Répit pour Dailymotion avant d'autres turbulences judiciaires

La plate-forme vidéo sort indemne de deux procédures l'opposant à Jean-Yves Lafesse et Omar et Fred. Elle n'est cependant pas au bout de ses démêlés judiciaires : TF1, Calt et Roland Magdane l'ont déjà assigné.

La journée du 15 avril s'est terminée par un grand "ouf" chez Dailymotion. Le site de partage de vidéos, assigné tour à tour par Jean-Yves Lafesse et le duo Omar et Fred, a été reconnu dans ces deux procédures comme n'étant pas responsable des contenus postés sur sa plate-forme. Le tribunal de grande instance de Paris a débouté les humoristes de leurs demandes de dommages et intérêts pour contrefaçon, condamnant même Omar et Fred à prendre à leur charge 5.000 euros de frais de justice.

"Notre victoire réside dans la reconnaissance de notre statut d'hébergeur", se félicite le directeur juridique et réglementaire de Dailymotion, Giuseppe De Martino. La loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN) du 21 juin 2004 protège par défaut les sites communautaires en leur accordant un statut d'hébergeur, c'est-à-dire non responsable des contenus publiés.

Dailymotion s'est cependant fait taper sur les doigts pour n'avoir pas retiré à temps des vidéos de Jean-Yves Lafesse dans des délais acceptables. Selon Giuseppe De Martino, seule une vidéo sur les 295 constatées par Jean-Yves Lafesse serait passée entre les mailles du filet de la plate-forme. Punition : 5.000 euros de dommages et intérêts, une somme anecdotique à côté des 5 millions d'euros réclamés par le plaignant. Omar et Fred demandaient pour leur part 600.000 euros.

Ces deux décision rendues coup sur coup confortent en tout cas l'entreprise française, qui doit encore faire face à plusieurs plaintes. Dernière en date, celle du comédien Roland Magdane, qui demande 900.000 euros au site pour contrefaçon et concurrence déloyale. La société Calt Production a également ouvert mi-mars deux procédures à l'encontre de Dailymotion (lire "Nous portons plainte contre Dailymotion et attaquerons bientôt Youtube", du 17/03/08) pour diffusion illicite de ses émissions Caméra Café et Kaamelott devant le tribunal de grande instance et le tribunal de commerce de Paris.

TF1 a par ailleurs assigné le site français en décembre 2007 (lire TF1 aurait décidé de porter plainte contre YouTube et Dailymotion, du 17/12/08). La Une lui reproche notamment le piratage de sa série phare Heroes, et demande près de 39 millions de dommages-intérêts. Egalement assigné depuis la semaine dernière, YouTube se voit réclamer 100 millions d'euros.

L'issue du combat entre TF1 et Dailymotion devrait peser sur les intentions d'un autre acteur de l'audiovisuel : France Télévisions. Depuis plusieurs mois, le groupe réfléchit à l'opportunité d'une réaction judiciaire (lire "L'heure de la riposte contre les sites d'échange vidéo est venue", du 11/01/08). Aucune décision de poursuite n'a encore été prise par la holding des chaînes publiques, mais "une condamnation de la plate-forme vidéo par TF1 constituerait un signal fort pour une éventuelle procédure", note Pierre Mathieu, directeur des antennes Internet de France Télévisions Interactive.

Une telle plainte ne concernerait cependant que des faits passés : le groupe public a passé en janvier un partenariat avec l'Ina pour utiliser sa solution d'empreintes numériques pour contenus vidéos, qu'utilise également Dailymotion. Un audit réalisé par France Télévisions en 2007 a toutefois estimé que l'ensemble des contenus piratés sur les différentes chaînes du groupe aurait été vu 230 millions de fois sur YouTube et Dailymotion.

De son côté, Dailymotion se montre confiant. A quatre reprises la justice a reconnu la qualité d'hébergeur du site, avance Giuseppe De Martino comme argument dissuasif face à d'éventuelles menaces supplémentaires. Le directeur juridique du site insiste également sur les efforts réalisés pour travailler avec les ayants-droit, via les solutions de filtrage d'Audible et de l'Ina. "On peut continuer à nous chercher des poux, mais on ne peut plus dire que nous ne sommes pas de bonne foi", conclut-il.