Comment Hollande et Sarkozy voient-ils l'avenir du numérique ?

Comment Hollande et Sarkozy voient-ils l'avenir du numérique ? A huit jours du second tour, découvrez les programmes numériques de François Hollande et de Nicolas Sarkozy présentés par Fleur Pellerin et Nicolas Princen.

A l'occasion d'un débat à la Gaîté Lyrique organisé par le Collectif du numérique, les conseillers PS et UMP, Fleur Pellerin et Nicolas Princen, ont présenté les programmes de François Hollande et de Nicolas Sarkozy sur le numérique. Le Journal du Net en dresse le bilan, point par point.

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Nicolas Princen (UMP) et Fleur Pellerin (PS) le 26 avril 2012 à la Gaîté Lyrique © Hugo Sédouramane / Journal du net

Infrastructures : un objectif partagé sur un calendrier décalé

PS : L'objectif est de couvrir 100% du territoire français en Très Haut Débit dans 10 ans, ce qui nécessite 25 à 30 milliards d'euros d'investissements.  Le financement résultera d'une concertation entre l'Etat, les collectivités territoriales et les opérateurs et devra faire l'objet d'une décision très rapide. Fleur Pellerin a également indiqué que le PS souhaite remettre à plat la fiscalité des FAI.

UMP : Le calendrier de l'UMP est plus ambitieux puisque l'objectif est de couvrir 100% du territoire d'ici 2017. Nicolas Princen a félicité les opérateurs et a indiqué que le financement d'un tel déploiement se fera via  des Partenariats Publics-Privés. Pour lui, il il ne faut pas sacrifier la capacité d'investissement des FAI au profit du pouvoir d'achat des français.

Hadopi et commission copie-privée : l'UMP reste discret

PS : Le parti socialiste prévoit un élargissement du dispositif Hadopi au streaming. Côté copie-privée, Fleur Pellerin a évoqué une remise à plat de la commission copie-privé, "en imaginant par exemple en abaisser son taux et diminuer son assiette, mais en étendant son périmètre d'application, notamment au cloud compiting".

UMP : Dans sa réponse écrite au Collectif du numérique, Nicolas Sarkozy ne mentionne nulle part l'Hadopi. Nicolas Princen a indiqué que le candidat sortant est "toujours autant engagé quant à la défense de la propriété intellectuelle". L'UMP ne fournit pas davantage de précision quant aux dispositifs à venir en cas de réélection de Nicolas Sarkozy.

Formation et emploi : match nul ?

Nouvel entrant dans le débat concernant l'économie numérique, la question de la formation et de la formation professionnelle au numérique a pris une place conséquente dans les préoccupations des candidats.

PS : Constatant des pénuries de main d'œuvre pour certains postes de développeurs et paradoxalement du chômage pour d'autres, le parti socialiste propose d'intégrer le numérique sous la forme d'une matière au lycée général et professionnel. "Mais la réflexion dans son ensemble doit se reposer sur le rôle central de l'enseignement" a souligné Fleur Pellerin, qui ajoute qu'au niveau universitaire, "l'Etat devra encourager la création d'incubateurs et des investissements dans ces start-up qui pourront bénéficier d'investissements permis grâce à une réorientation du Fonds national pour la société numérique (FSN)". Le PS s'engage également à abroger la circulaire Guéant, qui avait été critiquée par certaines sociétés de l'écosystème.

UMP : Nicolas Princen estime qu'il faut profiter de la force du numérique pour créer de nouvelles filières de formation, afin d'améliorer l'employabilité des diplômés. Il propose ainsi une réforme de la formation professionnelle et la création d'un bac numérique "pour combler les 70 000 emplois non pourvus dans le secteur". Il précise que les lycéens "auront dès la rentrée prochaine une option numérique s'ils préparent un baccalauréat scientifique ou technologique". L'UMP maintient l'idée que le rôle des universités et de leur autonomie est majeur dans l'attractivité du numérique en France et que si Nicolas Sarkozy est réélu, le gouvernement travaillera main dans la main avec les universités quant à la création de nouvelles formations spécifiques, comme dans le cloud computing et dans l'open data.

Accompagnement des start-up : des ambitions globalement communes

Les deux partis entendent maintenir le statut de Jeune entreprise innovante (JEI) et le Crédit d'impôt recherche (CIR), pour lequel ils ont tous deux apporté quelques précisions.

PS : La poursuite du Crédit d'impôt doit prendre davantage en compte les PME via une redéfinition des critères d'attribution. La gauche souhaite également voir les démarches d'accès facilitées. Le PS maintient son idée de créer une banque publique d'investissement. Cette création nécessitera en amont un audit des modalités du grand emprunt et du FSN afin de permettre à l'Etat d'appréhender les instruments d'investissements nécessaires. Fleur Pellerin estime également que le Fonds national d'amorçage "est un vrai sujet", sans pour autant en préciser les tenants et aboutissants. Elle ajoute qu'il faudra surtout définir deux ou trois secteurs d'investissement prioritaires comme par exemple la e-santé "pour faire du numérique une filière d'excellence en France".

UMP : Pour les sociétés n'ayant pas la trésorerie suffisante, l'UMP propose que leur Crédit d'impôt recherche leur soit avancé par Oséo. Nicolas Princen a évoqué à nouveau la création du programme national Start-up France impulsé par le Conseil national du numérique. Son objectif est d'offrir un guichet unique pour les aides à destinations des entrepreneurs, un portail d'information et d'établir un réseau entre les entrepreneurs expatriés et ceux domiciliés en France. Si Nicolas Sarkozy est réélu, il prévoit également une remise à plat des dispositif FIP/FCPI et de la loi TEPA. Si Nicolas Princen a indiqué qu'il y travaillait avec le CNNum mais "qu'il est encore trop tôt pour en parler".

Droit sur Internet et respect de la vie privée : l'UMP botte en touche

PS : "Nous souhaitons mettre en place un habeas corpus du numérique" a déclaré Fleur Pellerin, en expliquant que si François Hollande devient président de la république, les internautes auront certaines de leurs libertés garanties et ce via le renforcement de la CNIL.

UMP : Ni Nicolas Princen ni la réponse écrite de Nicolas Sarkozy au Collectif du numérique n'ont mentionné l'un de ces deux points.

Fiscalité du numérique : le PS encore trop imprécis

PS : Fleur Pellerin a à nouveau mentionné la fiscalité des géants du web car "Google et les autres doivent contribuer à la création de la valeur" mais n'a pas évoqué les mécanismes fiscaux envisagés par le PS.

UMP : Dans sa réponse écrite au Collectif du numérique, Nicolas Sarkozy "souhaite une fiscalité équitable en France et en Europe, aussi bien en ce qui concerne la TVA que sur l'impôt sur les sociétés". Le candidat Sarkozy reprend ainsi les recommandations du CNNum de créer un statut d'établissement stable virtuel afin que les sociétés dont les sièges sont domiciliés à l'étranger soient assujetties à l'impôt sur les sociétés. Il réintroduit également l'idée de la mise en place du cycle commercial complet pour taxer les bénéfices des acteurs étrangers.

Quelle organisation pour mener les réformes ?

PS : Fleur Pellerin estime que le déploiement d'une stratégie numérique nationale devra passer par la création d'un réseau de conseillers spéciaux au numérique au sein de chaque administration. Ne s'opposant pas au maintien du secrétariat d'état existant, elle juge toutefois "que la volonté de faire exister le numérique en France doit être également portée par des personnes bénéficiant de l'attention du président de la république et du premier ministre".

UMP : Pour Nicolas Princen, c'est "davantage les compétences de certains individus qui comptent". Il n'envisage toutefois pas le Ministère de l'économie des finances et de l'industrie sans volet numérique et propose la création d'une agence de l'Etat dédiée à l'innovation, sans pour autant en préciser les ressources dont elle pourrait disposer. Elle permettrait "d'avoir une vision transversale pour identifier les nouvelles filières à créer dans les services de l'Etat".