FemmeOnline gagne son bras de fer contre PPR Interactive

Huit ans après avoir créé le numéro deux des portails féminins en France, et sept ans après sa disparition, le fondateur de FemmeOnline vient d'en terminer avec les procédures l'opposant à son principal actionnaire : PPR Interactive.

Ouvert en avril 2000, le portail féminin FemmeOnline fermait ses portes quelques mois plus tard au début de l'année 2001. Lancé dans la foulée d'AuFeminin, il ambitionnait, comme d'autres avec lui, de fédérer les femmes autour de sa plate-forme et se rémunérer par la publicité. Sept ans après sa fermeture, son fondateur, Thierry Bartin a gagné 13 procès contre le fonds d'investissement avec lequel il était en conflit, PPR Interactive. Un conflit qui a eu raison du projet.

Les débuts de FemmeOnline s'annoncent pourtant prometteurs. La nouvelle économie est en plein boom. Dans ce nouveau Far West, toutes les places sont à prendre, et les fonds surinvestissent. C'est dans cette atmosphère favorable à la création de start-up que se crée FemmeOnline. Partie de zéro, la société compte 23 employés au moment de son lancement, dont Yolaine de la Bigne, caution éditoriale et rédactrice en chef, en provenance de France Info.

Thierry Bartin présente son projet à plusieurs fonds. Parmi eux, Dassault Développement, et Europ@web, le fonds d'investissement de Bernard Arnault. Finalement, c'est le grand adversaire de ce dernier qui rentrera dans le capital, François Pinault, via PPR Interactive. Sur fond de guerre entre les deux milliardaires pour la prise de contrôle de Gucci, PPR cherche à rattraper son retard sur Europ@web qui a investi à tour de bras dans Internet (480 millions d'euros investis dans 50 start-up entre mi-1999 et fin 2000).

PPR Interactive place donc 25 millions de francs en mars 2000 dans FemmeOnline contre 39 ou 54 % du capital en fonction de l'atteinte d'objectifs d'audience. Un premier versement de 15 millions est alors réalisé, un autre de 10 millions est prévu pour septembre. Seulement voilà, les marchés financiers commencent à tousser, et en septembre, le Nasdaq sombre, marquant l'explosion de la bulle Internet.

"Nos relations ont alors commencé à se tendre, explique aujourd'hui Thierry Bartin. Prétextant une audience inférieure aux objectifs qu'il avait fixé à la start-up, PPR Interactif réclame alors 54 % du capital. Selon le président, l'outil de mesure d'audience fonctionnait mal. Pour lui, les chiffres donnés par la régie publicitaire Hi-Media, qui sont bien meilleurs, le prouvent. Le rapport de force débute. PPR campe sur ses positions mettant en avant le pacte d'actionnaire et menace de ne pas débourser les 10 millions de francs restant s'il ne lui est pas accordé la majorité du capital. "Un coup de pression pour prendre le contrôle de la société", juge Thierry Bartin, qui décide de ne pas y céder.

Les batailles à coups d'assignations débutent et le tribunal de commerce oblige finalement PPR Interactive à payer les 10 millions de francs en janvier 2001. Le conflit d'actionnaires rend la société ingérable, et un administrateur ad hoc est nommé. A l'époque, AT Kearney valorise la société 6 millions d'euros.

La situation se complique quand FemmeOnline doit préparer le deuxième tour de table prévu dans son business plan. Aucune banque d'affaires n'accepte alors de s'occuper du dossier. "La situation était bloquée, se souvient Thierry Bartin. PPR Interactive ne voulait ni acheter ni vendre ses parts, et aucun leveur de fonds n'a voulu mettre le pied dans ce conflit". Face à ce blocage, la trésorerie devenant de plus en plus maigre, il décide de déclarer la société en liquidation. S'ensuit alors une myriade de batailles juridiques. En sept ans, 13 procédures opposeront les deux parties. Accusé de faute de gestion, tromperie, abus de biens sociaux, abus de crédits ou abus de pouvoirs, Thierry Bertin les a toutes gagnées. Contacté par le JournalduNet, PPR n'a pas souhaité faire de commentaires.

En juin 2007, PPR a été condamné à payer 170.000 euros à la société. Une somme dont il touchera d'ailleurs la moitié en tant qu'actionnaire principal. Pour Thierry Bartin, cette histoire est un gâchis. Aujourd'hui, la société FemmeOnline n'est plus qu'une coquille vide après avoir atteint la deuxième place du marché. De quoi donner des regrets. Car entre temps, AuFeminin s'est fait racheté par le groupe Axel Springer sur la base d'une valorisation de 284 millions d'euros (lire l'article : AuFeminin.com racheté par le géant allemand Axel Springer, du 28/06/07). Combien aurait pu se revendre FemmeOnline ? "Même avec 15 % de parts de marché, au moins 30 millions d'euros, estime Thierry Bartin. Ils sont passé à côté d'une très belle affaire."