Achat média programmatique : la fin du travail humain ?

L'achat programmatique doit il être perçu comme une potentielle menace pour l’emploi dans le secteur de l’achat média ?

Rappel : Le Real Time Bidding est un mode d’achat programmatique d’espaces publicitaires en temps réel, sur inventaires web et mobile, en formats Display et Vidéo. Quel que soit le support, l’achat média se fait automatiquement en proposant un prix dynamique par impression unique, via un système d’enchères, par l’intermédiaire d’une plateforme technologique spécialisée appelée Demand Side Platform (DSP). Cette variable prix est dépendante de nombreux facteurs propres à l’emplacement publicitaire et plus largement au profil de l’utilisateur.

L’explosion du programmatique

L’achat programmatique, et plus particulièrement le RTB (Real Time Bidding) est, ces derniers temps, au cœur des préoccupations des acteurs du marketing et de la publicité. Ce mode d’achat média display (web, mobile & vidéo) rencontre une croissance exponentielle en France depuis son arrivée en 2010. En 4 ans, les investissements programmatiques ont été multipliés par 22, pour un marché français pesant aujourd’hui plus de 113,5 M€. Cette ascension semble n’en être qu’à ses débuts, puisque les prévisions pour 2017 voient ce montant presque multiplié par 4 (427,8 M€).
Source : Real-Time-Bidding in the United States and Worldwide 2010-2017 IDC

Si cet engouement fait le bonheur de certains marqueteurs et divers acteurs du secteur, d’autres ont un regard plus mitigé, craignant que ces algorithmes évincent petit à petit le rôle de l’humain, jusqu’à le remplacer complètement. Alors, tous les employés du secteur doivent-ils être inquiets pour leur avenir ?
Technologies, un rôle central mais limité
Les différentes technologies utilisées par les prestataires opérant de l’achat média programmatique ont deux rôles principaux : l’optimisation du ciblage et l’automatisation de l’achat média.

L’optimisation du ciblage est l’essence même de l’achat programmatique, elle repose sur le fait d’utiliser les nombreuses données disponibles relatives aux internautes, pour leur adresser une publicité ultra ciblée, correspondant à leurs affinités et à leurs centres d’intérêt. Les algorithmes permettent d’utiliser ces données, une fois collectées et modélisées, pour diriger les achats médias et ne diffuser des impressions qu’aux personnes affinitaires à l’offre proposée par l’annonceur. Cependant, la décision d’utiliser une technologie X ou Y lors de la mise en place d’une campagne (look alike modeling, prospection algorithmique, …) incombe à l’humain qui gère cette campagne.
L’automatisation de l’achat permet surtout de diminuer le nombre d’étapes chronophages inhérentes à l’achat display traditionnel. En effet, les trading desks passent par ce que l’on appelle des DSP (Demand Side Plateform) pour opérer leur achat d’espaces, la décision d’achat d’une impression se fait automatiquement via cette plateforme en fonction de plusieurs critères, le processus d’enchère est réalisé par le bidder et l’humain n’a pas « d’enchères manuelles » à réaliser pour chaque impression, ce qui aurait été beaucoup trop fastidieux et aurait rendu impossible le processus d’achat d’impressions aux enchères. Encore une fois, l’humain est aux commandes de ce processus d’achat, il est décisionnaire du montant maximum de l’enchère et veille ainsi à une dépense pertinente du budget de l’annonceur.
Ces technologies sont donc le moteur de l’achat programmatique mais ne sont pas autonomes, l’intervention humaine demeure indispensable pour rendre leur usage pertinent et productif.

Hommes + Machines, la clé du succès

Le rôle de l’humain du début à la fin d’une campagne est crucial car, bien que l’achat soit automatisé, chaque campagne est unique par son ciblage et son set-up technologique.
En amont du lancement, il est responsable de la réflexion stratégie :
  • quelles technologies vont être utilisées pour cette campagne ?
  • Quelle est la cible réelle ?
  • Quelles Data va-t-on utiliser ?
  • Quelle va être la répartition budgétaire entre prospection et re-marketing ?
  • Quelles créatives va-t-on adresser et à quelle fréquence ?
Une série de questions auxquelles une machine ne saurait répondre et qui nécessite une réelle réflexion, tenant compte de la problématique annonceur et du contexte de la campagne.
En cours de campagne, l’humain a un rôle de contrôle et d’ajustement. Il est tout d’abord responsable du montant de l’enchère maximum : combien suis-je prêt à payer pour toucher tel utilisateur ? Par la suite, Il arrive souvent qu’une stratégie de ciblage ou bien qu’un type d’emplacement précis affiche de meilleures performances que d’autres ; son rôle est alors de monitorer les investissements pour les renforcer sur les stratégies les plus efficaces, et au contraire délaisser celles n’affichant pas de résultats satisfaisants.
Enfin, l’homme a un rôle central d’analyse post campagne, dans une logique constante d’optimisation. Une fois la campagne terminée, il va analyser les performances et acquérir des learning importants, lui permettant d’identifier les pistes d’amélioration pour une future campagne.

Conclusion

Le succès d’une stratégie programmatique réussie repose donc sur l’alliance fructueuse de technologies performantes et d’experts avisés. Plutôt que d’être perçu comme une potentielle menace pour l’emploi dans le secteur de l’achat média, le programmatique devrait au contraire être reconnu pour les nombreuses opportunités qu’il a créé, notamment via l’apparition de nouveaux métiers comme celui de trader média ou encore de data scientist, rassemblant au sein de mêmes structures des profils totalement différents, issus de la publicité d’une part, et du monde scientifique d’autre part.