La satisfaction client, clé de l'innovation et de la rentabilité durable

La satisfaction client est l’un des sujets les plus débattus en management de la relation client. Afin d'aider à mieux appréhender cette question, voici quatre moyens d'aborder le sujet : le CSAT, le NPS, l’effet Waouh et le CES.

Équation complexe car dépendante de multiples variables. A l'ère de l'information immédiate et virale, par essence difficilement contrôlable, les entreprises ont la volonté de rationaliser cette relation. La finalité est simple : anticiper l'avenir afin de limiter les risques. Longtemps négligée par les sociétés, car compliquée et volatile, l’évaluation de la satisfaction client est aujourd’hui un sujet prioritaire. L'explication : il faut, plus que jamais, se démarquer de la concurrence et toujours mieux devancer les desiderata des clients.  

Toute information peut conduire à des transformations plus ou moins profondes dans l'entreprise. Une bonne gestion de la satisfaction client est donc synonyme de flexibilité accrue mais surtout d'excellence. À l'ère des réseaux sociaux, le client devient un véritable expert. Une voix influente peut, d'un revers, encenser ou nuire fortement à l’image d’une entreprise, d’une marque, d’un service ou d’un produit. Ainsi, satisfaction client rime avec danger, car la peur de se mettre le moindre client à dos présente aujourd’hui un risque majeur.

L'intérêt d'une appréhension optimale de la satisfaction client trouve ses origines dans cinq variables caractéristiques de notre époque : la faible croissance des marchés dans un contexte de crise ; les rapports plus que jamais directs et instantanés entre les consommateurs et les marques, orchestrés, à l'ère des sociétés de l'information, par les -omnipotents- réseaux sociaux ; l'affirmation de nouveaux entrants low cost ; une tendance générale à l'ultra-concurrentiel ; et, enfin, la maturité des marchés, produits et services.

La loyauté à tout prix  

Premier apparu, le CSAT est actuellement l'indice le plus utilisé par les entreprises en matière de satisfaction client, tous secteurs confondus. Nombreuses sont en effet les entreprises à utiliser des questionnaires de satisfaction. Le principe est simple : il s’agit de poser une question, afin d’évaluer la satisfaction à l'égard de la marque ou du service fourni. Et ce, à partir d'une notation (de 1 : « pas du tout satisfait », à 5 : « très satisfait »). On peut établir, sur la base du calcul mentionné, le CSAT, soit le score de l’entreprise. Ici, les avantages sont clairement la lisibilité et la rapidité. Cette simplicité est également ressentie par les clients qui, de fait, répondent fréquemment à ces enquêtes. Les taux de retours élevés (jusqu’à 70%), attestent que le CSAT est perçu comme une pratique normale, une sorte de service après-vente dans la relation fournisseur/client. Il comporte néanmoins certaines limites, dont celle-ci : il est difficile d'établir une corrélation avérée entre la satisfaction client et les résultats financiers.

C'est le cas typique de la société General Motors sur la période 2005-2010 : celle-ci enregistrait des résultats positifs via ses questionnaires de satisfaction client, alors que la société se trouvait au bord de la faillite. Lien difficile à établir, de même, avec la loyauté du client, concept mis en avant par deux ouvrages de référence en la matière : The ultimate question 2.0 du célèbre auteur américain Fred Reichheld et The effortless experience de Matthew Dixon - directeur exécutif du service financier et du  contact client au sein de CEB. Autre limite : vouloir simplement dépasser les attentes peut engendrer la perte de vue des besoins basiques des clients et donc créer des distorsions. Une poursuite aveuglée de l'augmentation artificielle du niveau de satisfaction peut en effet se révéler contreproductive.

Un autre écueil du CSAT relève du peu de détails et d'informations précises à cause de la rigidité du procédé. Celui-ci s'assimile en effet à une esquisse de dialogue où, finalement, une grande place demeure pour les non-dits et l'interprétation. Difficile en effet parfois de saisir le/les message(s) subliminaux perçues dans les réponses du client... Au final, et même s’il est imparfait, le CSAT s’applique encore assez bien à toutes les industries, en B2B tout comme en B2C.

Apparue en 2003 dans le Harvard Business Review et le célèbre article de Fred Reichheld One number you need to grow, le Net Promoter Score, dit NPS, s'est rapidement imposé en complément du CSAT. Tout comme celui-ci, il permet le recueil d'informations à chaud via un sondage d'opinion et des questions rapides (voire une seule question dans le cas du NPS) et interprétables facilement.

Les conclusions qui en ressortent ont un effet mobilisateur dans l'entreprise et visent à une amélioration continue. Dans le domaine de l'outsourcing, là encore le NPS et le CSAT présentent quasiment les même avantages : informations en temps réel, mesures personnalisées, retours rapides, mises en place de primes liées au score ainsi que questionnaires très courts. Petite différence à mettre au crédit du NPS pour certaines sociétés : la suppression de l'indexation sur la durée de traitement (DMT).                                      

Le NPS est de fait un outil managérial permettant de jauger la loyauté d'un client à l'égard d'un fournisseur -société, employeur ou autre- à travers sa propension à recommander la marque. En deux mots : il indique si un client fait la promotion -ou non- de votre marque, de votre service ou de votre produit. Le sésame étant bien entendu d'avoir un indicateur NPS positif -plus de promoteurs que de détracteurs. On peut ainsi évoquer une forme de loyauté vertueuse pour l’entreprise en cas de bons résultats. En pratique, une simple question : « Nous recommanderiez-vous à quelqu’un de votre entourage ? » Sur une échelle de valeur de 0 à 10, il permet d'identifier les promoteurs (ceux qui deviennent de véritables ambassadeurs de la marque), des clients dits passifs, ainsi que des détracteurs (véritable moutons noirs risquant fort de participer d'un bouche à oreille négatif). Le NPS est particulièrement utile pour comparer, sur un marché et sur une zone géographique donnés, les performances entre différentes entreprises.

D'après un rapport de la prestigieuse London School of Economics, intitulé Advocacy Drives Growth, des chercheurs sont parvenus à démontrer qu’une augmentation moyenne du NPS de 7 points équivalait en moyenne à une hausse de 1% du chiffre d’affaires. Toute baisse du nombre de détracteurs s'assimile donc à une augmentation du chiffre d'affaires. Les maîtres-mots, satisfaction client et fidélité, sont par essence ici constitutifs de croissance du chiffre d'affaires. Au final, le NPS évalue assez bien la loyauté à moyen et long terme. Orientée vers le B2C, il permet une amélioration continue du service client et d’associer les métriques de performance du Service Client avec la performance financière de l’entreprise. En outre, le NPS permet également de benchmarker de manière fiable la performance de sa relation client par rapport à ses concurrents.

En mettre plein la vue ou l'effet Waouh  

Le Customer Delight et l’effet Waouh sont apparus à la fin des années 1990, des études démontrant que la satisfaction ne suffisait pas à maintenir la clientèle mais qu'il fallait tout simplement séduire le client (de l'anglais to delight, enchanter) et donc le surprendre, le combler. En deux mots et familièrement parlant : lui en mettre plein la vue. L’effet Waouh ou Wow désigne le fait qu’un produit, un service ou encore une campagne publicitaire puisse déclencher de manière ostentatoire chez les consommateurs un effet de surprise ou d’admiration pouvant franchement se traduire par l’expression waouh ! ou wow ! Celui-ci provoque l’adhésion des consommateurs confrontés au produit ainsi qu'un fort potentiel de recommandations et de viralité.

Véritable phénomène de mode pour apôtres du dernier cri, il est généralement obtenu par une caractéristique forte et innovante du produit, service ou message publicitaire. C'est typiquement la réaction que l’on peut avoir en découvrant une chambre d'hôtel ou, exemple type de lancement réussi, celle des consommateurs découvrant pour la première fois les effets de l’écran 3D de la console Nintendo 3DS en 2011.

Mis en avant par Keiningham et Vavra dans leur livre The Customer Delight Principle, l’effet Waouh repose sur plusieurs phénomènes. En premier lieu, il proscrit la zone d’insatisfaction et les détracteurs déloyaux envers la marque. Optimale, la zone de ravissement permet à une marque de se différencier de la concurrence ainsi qu'au client d'y trouver son compte. C'est à ce stade de l'enchantement que l'on assiste au phénomène d'attachement d'un consommateur à l'égard d'une marque. On pourrait parler ici de solution miracle. Cependant, là encore, les inconvénients de ce système sont nombreux. En premier lieu, le coût, car l'effet Waouh s'accompagne généralement d'un investissement fort. Possibilité cependant de profiter d’un effet Waouh d'opportunité comme dans le cas d'un magasin de vêtements distribuant gratuitement des invendus ou dans le cas d’un déstockage. Mais, généralement, émerveiller le client, par des offres exceptionnelles ou des cadeaux, implique un coût élevé. Inutile de préciser aussi qu'il est  généralement recommandé de fournir le même traitement à tous ses clients...

En définitive, les recherches menées par Dixon, auprès d’environ 125 000 clients, 5 000 agents et 100 entreprises, nous enseignent que le fait d’être séduit par une marque n’est au final souhaité par les clients que dans 16% des cas. De plus, mettre en balance le coût et les bénéfices montre un retour sur investissement assez faible. Deuxièmement, l'une des caractéristiques intrinsèques de l'effet Wahouh, représentatif par essence d'un phénomène de mode, est son côté éphémère. Or, renouveler en permanence l'exceptionnel est somme toute délicat... Troisièmement, dans le fond, l'effet Wahouh détourne le client de ses préoccupations premières et l'on peut se demander si les entreprises ne cherchent pas davantage à augmenter leurs attentes que répondre véritablement à leurs besoins. Enfin, un dernier écueil relativisant l'impact de l'effet Wahouh : les limites de sa portée dans de nombreux secteurs. Dépasser les attentes est difficilement atteignable en matière de B2B, l'effet Waouh étant par définition davantage utile dans une démarche marketing visant les particuliers plutôt que les entreprises. En outre, il se concrétise très rarement dans le B2C de masse mais plutôt dans des niches dont le secteur du luxe fait partie, où les valeurs portées par la marque peuvent réclamer ce type de traitement (hôtellerie de luxe et grandes marques, notamment). 

Satisfaction client : moins d'effort et plus d'humain

En marge du besoin d'anticiper la loyauté des clients ou de leur fournir une expérience exceptionnelle -effet Waouh, la relation client s'ouvre depuis peu à une nouvelle approche, orientée vers la réduction de l’effort client. Petit dernier, le Customer Effort Score, le CES, s'avère, selon l’étude réalisée par Matthew Dixon, l'indicateur le plus performant pour gagner en fidélité client sans rogner sur ses marges. Celui-ci mesure l'effort déployé par un client pour résoudre un problème rencontré lors de l'utilisation d'un produit. Il est donc particulièrement important en matière de support technique.

Toujours sous la forme d'une note de 1 à 10, il évalue l’interaction avec le conseiller client. Le temps d’attente est la principale composante de l’effort car ce dernier a un effet dévastateur. La qualité de l'interaction est également primordiale pour estimer la satisfaction du client. Parmi ceux qui ont déclaré avoir effectué un effort qu'ils jugent faible lors de la prise de contact avec le service client, 94% ont exprimé une intention de ré-achat et 88% ont annoncé qu’ils augmenteraient la valeur de leurs achats. A l’inverse, 81% des personnes ayant dû consentir à un effort qu'ils qualifient d'intense ont annoncé qu’ils participeraient à un bouche-à-oreille négatif.

Autre aspect : aujourd’hui, et paradoxalement, les canaux de contacts étant multiples, les clients ne savent pas forcément comment contacter l’entreprise concernée en cas de problème. Il est donc primordial de clarifier cela en rendant cohérent l'utilisation de ces canaux afin de pouvoir faire face le plus rapidement possible à la sollicitation d’un client. Il est même vital d’offrir au client des moyens de connaître le meilleur canal pour résoudre son problème, que ce soit en self-service ou par l’intermédiaire d’un conseiller client. A cet égard, notons que 40% des appels actuels vers le service client font suite à une tentative de recherche en self-service non aboutie.

Au final, le CES se décline relativement bien à toutes les industries, en B2C comme en B2B. Peu compatible avec l’effet Waouh, cet indicateur est en revanche le plus pertinent en matière d'appréhension des intentions de rachat ou non du client. Tout consommateur souhaite vivre une expérience mémorable au moment de l'achat. Une fois cette phase de ravissement passée, chacun exige par la suite une expérience transparente lorsqu'il s'adresse à un service client. C'est pourquoi la mesure de l’effort client est un outil primordial pour évaluer les indices de satisfaction client et de recommandation, mais aussi pour être à même d'effectuer les ajustements nécessaires pour optimiser et simplifier le parcours client.

En somme, il s'agit bel et bien de prolonger l'effet enchanteur procuré par l'achat en offrant, lors d'un problème rencontré, une expérience simple et pratique visant à prolonger la durée de vie d'une marque au-delà du coup de foudre initial... et du souci rencontré lors de l'utilisation.  

Il s’agit donc d’une méthode complète et très aboutie de mesure et d’amélioration continue de la relation client, même si sa mise en place est en revanche plus lourde que les autres approches.

Conclusion   

Après des années -compliquées- d'appropriation effrénée des nouveaux canaux (de Facebook à YouTube, sans parler des smartphones et tablettes), n'est-il pas redevenu plus pertinent de se rapprocher de ses clients et de s’employer à appréhender réellement leur expérience ?

Plus que jamais présent en temps réel et prêt à donner son avis sur tout, le client s'est peu à peu volatilisé aux yeux des entreprises. Plus informé et moins influencé par le matraquage publicitaire, il se laisse séduire plus difficilement.

Pourquoi tout miser sur la quête de nouveaux prospects au lieu de concentrer ses efforts sur les clients existants ? Relation à construire sur le long terme, cela témoigne d'une sagesse accrue et de plus de stabilité car l'entreprise se voit ainsi moins exposée aux changements incessants. Il est en effet difficile d'être performant en même temps sur la satisfaction et sur la conquête, un choix devant s'opérer pour optimiser les dépenses et maximiser les résultats. Miser sur la fidélisation est aussi un moyen de se prémunir contre une concurrence toujours plus agressive et moins chère.

La satisfaction client, clé de l’innovation et de la rentabilité durable, repose sur plusieurs grandes valeurs : valoriser ses clients, instaurer l'empathie, la proximité, la qualité de service et l'information. On s'inscrit alors dans une logique de rentabilité à long-terme, qui englobe les cycles d’achat, de possession et de renouvellement. En définitive, n'est-ce pas aussi une manière d'accorder davantage de crédit à ce que produit votre entreprise et, implicitement, d’augmenter sa valeur ?