L'Arcep demande un délai d'application de la loi antipiratage

Le régulateur des télécoms pointe plusieurs failles sur le projet de loi Hadopi. L'Arcep veut notamment laisser aux FAI le temps de mettre en oeuvre les dispositifs que leur impose la loi.

A quelques jours de sa présentation en conseil des ministres, le 11 juin, le projet de loi de lutte contre le piratage issu de l'accord Olivennes recèle quelques incohérences juridiques. C'est ce que note l'Arcep, dans un avis consultatif récemment rendu sur le texte, révèle Les Echos. Loin d'être une contestation philosophique du projet de loi Hadopi qui doit être examiné au Sénat en juillet, ce document se contente de pointer plusieurs difficultés techniques qui risqueraient de se poser s'il venait à être adopté en l'état.

En premier lieu, l'absence dans le texte actuel d'un délai prévu entre la publication de la loi et sa mise en application. Cette recommandation vise à permettre aux fournisseurs d'accès de disposer de suffisamment de temps pour modifier leurs outils et systèmes d'information. Ces derniers, qui vont devoir mettre en œuvre le dispositif de riposte graduée, pourraient avoir besoin d'environ neuf mois pour se mettre en conformité avec la nouvelle loi. En l'absence d'un tel délai, l'Arcep note que les FAI "risquent d'être sanctionnés financièrement".

Autre absence pointée par le gendarme des télécommunications : celle d'une compensation financière pour les surcoûts entraînés par les nombreuses obligations faites aux FAI. Ils devront notamment tenir à disposition de l'autorité chargée de sanctionner les pirates (la Hadopi) l'ensemble des données relatives à leurs abonnés pendant une période d'une année. Selon l'Arcep, les coûts entraînés par ces mesures ne peuvent être à la charge des opérateurs, au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Le régulateur suggère donc de "prévoir le principe d'une juste rémunération des FAI".

Enfin, l'avis de l'Arcep pointe le paradoxe juridique dans lequel seraient placés les FAI sommés de suspendre l'abonnement triple play d'un internaute pirate. Car en coupant, même temporairement ce service à des abonnés, les fournisseurs ne respecteraient pas législation existante qui leur impose "d'assurer de manière permanente et continue l'exploitation des services de communications". Sommé par l'Hadopi de couper la ligne d'un pirate récalcitrant, un FAI s'exposerait à des sanctions administratives et pénales. Bien avisée de pointer cette incohérence législative, l'Arcep ne se risque cependant pas à avancer de solution à ce problème.