Le commerce vocal s’apprête à trouver ses marques

Sans aucun doute les commerces de commodité, ainsi que tous les acteurs de l’entertainment, profiteront en premier du commerce conversationnel, avec la livraison de repas à domicile, les billets de train ou de concert, le téléchargement de musique et la location de films.

40 milliards de dollars : c’est le montant du chiffre d’affaires que pourrait représenter le commerce vocal d’ici 2022, selon l’étude du cabinet de conseil OC&C Strategy Consultants sur l'évolution du commerce vocal de décembre 2017. Le succès que rencontrent les enceintes intelligentes, du type Amazon Echo ou Google Home, récemment débarquées dans nos foyers, n’est évidemment pas étranger à cette prospective. Mais que vaut réellement cette nouvelle promesse pour les marques ?

Quand les GAFAM donnent de la voix

Tout a commencé en 2011 par une simple phrase : "Bonjour Siri". Apple sortait son assistant vocal intelligent et révolutionnait l’interaction de l’utilisateur avec son smartphone. Depuis, tous les grands acteurs de la nouvelle économie, les fameux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), auxquels on peut ajouter Samsung, ont développé leurs propres systèmes.

Les enceintes connectées à commande vocale sont le dernier objet à la mode et portent clairement les espérances du commerce vocal. Via ce dispositif équipé d’un haut-parleur, d’un micro et d’un assistant intelligent, l’utilisateur peut interagir avec son enceinte et lui demander d’exécuter une commande : monter le son de la télévision, indiquer l’heure, donner la température de la pièce, actionner les volets électriques de la chambre, allumer le chauffage de la salle de bains, lancer de la musique…

Si le taux d’équipement est encore relativement confidentiel, 13% au niveau mondial, il pourrait passer à 55% d’ici 2022, selon le cabinet de conseil OC&C Strategy Consultants. La guerre entre les GAFAMS est lancée pour s’imposer sur ce marché. Ainsi, Amazon et Google scellent des alliances exclusives avec de grands distributeurs de part et d’autre de l’Atlantique. Les marques qui voudront profiter de cette aubaine ont donc intérêt à bien choisir sur quels dispositifs elles souhaitent développer leurs applications, car il n’y aura pas de la place pour tous dans les foyers ! 

"Viens chez moi, je vais te montrer mon nouvel assistant vocal"

Au départ, l’engouement pour les enceintes connectées était purement technologique : impossible pour les geeks de résister à ce gadget high-tech. Puis, c’est le côté fun et ludique qui l’a emporté. L’utilisateur s’est retrouvé devant ce nouveau jouet, un peu comme un enfant, lui posant de nombreuses questions et attendant des réponses. Enfin, est venu le côté pratique : piloter sa maison à la voix, sans bouger de son canapé, est évidemment très confortable.

De là à passer à l’achat de biens ou de services, il n’y a qu’un pas, qui nécessitera toutefois quelques ajustements pour être franchi. Le développement en nombre et la qualité des applications de commerce vocal, qui seront déployées sur les enceintes ou les smartphones, seront déterminants dans l’adoption de ce nouveau mode d’achat.

À qui profite la voix ?

Les premiers à profiter de ce nouveau business seront sans aucun doute les commerces de commodité, ainsi que tous les acteurs de l’entertainment : livraison de repas à domicile, billets de train ou de concert, téléchargement de Mp3, location de films… Progressivement, cet usage se déportera sur les achats récurrents, facilement automatisables, comme l’eau en bouteille, les croquettes du chat ou les couches et petits pots du bébé, pour lesquels les consommateurs sont généralement fidèles à une marque. Le risque sous-jacent étant que le consommateur ne cherche plus à aller voir "ailleurs" si l’herbe est plus verte. L’attachement et la fidélité à la marque s’inscriront donc au cœur de la bataille du commerce vocal.

Enfin, l’enjeu pour le secteur de l’électroménager comme pour celui des produits techniques ne se situera pas tant sur la vente de biens, du fait de la haute technicité des appareils, mais plutôt sur leur capacité à proposer des services d’accompagnement : SAV, prise de rendez-vous pour la maintenance, gestion des incidents… Chaque secteur est donc amené à tirer profit de ce nouveau canal de distribution, mais d’une façon différente selon son activité. Néanmoins, il semble que certains secteurs risques d’être exclus de l’opportunité du commerce vocal et notamment ceux pour lesquels l’achat est essentiellement dicté par une représentation visuelle des articles, comme les secteurs de la mode et de la décoration par exemple.

Les consommateurs encore en phase d’apprentissage

Avant de se projeter dans un futur proche, revenons à notre époque. Dans sa phase d’adoption, la commande de service à la voix présente surtout comme intérêt d’apprendre à l’utilisateur à communiquer avec son assistant vocal. Même si les progrès en matière d’intelligence artificielle sont prodigieux, bien se faire comprendre d’un tel dispositif demande un peu d’entraînement.

Commander le son de sa télévision est bien différent du fait d’acheter un ordinateur. Cela va nécessiter une interaction plus sophistiquée. Plus l’utilisateur prendra l’habitude de dialoguer avec son enceinte connectée ou l’assistant intelligent de son smartphone, plus il sera tenté d’en faire usage dans le cadre de ses achats. Lorsque donner des ordres vocalement à une machine sera devenu une habitude quotidienne, alors le commerce vocal deviendra une réalité.