Capital-risqueurs cherchent avenir désespérément Une rupture du cycle de financement des start-up

jean-david chamboredon, président exécutif d'isai gestion
Jean-DAvid Chamboredon, président exécutif d'Isai Gestion © S. de P. Isai

Si les investisseurs accusent le coup, les premières victimes restent les start-up puisque "c'est l'ensemble de la chaîne de financement de l'innovation qui est touchée", précise Jean-David Chamboredon, qui dirige le fonds d'investissement Isai. Investissant des petits tickets en amorçage, "les business angels vont mettre le pied sur le frein dans l'hypothèse d'une nouvelle révision de la loi TEPA, ce qui raréfiera les dossiers que les investisseurs auront en main par la suite". Et d'ajouter que "dans les faits, un investissement en amorçage de la part de business angels dans une start-up permet de conforter l'attractivité du modèle de cette dernière", ce qui incite davantage les fonds à investir dans certaines PME.


Les fonds d'investissement s'interrogent alors sur la gestion de leur capitaux : "Va-t-on devoir réaliser dix nouveaux deals par an ou cinq uniquement, dans l'idée de garder des réserves pour les réinvestir dans nos sociétés ? La réalité est qu'un fonds d'investissement n'a pas de raison d'être s'il n'accompagne pas ses sociétés sur le long terme" ajoute Jean-David Chamboredon. On entre alors dans un cercle vicieux qui peut fortement nuire à la compétitivité de notre pays et à donc à l'emploi dans les technologies de l'information et de la communication.


L'argent public pour compenser le défaut de financement de l'innovation ?

 

françois lainée, directeur associé d'auriga partners
François Lainée, directeur associé d'Auriga Partners © S. de P. Auriga Partners

En 2007, les investissements de l'Etat représentaient 10% de l'investissement en capital-risque. Chiffre qui est aujourd'hui monté à 50%, ne permettant toutefois pas de combler les manques de capitaux. Mais pour François Lainée, chez Auriga Partners, la bonne à question n'est pas tant de savoir comment il faut soutenir l'industrie du capital-risque, mais bien comment financer l'innovation. Pour lui, "l'argent public est indispensable et la réflexion repose notamment dans la définition des critères d'allocation". Car ces fonds publics sont "non seulement plus difficiles à allouer, mais également à investir. Un vrai casse-tête tant pour les investisseurs que pour les pouvoirs publics, d'autant plus que ces derniers n'ont pas d'intentions homogènes d'investissements. Une conséquence de la disparité des acteurs intervenant dans le financement de l'innovation, qu'ils soient européens, nationaux et régionaux".

Sabine Fillias, associée chez Chausson Finance, estime à ce titre que les discussions actuels autour des priorités du Fonds national d'amorçage (FNA) tendent à instaurer des critères de sélection d'investissements tellement précis qu'il n'est pas évident que les "LPs", autrement dit les investisseurs institutionnels, soient eux-mêmes intéressés par ces fonds.


L'exemple britannique



"On se rend compte que la France prend le chemin inverse de celui emprunté par le Royaume-Uni. Les discussions sur la loi équivalente à notre loi TEPA ont conclu qu'il fallait augmenter les montants déductibles d'impôts" note Jean-David Chamboredon. Le gouvernement britannique a d'ailleurs décidé de renforcer ses investissements dans les fonds d'investissement, ayant bien compris que le soutien à la croissance est essentiel en période de crise. Si la politique britannique fait preuve d'une austérité certaine, le pays continue cependant de capitaliser sur les sociétés à fort potentiel, espérant trouver des leviers de compétitivité.

Pour François Lainée, "Il faut prendre davantage en compte la dimension internationale de notre industrie". Il considère à ce titre que la compétition internationale entre les fonds d'investissements s'accélère. "Et notamment en Chine, dont la croissance des fonds d'investissement est sans précédent. Il faut donc garder en tête que les investisseurs institutionnels arbitrent l'allocation de leurs capitaux en fonction de la performance des fonds". Et ces derniers n'hésiteront donc pas à privilégier des pays extérieurs au continent européen...