une offre de téléchargement de jeux vidéo"
Quelle est la répartition de la demande pour les documentaires et pour le cinéma ?
Je n'ai pas les chiffres en tête pour les documentaires (de l'ordre de 5 % à 10 % de mémoire), mais le hors-film (documentaire, séries, spectacles, etc.) représente 25 % à 30 % des oeuvres louées.

Sur votre site, on ne trouve que 300 documentaires sur un catalogue de plus de 6.000 titres. Pourquoi ? Pas assez de demande ?
Surtout pas assez d'offres. Si un éditeur souhaite intégrer ses documentaires sur Glowria, nous l'accueillerons les bras ouverts !

A quand une offre de DVD indiens, chinois et japonais sur Glowria ? Les acteurs du cinéma indiens sont tous représentés à Londres...
Absolument ! Mais il est difficile de gérer l'importation et l'adaptation en français de ces contenus. Mais c'est un projet qui me passionne et auquel je crois beaucoup.

Avec le progrès des téléphones actuels, envisagez-vous un jour de proposer des films à regarder sur smartphone ou PDA ?
C'est effectivement dans nos plans. Notre idée est de permettre à tout un chacun de regarder l'oeuvre qu'il veut, au moment, dans le format et sur l'appareil qu'il souhaite. C'est une discussion à avoir avec les opérateurs mobiles, que nous n'avons pas encore commencé.

Après la location de DVD, allez-vous diversifier votre offre (CD, jeux vidéo...) ?
Nous allons lancer très prochainement le téléchargement de jeux vidéo. Si ce service rencontre du succès, nous étudierons la location de jeux vidéo sur support physique pour consoles. Ceci fait partie de notre stratégie de fournir du divertissement à domicile et à la demande.

Pourquoi Glowria est si mal référencé sur les moteurs de recherche, notamment sur Google ?
Nous sommes arrivés sur le marché après d'autres sociétés. Nous avions alors plusieurs sites : un pour le grand public, un pour le recrutement, et un réservé aux abonnés. Depuis quelques semaines nous avons un site unique. Notre référencement va donc s'améliorer d'autant.

Combien de personnes aujourd'hui chez Glowria ? Il semblerait que le turn-over soit important...
Nous sommes environ quarante personnes aujourd'hui, dont près de la moitié en logistique. Le turn-over est naturel pour une société qui a une croissance exponentielle. Certains profils ne parviennent pas à s'adapter à plus de rigueur ou à une séparation plus marquée des responsabilités. C'est un phénomène naturel.

Quels sont vos perspectives de recrutement ? Pour quels types de postes ?
Marketing, technologie, opérations logistiques.

La moitié du personnel travaille à la logistique."
Quels sont les gros chantiers de Glowria en 2005 ?
La VoD, l'accélération de la croissance de l'activité DVD, et les innovations dans les services.

Quelle utilisation faites-vous de votre blog ? Pourquoi ne pas lancer un blog pour la communication externe de Glowria ?
Mon blog est personnel, et j'essaie de le déconnecter de l'activité de Glowria, même si c'est difficile quand on y passe autant de temps. Je rêve de lancer un blog pour la communication externe de Glowria ! C'est juste une question de temps, mais je suis sûr que nous y viendrons.

Comment vous est venue l'idée de créer Glowria ? D'ou vient ce nom ?
Glowria... La Gloria de Cassavetts, le W de Rowlands, un nom féminin (ces dames nous gouvernent), et puis "Glow", qui en anglais veut dire lumineux, brillant. C'est ce qu'on veut offrir à nos clients. C'est un vrai nom de marque qui se retient et qui n'est pas limité à une activité (DVD) ou à un genre (Film).

Quel est votre parcours ?
En quelques mots, je suis né en Roumanie, et réfugié politique en France à l'âge de 13 ans (à l'époque de Ceausescu). J'ai fait des études d'ingénieur en informatique à Paris. J'ai été consultant chez Intel Europe, puis chez BNP en Uruguay et en Argentine. J'ai lancé ma première société en Argentine en 1997 dans le secteur du Webmail, avant de devenir le vice-président du plus grand groupe Internet brésilien que j'ai lancé dans cinq pays d'Amérique latine, aux Etats-Unis et en Espagne. Là, j'ai appris les médias, le métier d'abonnement et à gérer l'hyper-croissance. Vous avez plus de détails sur mon blog si vous le souhaitez.

Quel est votre salaire ?
Environ 90.000 euros bruts, depuis peu.

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 Glowria
 Mihai Crasneanu
Quel est votre film préféré ?
Mort à Venise de Visconti. Et c'est le film qui m'a décidé à créer Glowria, car je ne le trouvais nulle part !

Mihai Crasneanu : Merci à tous pour vos questions. Vous pouvez me retrouver aussi sur mon blog perso (Glowria.typepad.com/mihai). A bientôt !
 
 
Propos recueillis par Rédaction JDN

PARCOURS
 
 
Mihai Crasneanu, 33 ans, est le fondateur et l'actuel PDG du site de location de DVD Glowria.

De 1999 à 2001, il est le vice-président, en charge du développement international, du marketing et des ventes, des groupes de médias brésiliens Folha et Abril.

En 1997, Mihai Crasneanu lance et dirige l'éditeur argentin de la messagerie en ligne Mcc One.

En 1995, il participe au développement de l'Intranet mondial de la BNP depuis l'Uruguay et l'Argentine.

Et aussi Mihai Crasneanu est ingénieur, diplômé de l'Efrei à Paris.

   
 
 
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