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Après une visite à Googleplex, la raison de la fuite de cerveaux vers Google (...) devient plus claire. Pour un ouvrier des technologies de l'information, ou pour mieux dire un journalier des TI, travailler à Googleplex constitue un véritable rêve. Dans ce secteur, les journaliers exploités sont toujours plus nombreux ; une figure professionnelle exemplaire est celle du coder indépendant qui développe des projets personnels, peut-être en les publiant sur Sourceforge.net ou sur Slashdot.org, et qui offre sa compétence sur le marché sans avoir aucune sorte de protection syndicale, ni de statut, ni aucune de ces garanties qui apparaissent comme des vestiges préhistoriques dans notre époque de flexibilité totale. À Googleplex, il pourra même consacrer le désormais célèbre 20 % du temps ouvrable à ses projets, payé et encouragé à faire toujours mieux.

 

Entre les parties de hockey et de volley, les chiens qui courent à travers tout le campus-entreprise et dans les couloirs, les réunions autour d'une table de ping-pong, il est difficile de s'ennuyer. Comme il n'est pas facile de recruter des nouveaux collaborateurs qui soient en mesure d'améliorer encore ce genre d'atmosphère, Google s'est distingué par ses trouvailles ingénieuses en termes de recrutement. La plus curieuse est sans doute le test lancé en juillet 2004 : dans quelques stations de métro de la ville de Cambridge, dans l'État du Massachusetts (USA), et le long de l'autoroute 101 en Californie, sont apparus d'énormes panneaux blancs portant cette inscription :

{first 10 digit prime in consecutive digits of e}.com

c'est-à-dire :

{le plus petit nombre premier à 10 chiffres consécutifs en e}.com

 

Le logarithme naturel demandé est le nombre 7427466391 ; à l'adresse http://www.7427466391.com/ indiquée sur l'affiche, on découvre une adresse IP de Google où il est demandé de compléter une séquence de chiffres ; si l'on trouve le nombre 5966290435, on suit les instructions en l'utilisant comme mot de passe pour entrer dans une section du site http://www.linux.org (passage assez imprévu) et de là, on ricoche à nouveau vers Google, sur le site http://www.google.com/labjobs/ où l'on vous demande d'envoyer votre curriculum : si l'on a réussi à résoudre les énigmes, c'est que l'on peut être une bonne recrue pour Google.

 

Mais Google n'attire pas seulement les meilleurs techniciens, hackers et bricoleurs de génie : bien vite, les managers les plus cotés du monde des TI s'aperçoivent de ses potentialités et se battent entre eux pour intégrer l'entreprise.

 

La stratégie d'accumulation de données pour effectuer des recherches et de machines en réseau pour conserver une copie des données va de pair avec l'accumulation des cerveaux. Machines signifiantes, machines électroniques, machines biologiques s'accumulent à Googleplex, pour donner naissance à un style de vie, voire à une espèce de religion de l'excellence, incarnée par un apôtre.

 

Celui qui incarne le mieux le style de l'entreprise, nommé l'evangelist de Google, est, parmi tant de jeunes, un vieux loup de la Toile : Vinton G. Cerf, inventeur avec Robert Kahn du protocole TCP/IP. Les circonstances de son arrivée méritent une petite parenthèse : en février 2005, Google confirmait qu'ICANN, l'organisme qui assurait la supervision du système des noms et des domaines Internet, avait donné carte blanche pour que l'entreprise de Mountain View entre dans le commerce d'enregistrement des domaines. En septembre 2005, Google annonce que Vinton Cerf est devenu "vice-président et apôtre en chef d'Internet pour Google. Sa fonction consiste à déterminer de nouvelles technologies et des applications stratégiques pour l'entreprise sur Internet et sur les autres plates-formes". Jusqu'alors, entre autres charges, Cerf assumait celle de conseiller d'administration chez ICANN. Contrairement au recrutement d'Eric Schmidt au poste d'administrateur délégué, et d'autres top managers débauchés chez les concurrents, il s'agit sans doute ici d'une opération d'image : difficile de penser que Cerf travaille vraiment à Googleplex, si amusant que cela puisse être...

 

La Face Cachée de Google © Editions Payot

 

En savoir plus La bio de Vinton Cerf