Le Net
Internet en campagne : 1. Un média de propagande (presque) comme les autres
 (Mercredi 23 janvier 2002)
         

Par Benoît Tabaka,
du cabinet d'avocats Landwell & Partners.
NB : cet article a fait l'objet
d'une première publication sur Juriscom.net

A l'approche des élections législatives et présidentielles du printemps 2002, les candidats ont besoin d'appréhender l'ensemble des limites posées par le droit électoral en matière, par exemple, de plafonnement du montant de leurs dépenses électorales ou du déroulement du scrutin. L'intervention de ces dispositions a lieu, systématiquement, sous le strict contrôle du juge des élections, qu'il soit juge administratif ou juge constitutionnel [1].

Depuis la fin des années 1990 et le début de l'année 2000, un nouveau mode de communication est entré dans les mœurs, permettant de toucher le citoyen français - et en conséquence, l'électeur - directement à son domicile voire sur son lieu de travail. Ce système, connu de tous, porte un nom angélique : Internet. La nouvelle dimension offerte par le réseau mondial a vite séduit les candidats. Organiser une communication électorale au niveau international et au moindre coût a fait tourner bien des têtes.

Seulement, les élections municipales et cantonales de mars 2001 n'ont pas connu le grand rush technologique tant attendu. En effet, le flou juridique et l'absence de véritable connaissance du réseau par les politiques ont conduit ces derniers à un usage parcimonieux voire méfiant du PIF [2] . Tel ne sera pas le cas des prochaines élections présidentielles et législatives, où les moyens financiers permettront de déployer des moyens de communication électorale sans commune mesure avec ceux utilisés lors du renouvellement des conseils municipaux et généraux.

Dans tous les cas, un principe pré-existe à cette arrivée massive de la classe politique aux nouvelles technologies : Internet est saisi par le droit électoral. Dans un jugement du Tribunal administratif de Toulouse en date du 25 septembre 2001 (Mme Monique Herment c/ Préfet de l'Aveyron ; n° 01/1141) [3], le juge a analysé en détail l'application des principes posés par le Code électoral à l'utilisation, par un candidat - en l'espèce aux élections municipales -, d'un site Internet, outil de propagande électorale. Le juge tente d'aborder sous plusieurs aspects cet usage et notamment vérifie l'adéquation de la pratique avec les règles impératives relative aux moyens de communication audiovisuelle ou à la télématique.

Internet n'est pas un nouveau mode de communication

Nous l'avons dit, Internet est saisi par le droit électoral. Le Premier ministre, dans une réponse adressée à un parlementaire le 28 mai 2001 [4], l'a réaffirmé : "du fait du développement rapide de l'utilisation des sites ouverts sur le réseau Internet en matière d'élections politiques, le ministère de l'Intérieur a fait savoir à plusieurs reprises qu'était applicable la législation générale, laquelle ne distingue pas nécessairement les types de supports de communication utilisés". Internet n'est pas, aux yeux du gouvernement, un nouveau mode de communication totalement différent des outils de propagande électorale. En effet, Internet n'est juste qu'un support différent de diffusion d'une information.

L'universalité de ce média est susceptible de créer une confusion, celle d'en faire un monde à part. Or, en matière électorale, les pages créées par un candidat ne sont ni plus, ni moins qu'une reproduction sous un format multimédia et interactif des éléments contenus dans les diverses professions de foi. La principale différence réside dans l'accessibilité de ces documents : au lieu d'être disponible sur les marchés moyennant une poignée de mains, le discours électoral l'est au travers des réseaux de télécommunication, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.

Les sites sont assimilés à des moyens de communication audiovisuelle

En raison de la présence au sein du Code électoral de règles spécifiques à l'utilisation des moyens audiovisuels, la première question qui s'est posée est l'assimilation de pages Web à un tel mode de communication. La réponse est apportée implicitement par la loi du 1er août 2000, relative à la liberté de communication. Cette stipulation législative assimile les sites à des moyens de communication et, plus particulièrement, à des moyens de communication audiovisuelle en raison de l'intégration des dispositions relatives à la responsabilité des hébergeurs de pages Web au sein de la loi de 1986 relative à la communication et, en appliquant aux sites Internet l'article 93-2 de la loi de 1982 sur la communication audiovisuelle, prescrivant la désignation d'un responsable de la rédaction.

Cette interprétation a été confirmée timidement par le ministre de l'Intérieur [5] : "Ni les textes ni la jurisprudence électorale ne permettent d'affirmer avec certitude que ce support devrait être considéré comme un moyen de communication audiovisuelle. Comme il s'agit néanmoins de l'hypothèse la plus probable", le ministre a recommandé aux candidats de prendre, en conséquence, toutes les diligences appropriées. C'est donc naturellement que le juge administratif a fait application aux sites Internet des obligations posées par le Code électoral notamment en matière d'utilisation de moyens de communication audiovisuelle.

Demain Internet en campagne : 2. Où s'arrête la communication, où commence la publicité ?

Notes :
[1]
Deux ordres juridictionnels sont compétents en matière de contentieux électoral. Il s'agit d'une part de la juridiction administrative (Conseil d'Etat, tribunaux administratifs) qui est le juge de droit commun pour les élections municipales, cantonales, régionales et européennes. La Constitution, quant à elle, a donné compétence au Conseil constitutionnel - agissant alors en tant que juge ordinaire - pour connaître des litiges relatifs aux élections parlementaires (Assemblée nationale et Sénat) et présidentielles.
[2] Par similitude avec le PAF (paysage audiovisuel français), le PIF (Paysage Internet français) se répand.
[3] Disponible en ligne au format PDF sur le site du Forum des droits sur l'Internet et au format HTML sur la Revue d'Actualités Juridique Française.
[4] Rép. Galut, n° 58163, JOAN 28 mai 2001, p. 3132.
[5] Rép. Luca, n° 54980, JOAN 13 août 2001, p. 4711.

[Rédaction, JDNet]
 
 
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