Les étapes du financement des sites marchands passées au crible Faire entrer des fonds d'investissement au capital

L'étape suivante dans la vie des entreprises du numérique et donc de l'e-commerce est souvent celle des levées de fonds. Or si bon nombre des fonds d'investissements ne misent plus sur des sites marchands et préfèrent soutenir des services à l'e-commerce, certains continuent à investir dans des e-commerçants. C'est notamment le cas de A Plus Finance. "Nous entrons au capital d'e-boutiques BtoC à l'occasion de Séries A, pour des durées de cinq ans environ", précise Jean-Michel Pimont, directeur associé du fonds.

Partech International aussi regarde toujours des dossiers d'e-marchands, au capital desquels il reste entre 4 et 9 ans. "L'e-commerce étant devenu hyper concurrentiel, il faut savoir trouver la bonne niche", prévient Philippe Collombel. L'investisseur explique que son premier critère de choix réside dans la qualité des entrepreneurs. "Ensuite, il faut du repeat business, la transaction unitaire doit être belle, le besoin en fonds de roulement pas trop élevé..."

Selon le moment de la vie de l'entreprise où les fonds d'investissement la rejoignent, leurs capitaux peuvent être utilisés différemment. "Notre seconde levée - 5,6 millions investis en 2012 par Orkos, 123Ventures, Partech et APE - a servi à bâtir la plateforme sur laquelle nous basons notre déploiement international, souligne par exemple Marc Menasé. Mais la première - 4,5 millions d'euros mis début 2011 par Partech et Axa Private Equity - nous a permis d'accroître notre budget marketing et tout simplement de structurer Meninvest."

Les fonds apportent plus que des capitaux

Car au-delà des leurs capitaux, les fonds apportent un recul qui fait souvent défaut aux dirigeants. "Encore plus dans le digital où l'on est perpétuellement dans le feu de l'action", affirme Marc Menasé. Tout d'abord, l'obligation d'adresser un reporting aux fonds permet d'améliorer la qualité d'analyse de l'activité. "Contrairement à la situation où nous sommes seuls à bord, il faut pouvoir tout justifier, souligne Olivier Bernasson. On améliore donc aussi notre pilotage, notre management et nos compétences économiques et financières." Philippe Collombel ajoute que le reporting financier n'est pas suffisant : "Quand un problème apparaît dans les comptes, il est trop tard pour intervenir". Il recommande donc de disposer d'indicateurs avancés d'activité, en temps réel.

a gauche jean-michel pimont, directeur associé chez a plus finance, et à droite
A gauche Jean-Michel Pimont, directeur associé chez A Plus Finance, et à droite Philippe Collombel, managing partner chez Partech International © C.Debise / JDN

Par ailleurs, les discussions au board sont bien sûr enrichies de la présence d'actionnaires dont l'implication est différente et dont les intérêts se mesurent en années. "Nous réfléchissons sur le long terme, avec une vision de la valeur de l'entreprise à 3, 4, 5 ans, rappelle Jean-Michel Pimont. Et comme ce ne sera pas à nous de les appliquer, il nous est facile de donner des conseils. Il y a souvent des choses qui ne vont pas, mais qui n'arrivent jamais jusqu'à la conscience des entrepreneurs. Les fonds permettent de les aborder." Les fonds s'estiment également utiles pour constituer l'équipe dirigeante de l'entreprise. "Ce sont des décisions très importantes, or les entrepreneurs ont souvent peur de s'attaquer au problème, analyse-il. Nous sommes bien placés pour les y aider."

Plusieurs fonds pour plusieurs compétences

Chaque fonds apporte d'ailleurs une valeur ajoutée différente. "Avec Orkos, nous échangeons beaucoup sur notre modèle économique, tandis que Partech nous challenge davantage sur notre positionnement marketing", précise ainsi Marc Menasé.

Faire entrer plusieurs fonds à son capital présente d'ailleurs des avantages. Bien entendu, celui d'apporter davantage de cerveaux autour de la table. "Mais aussi plus de possibilités si l'on a besoin d'un refinancement", remarque Marc Menasé. Olivier Bernasson estime en outre que la pression qu'exercent les fonds est moindre s'ils sont plusieurs.

Tout ceci à condition que les fonds eux-mêmes soient bons : "De même qu'ils font une due dilligence sur l'entreprise, l'entrepreneur doit en faire une sur les fonds avec lesquels il envisage de signer", conseille Marc Menasé. Lequel recommande d'ailleurs de fixer les limites dès le départ. "Il y a un job de dirigeant et un job d'actionnaire, ils ne doivent pas être poreux et l'actionnaire ne doit pas mettre un pied dans l'opérationnel."