Le Net
Internet en campagne : 4. Un site n'est pas un numéro vert, quoique...
 (Lundi 28 janvier 2002)
         

Par Benoît Tabaka,
du cabinet d'avocats Landwell & Partners.
NB : cet article a fait l'objet
d'une première publication sur Juriscom.net

L'article L.50-1 du Code électoral précise que "pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour du scrutin où celle-ci est acquise, aucun numéro d'appel téléphonique ou télématique gratuit ne peut être porté à la connaissance du public par un candidat, une liste de candidats ou à leur profit". Le juge a eu l'occasion d'affirmer que cette interdiction ne vise pas le fait de mettre à disposition des électeurs un numéro d'appel téléphonique gratuit dès lors que ce dernier existait avant les élections, et qu'aucune modification notable n'a été opérée dans le cadre du scrutin [11].

Cette prohibition est-elle susceptible de s'appliquer à l'utilisation d'Internet par les candidats ? Le ministre de l'Intérieur a indiqué le 31 mars 1997 [12] que "la mise en place d'un site Internet est tout à fait comparable à la mise à la disposition du public d'un numéro d'appel téléphonique, gratuit ou non, d'ores et déjà considéré comme un moyen de propagande électorale par l'article L. 50-1 du Code électoral". Néanmoins, "à la différence d'un numéro d'appel téléphonique gratuit, qui ne peut être porté à la connaissance du public pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tout de scrutin ou celle-ci est acquise, aucune restriction n'est prévue quant à la diffusion dans le public des moyens d'accéder à un site Internet".

Suivant cette interprétation, le Tribunal administratif de Toulouse a estimé dans son jugement que "l'accès au site Internet de la liste (…) entraînant en principe le paiement d'une communication téléphonique ; que, par suite, ledit site Internet ne peut être regardé comme un numéro d'appel téléphonique ou télématique gratuit". Tout d'abord, nous relevons dans cet élément du dispositif une légère confusion de la part du juge. Ce dernier tente d'assimiler un site Internet (c'est-à-dire du contenu) à un numéro téléphonique ou télématique (c'est-à-dire le chemin d'accès audit contenu). Cette différence fondamentale aurait pu servir à elle seule à écarter l'argument soulevé. Un site Internet constituant un contenu et non un chemin d'accès, il n'est pas visé en lui-même par l'interdiction.

Pour surfer, il faut payer

Mais, les dispositions de l'article L.50-1 sont susceptibles de viser l'ensemble constitué par le numéro de connexion permettant l'accès au réseau et l'adresse du site Internet (son nom de domaine) qui constitue le couple essentiel pour accéder aux pages incriminées. Seulement et comme le relève le juge, l'internaute doit s'acquitter du montant d'une communication téléphonique. Le tribunal en a donc déduit que l'électeur qui se connecte à un site Internet n'est pas dans la même situation qu'en cas d'appel d'un numéro vert.

Cette interprétation ne va-t-elle pas évoluer ? En effet, les méthodes d'accès à Internet changent et se perfectionnent. A côté des services disponibles au travers du réseau téléphonique commuté (c'est-à-dire au travers de la ligne téléphonique traditionnelle avec un coût proportionnel au temps de connexion), les opérateurs téléphoniques et les fournisseurs d'accès à Internet permettent de se connecter via des techniques dites haut débit, facturées en fonction du débit (câble) ou indépendamment de toute durée (ADSL).

Les accès haut débits dans le même panier

Ces services qui tendent à se développer et à se démocratiser dans les foyers, ont pour effet de diminuer le coût unitaire de l'accès à Internet et ainsi le rendre quasi nul. Le coût pour l'électeur pouvant être apparenté à un accès gratuit, le simple fait de permettre d'accéder à un site Internet, c'est-à-dire de détenir un nom de domaine, pourrait être gouverné par l'article L. 50-1 du Code électoral.

Mais le nombre encore faible de ces accès, et l'absence de paiement du prix n'étant pas le fait direct du candidat, ont conduit le tribunal à considérer, à juste titre, de manière générale l'exclusion de l'accès à un site Internet de ladite interdiction. Tel ne serait pas le cas d'un candidat qui distribuerait, à ses concitoyens, un CD-Rom permettant d'accéder à Internet gratuitement pendant un nombre déterminé d'heures et, ayant préalablement configuré la connexion pour faire du site Internet de campagne, la page d'accueil par défaut s'ouvrant à chaque utilisation. Cet exemple n'est, encore aujourd'hui, qu'un cas d'école en raison du coût de la connexion Internet que devrait s'acquitter - et répercuter par son compte de campagne - le candidat [13].

A suivre Internet en campagne : 5. Défense d'utiliser les sites officiels sous peine de…

A lire également
:
1. Un média de propagande (presque) comme les autres
2. Où s'arrête la communication, où commence la publicité ?
3. Hors-ligne o
bligatoire les jours de scrutin

Notes :
[11]
CE, 9 juillet 1993, M. Artufel, n° 143.447 ; CE, 30 novembre 1998, Elections régionales de Languedoc-Roussillon, n° 195.125.
[12]
Rép. Saint-Ellier, n° 48087, JOAN 31 mars 1997, p. 1676.
[13]
Le coût pour l'opérateur d'une heure de connexion à Internet est d'environ 7 FHT, auquel s'ajoute les frais de commercialisation, marketing, etc …

[Rédaction, JDNet]
 
 
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