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Christophe Espern |
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- Co-fondateur de l'association Quadrature du Net
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Qu'attendez-vous des assises du numérique ?
A vrai dire, nous n'en attendons pas grand chose vu comme cela
démarre. Les consommateurs n'étaient pas représentés lors de l'ouverture. Nous
avons proposé aux services d'Eric Besson, ainsi qu'à ceux du Premier ministre
d'intervenir lors de ces assises, mais nous n'avons jamais eu de réponse. L'UFC-Que
Choisir, la CLCV et l'UNAF ne seront pas plus représentés que nous. A croire que
l'avis des utilisateurs des nouvelles technologies n'intéresse pas le gouvernement.
Autant réfléchir à l'évolution du droit du travail sans y associer les travailleurs.
Cet événement n'est qu'une opération de communication destinée à
donner l'illusion d'un débat ouvert, organisé sous l'égide des pouvoirs publics.
Eric Besson organise une belle mascarade.
Eric Besson a-t-il une influence sur les actuels dossiers
qui concernent le numérique ?
Bonne question. Je doute qu'Eric Besson ait beaucoup de pouvoir
sur les dossiers qui touchent à l'économie numérique. Le projet de loi de lutte
contre le piratage, par exemple ne dépend pas de son secrétariat d'Etat mais du
ministère de la Culture, pas plus que le plan de lutte contre la cybercriminalité,
qui relève du ministère de l'Intérieur et dont les mesures doivent être présentées
à la mi-juin. Ces dossiers sont déjà prêts. Ni Eric Besson, ni ces assises n'y
changeront rien : ils seront adoptés pendant l'été. Quel est donc l'intérêt de
débattre de choses qui ont déjà été décidées dans votre dos ?
Que reprochez-vous à ces deux textes ?
"Eric Besson organise une belle mascarade" |
Ils sont inquiétants l'un comme l'autre. Le projet de
loi Hadopi instaure la riposte graduée, quant au plan de lutte contre la cybercriminalité,
il vise notamment à légaliser les perquisitions à distance des ordinateurs des
internautes par des chevaux de Troie. Et alors que la France se prépare à prendre
la présidence de l'Union européenne, elle se positionne déjà pour l'introduction
de certaines de ces mesures à l'échelle européenne. C'est le cas du principe de
riposte graduée, mais pas seulement. La France, soutenue par l'industrie culturelle
cherche déjà en Europe à diminuer la protection de la vie privée afin de renforcer
la protection du droit d'auteur via l'usage de logiciels espions. Ces assises
illustrent donc bien la notion de dialogue du gouvernement, qui se limite à la
concertation avec les entreprises. Une fois de plus les internautes sont oubliés.