Qui n'a jamais croisé cette fameuse fougère,
exemple de choix lorsque l'on souhaite évoquer la construction
d'une image fractale ?
Si compresser les données n'est pas un besoin récent,
l'utilisation des méthodes de compression a changé.
Il y a quelques années de cela, il était encore courant
de compresser à tout va, afin de gagner quelques précieux
kilos-octets sur sa disquette 1.44 Mo. C'était l'époque
ou le dernier disque dur affichait fièrement ses 80 Mo de
capacité de stockage.
Aujourd'hui, même si notre besoin en stockage augmente (utilisation
d'appareils photos numériques, de fichiers musicaux, etc.),
les disques durs suivent le rythme et offrent un coût au giga
abordable. Peu importe à ce moment là qu'une image
issue de vos dernières vacances occupe sur le disque 30 Ko
ou 2 Mo... du moment qu'elle rappelle de bons souvenirs.
Il en va tout autrement sur les réseaux, là où
la transmission d'informations n'est pas aussi rapide qu'entre un
lecteur de CD-ROM vers un disque dur, où d'un port USB vers
ce même disque. Les sites web ont besoin d'afficher un maximum
d'informations, tout en nécessitant pour l'internaute le
moins de téléchargement possible. Ici, ce ne sont
pas pas les textes des pages web qui sont incriminés, mais
bien les images, qui représentent souvent la partie la plus
"lourde" d'un site.
Avant d'approfondir les principes mêmes de la compression
fractale, remontons à l'origine de cette technique, vers
la fin des années 70.
L'origine de cette technique
Benoît
Mandelbrot est considéré (Escher
Maurits est aussi cité) comme étant à l'origine
des fractales. Mandelbrot porta cette technique au rang d'une discipline
mathématique : "la géométrie fractale".
Du latin "fractus" (brisé), "fractale"
est un terme inventé par ce mathématicien français
("The Fractal Geometry of Nature", 1977) pour désigner
des objets dit "irréguliers" se distinguant des
figures classiques telles que la droite, le cercle...
Plus tard, en 1988, un autre mathématicien, Michael F. Barnsley
montra qu'on pouvait stocker des images avec peu de données
grâce à une approximation de photographies numérisées
à l'aide de fractales. Il évoque les fractales IFS
("Iterated Function Systems") dans un livre qui fit sensation
cette année là : "Fractals Everywhere".
Selon lui, toute image peut être représentée
par un ensemble de ces "IFS". Il aboutit au "Collage
Theorem" qui stipule à quoi doit ressembler un "IFS"
afin de représenter une image.
Si le système "IFS" est capable de générer
des images, peut-être est-il aussi capable de les compresser
? Barnsley décide de poursuivre dans cette voie et fonde
la société "Iterated Systems Incorporated",
qui détient aujourd'hui les brevets des fichiers ".FIF",
le format des images compressées par la technologie fractale.
Malheureusement pour Barnsley qui pensait avoir résolu le
problème de la compression, sa solution était très
lente et non automatisée. En 1992, un de ses élèves,
Arnaud Jacquin, automatise la procédure. Son algorithme est
encore utilisé aujourd'hui pour la compression fractale.
Le principe de l'algorithme de compression
Contrairement aux autres techniques de compression habituelles,
la compression fractale ne tente pas de réduire le nombre
de couleurs (format gif) ou de compresser de manière classique
les octets composant l'image. Le principe est ici de remplacer l'image
par des formules mathématiques.
La compression fractale a pour principe qu'une image n'est qu'un
ensemble de motifs identiques en nombre limité, auxquels
on applique des transformations géométriques
(rotations, symétries, agrandissements, réductions).
Evidemment, plus l'image possède cette propriété,
meilleur sera le résultat !
Comme pour le format JPEG,
l'image est découpée en blocs de pixel, mais ils sont
ici de tailles variables. Il faut ensuite détecter
les redondances entre ces blocs à diverses résolutions.
On parle de transformations fractales basées sur un opérateur
contractant. Ces transformations décrivent l'image de plus
en plus finement. A la fin de ce processus, on ne stocke pas le
contenu d'un bloc autant de fois qu'il a été "vu"
dans l'image mais seulement les équations mathématiques
permettant de représenter le contenu de ces carrés.
Au final on obtient une structure présentant des caractéristiques
similaires à des échelles différentes. Pour
retrouver l'image il suffira de décrire les transformations
qui ont été appliquées aux blocs initiaux.
Ce processus rend la compression indépendante de la
taille de l'image. De plus, l'image produite est vectorisée
et ne subit pas les effets de la pixelisation, contrairement au
JPEG. Ce phénomène est surtout visible lors d'un zoom
par exemple, l'image fractale peut devenir floue mais ne pixelise
pas. Ceci est dû au fait que lors de l'agrandissement, ce
ne sont pas les pixels qui sont élargis, mais toute l'image
qui est recalculée mathématiquement.
Le problème lié à cette technique est la lenteur
du procédé de compression, de l'ordre de 50 fois plus
lent que pour une image JPEG. La décompression quant
à elle est aussi rapide que pour les autres formats.
Un peu de détente : galeries, liens et
exemples d'images
Voyons un peu à quoi ces images ressemblent. Le format ".FIF"
n'est pas reconnu par vos navigateurs : il existe un certain flou
au niveau de sa standardisation. Il faut donc télécharger
un "viewer" adapté. Une fois installé, profitez
de ces
magnifiques paysages.
Moins puissante que les ondelettes
(fichiers ".wi") mais supérieure au JPEG (à
partir de 40:1), la compression par fractale constitue une solution
intermédiaire, comme le montre cette
comparaison, en images, de ces trois formats.
Pour beaucoup, les fractales ne sont pas seulement un moyen de
compresser des images, mais aussi un moyen d'expression, un art
capable de générer des paysages improbables ou de
magnifiques
tableaux.
Si vous souhaitez en savoir plus, vous pouvez consulter cette
bonne introduction, en anglais, sur cette technique de compression.
Enfin, pour réveiller la fibre artistique qui sommeille
peut-être en vous, voici un dernier lien qui recense plusieurs
outils qui vous permettront de créer vos propres fractales.
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