Sahil Lavingia (Fondateur de Gumroad) ... et fonde Gumroad à 18 ans, une start-up "disruptive"

Vous avez quitté Pinterest fin 2011 pour créer votre propre start-up, Gumroad. Quel est ce projet ?

Le concept est assez simple, il part du principe que chacun devrait être capable de vendre des choses sur Internet aussi simplement que l'on partage des liens. Gumroad est un système de paiement lié à un bien virtuel. Nous créons un lien raccourci lié à un produit . Ce lien peut ensuite être partagé par son propriétaire qui s'en sert pour le vendre. Une fois le produit payé, l'acheteur a alors accès au bien virtuel et peut le télécharger. Avec Gumroad, chacun est aujourd'hui capable de vendre des biens virtuels à sa communauté de fans. Concrètement, vendre une chanson devrait être aussi facile que de partager un lien ou une photo avec ses followers sur Twitter. Pourtant, aujourd'hui, il faut passer par iTunes et y perdre 30%.

Est-il exact que vous avez développé Gumroad en 48 heures  ?

Oui, c'est vrai. J'ai développé le premier prototype en un week-end au cours du mois d'avril 2011. Nous avons ouvert notre version au public il y a 3 semaines seulement.

Pouvez-vous donner quelques exemples de ce qu'on peut vendre avec Gumroad ?

Vous pouvez vendre n'importe quel fichier virtuel. Cela peut donc inclure des fichiers vidéo ou audio comme des podcasts ou de la musique. Vous pouvez également vendre des paroles de chanson, des livres, ou encore votre position géographique en vendant le lien Google Map. En fait nous n'imposons pas de restriction, tout ce que vous souhaitez vendre et qui est rattaché à un lien URL peut être vendu.

Ce qui suppose tout de même que le vendeur est propriétaire de ce contenu. Comment Gumroad s'en assure-t-il ?

Tout d'abord Gumroad n'est pas une place de marché et nous ne vendons rien nous-même. Il s'agit bien d'un outil qui vous laisse vendre directement à vos fans sur Facebook, vos followers sur Twitter ou encore aux abonnés de votre newsletter. Cela suppose que d'une certaine façon vous pourrez difficilement vendre quelque chose qui ne vous appartient pas sans que votre communauté ne s'en aperçoive. Car contrairement à iTunes, Gumroad s'appuie sur des relations qui existent déjà. Enfin, si la situation se produit, nous supprimons au cas par cas le contenu.

Comment gagnez-vous de l'argent ?

Nous prenons 5% sur chaque transaction. C'est un modèle bien moins couteux pour l'utilisateur que le modèle d'iTunes par exemple qui garde 30% du montant de la vente. La société est encore très jeune et n'est donc pas encore rentable. Nous nous concentrons pour le moment sur l'idée de construire le meilleur service possible tout en obtenant des feedbacks afin de l'améliorer. Je ne pense pas qu'il nous sera très difficile de devenir rentable à terme car notre business model est clair et nous permettra de gagner de l'argent au fur et à mesure de notre croissance.

Quel est le profil des utilisateurs de Gumroad ?

Nos utilisateurs sont des créatifs, bien souvent très portés sur les nouvelles technologies et qui ont pour la plupart entre 20 et 30 ans. Gumroad est utilisé par tous ceux qui utilisent leur ordinateur pour produire du contenu, que ce soit pour enregistrer une musique, une vidéo ou encore pour écrire ou produire du contenu graphique comme le font certains sur Photoshop. D'une manière générale, nous observons que nos utilisateurs utilisent leurs temps libre pour faire ce qu'ils font déjà dans leurs entreprises. Nous leur donnons donc l'occasion de vendre ce qu'ils font par plaisir, plutôt que de ne rien en faire.

Est-ce qu'un utilisateur peut vraiment gagner beaucoup d'argent avec Gumroad ?

C'est en fait très varié car cela dépend vraiment du profil de l'utilisateur, de son utilisation de Gumroad mais aussi de la taille de sa communauté. Certains d'entre eux font déjà quelques milliers de dollars par mois grâce au service. Mais je pense que Gumroad est encore trop jeune pour avoir une idée précise de son potentiel.

Avez-vous déjà levé des fonds pour financer le développement de Gumroad ?

Oui. Après avoir développé le premier prototype, le service commençait à être utilisé par de plus en plus d'utilisateurs. J'ai alors réalisé qu'il pouvait devenir plus qu'un simple projet annexe. J'en ai donc parlé à quelques business angels et VCs et nous avons finalement levé près d'1,1 million de dollars en octobre dernier, auprès d'investisseurs tels que Chris Sacca, Max Levchin (Paypal) ou encore le fond Accel Partners.

Cet argent servira-t-il à mettre en place une véritable stratégie à l'international ?

J'espère qu'en effet nous pourrons nous déployer à l'international très bientôt. Le service est déjà disponible en anglais, en japonais et en allemand. Mais la majeure partie de cet argent servira surtout à recruter. Comme beaucoup de sociétés, nous cherchons à recruter les meilleurs pour bâtir la meilleure équipe possible. Nous sommes pour le moment seulement 2 à travailler sur Gumroad mais nous serons bientôt une équipe de 3 à 5 collaborateurs. Je tiens vraiment à garder l'équipe petite et opérationnelle car je pense qu'aujourd'hui plus que jamais, il est possible de faire beaucoup avec peu de personnes. Une entreprise n'a plus besoin d'une centaine de personnes pour se lancer à l'international.

Quelques chiffres concernant le trafic utilisateur?

Nous avons lancé notre première version il y a moins de 3 semaines donc c'est encore un peu trop récent pour en parler mais je peux vous dire que c'est assez significatif et que cela se compte en centaines de milliers. Le trafic est en fait assez international, avec des utilisateurs en provenance bien sûr des Etats-Unis, mais aussi de pays comme le Brésil, l'Allemagne, l'Angleterre ou encore le Japon.

Allez-vous étendre le service à la vente d'objets physiques ? A priori rien ne l'empêche...

C'est une bonne question et je pense que nous y viendrons dans les prochains mois. Le marché des biens physiques est en effet largement plus grand que le marché des biens virtuels, et je pense que tout comme certains créent des chansons, ceux qui créent des objets doivent pouvoir les vendre de manière simple sur la toile. Cependant je ne veux pas précipiter les choses car je veux être certain que nous le ferons de la meilleure façon possible. Cela n'est pas sans risque et il nous faudra prendre en compte de nouveaux éléments, comme les aspects de logistique ou de remboursement d'un utilisateur, qui diffèrent lorsque l'on vend un bien physique ou un fichier virtuel.