Journal
du Net > Net
20 > Net 20 2000 > Philippe Payan
|
Philippe
Payan
(PDG de NetCrawling)
Net-stakhanoviste
|
D'abord
Lokace, puis
Caramail, puis NetCrawling, en attendant la suite...
Ce Centralien, aujourd'hui à la tête du
leader
français de la pige publicitaire en ligne, a
la création d'entreprise chevillée au
corps.
|
Toutes
les belles réussites sont nées de gens qui ont bossé comme
des tarés, le plus souvent sans un rond!" L'auteur de la sentence
est un expert : en quelques années, il a participé à la création
de plusieurs vedettes du Web français : le moteur de recherche
Lokace, le service de mail gratuit Caramail et le service
de pige publicitaire en ligne NetCrawling, devenu leader sur
le marché français avec son outil LemonAd.
Internaute de la première heure, Philippe Payan fait aujourd'hui
figure de vétéran dans le milieu, malgré ses 36 ans. A ses
yeux, les créations d'entreprises sont avant tout le fait
de rencontres et d'aventures collectives.
La plus
récente, NetCrawling, auparavant plongée dans l'univers bouillonnant
des start-up du Sentier, vient de traverser la Seine pour
se réfugier à Saint-Germain-des-Près. La société a pris possession
d'un ancien magasin du quartier, transformé en un espace de
bureau vaste et lumineux. Déménagement oblige, c'est dans
la cuisine, provisoirement reconvertie en salle de réunion
en attendant que soient achevés les travaux de la "vraie"
salle, que Philippe Payan retrace les grandes lignes de son
aventure sur le Web.
"Avec
NetCrawling, j'avais le sentiment de travailler sur un
projet Internet de deuxième génération, qui répondait
aux besoins du marché naissant de la publicité en ligne." |
Sorti de Centrale
Paris en 1987, il a d'abord créé avec Thierry Lunati une société
dans le secteur de la formation informatique, ForLog. Deux
ans plus tard, en 1989, ils sont rejoints par Marc Reeb tout
droit sorti de l'ESCP. Mais ce n'est qu'en 1995 qu'ils investissent
l'Internet, en s'essayant au métier de fournisseur d'accès.
Pour l'occasion, la bande de copains s'est enrichie d'Orianne
Garcia et Alexandre Ross, rencontré à Centrale. Ce projet-là,
baptisé Internet +, est de courte durée. "Nous avons vite
compris que ce n'était notre boulot et nous avons laissé le
marché à France Télécom", explique avec humour Philippe Payan.
L'équipe rebondit
rapidement, puisqu'elle lance début 1996 Lokace. Une trouvaille
marketing (à l'époque, les moteurs de recherche sont encore
rares sur le marché français) et technologique (Lokace repose
sur un algorithme révolutionnaire, créé par Thierry Lunati,
qui permet de faire fonctionner le site avec un simple serveur
à 20.000 francs). Insatiables, les cinq partenaires n'attendent
même pas la fin de l'année pour ouvrir Caramail. Le succès
du service de mails gratuits, le premier de son genre en France,
est instantané. L'audience explose, le trafic aussi, et la
société doit se structurer plus vite que prévu. Pour faire
face, Philippe Payan remplit une nouvelle fonction dans l'équipe
en devenant directeur administratif et financier. Une expérience
dont il garde un souvenir mitigé : "Ce n'est pas ma tasse
de thé, même si j'ai appris beaucoup de choses."
Pour financer
le développement de ses entreprises, Philippe Payan s'est
toujours efforcé de rester raisonnable. "Nous avons commencé
avec peu de moyens, alors on a vraiment pris l'habitude de
maîtriser les coûts." Mais le développement du trafic généré
par Caramail est tel qu'il faut vite en repenser l'architecture
technique. Reste à trouver les moyens. La solution passe par
la vente de Lokace (racheté par Infonie en décembre 1998 pour
8 millions de francs environ). Le produit de la transaction
sera utilisé pour financer le développement de Caramail.
Toujours
en avance d'un projet, Philippe Payan commence à travailler
dès l'été 1999 sur le projet NetCrawling. L'idée de départ
était de proposer, sur le marché naissant de la communication
en ligne, un outil de pige publicitaire à l'instar de ceux
utilisés dans les médias traditionnels. Il s'appellera Lemonad.
Créer une entreprise est un exercice auquel Philippe Payan
est déjà rompu, même si cette fois, l'approche est sensiblement
différente. "J'avais alors le sentiment de travailler sur
un projet Internet de deuxième génération, qui répondait aux
besoins du marché naissant de la publicité en ligne", se souvient-il.
NetCrawling
est déjà présent dans huit pays,
ce qui ne l'empêche pas de réfléchir à la prochaine étape
: il travaille déjà sur un autre projet avec Marc Reeb. |
Mais son
emploi du temps devient un vrai casse-tête. En septembre 1999,
Philippe Payan cumule la direction de Forlog, son poste de
DAF pour Caramail et s'apprête à lancer NetCrawling. Stakhanoviste
mais réaliste, il engage un directeur général auquel il confie
la gestion de ForLog. Et si NetCrawling démarre officiellement
en janvier 2000, les fondateurs de Caramail cèdent la société
à Spray le 31 décembre 1999 (l'information ne sera connue
qu'au mois de février). "Il s'agissait d'une opportunité,
ils ont fait leur offre au bon moment", ava,ce Philippe Payan.
L'équipe
originelle éclate. Tandis qu'Alexandre Ross et Orianne Garcia
intègrent le groupe Spray, Marc Reeb et Philippe Payan se
consacrent pleinement au développement de NetCrawling. Fin
janvier, ils décident de recruter des managers du secteur
de la publicité traditionnelle afin de développer la commercialisation
de LemonAd et de crédibiliser l'offre sur le marché. Aline
Carpentier et Valérie Dupont rejoignent ainsi NetCrawling,
respectivement comme directrice et directrice générale adjointe.
"Je suis également allé chercher Mohamed Ramzi, un ancien
ami de promotion pour assurer la direction informatique. C'est
quelqu'un de très brillant, il est mille fois meilleur que
moi en informatique."
Philippe
Payan sait qu'il ne doit pas perdre de temps. "Nous savions
que le marché avait besoin d'un outil de pige mais nous savions
également que la nature a horreur du vide, affirme-t-il. Notre
challenge a donc été de le combler au plus vite." Le succès
a été rapide sur le marché français (qui compte déjà plus
de 70 clients) et le développement international de Lemonad
est aujourd'hui un axe important du développement de NetCrawling.
La société est déjà présente en Grande-Bretagne, Allemagne,
Italie, Espagne, Belgique et aux Pays-Bas. "Un de nos secrets
est de travailler dès le début à partir d'études de marché",
d'où un positionnement tarifaire particulièrement compétitif
de LemonAd. "J'avais d'abord pensé que nous revendrions à
terme notre outil à un groupe. Mais le succès commercial est
tel que nous préférons aller jusqu'au bout et croître seuls."
Ce qui
n'empêche pas Philippe Payan de réfléchir à la prochaine étape.
"Je travaille déjà sur un autre projet avec Marc Reeb", lâche-t-il,
sans s'apesantir. Qu'est-ce qui le fait courir ainsi ? "Pas
l'argent en tout cas, assure-t-il, ça n'a jamais été le but.
Au début de l'année 2000, j'ai regardé avec un certain amusement
certains péter les plombs. Et beaucoup de gens sont venus
nous voir après la cession de Caramail, mais je ne me sens
pas une âme de business angel." Son principal objectif est
de créer et d'avancer, même si son tempo professionnel a obligé
ce joueur de batterie de renoncer à son groupe de rock, faute
de temps libre. Il se contente d'imposer ses goûts musicaux
(AC/DC ou Nina Hagen
) à ses proches collaborateurs. "Mais
c'est comme les affreuses charentaises qu'il cache sous son
bureau, on lui pardonne", commente Aline Carpentier. A la
ville, Philippe Payan est le père d'un petit garçon. "Je tiens
à lui consacrer le maximum de temps", affirme-t-il. Il lui
en reste donc un peu...
[Fabien
Claire, JDNet]
|
|