INTERVIEW 
 
Michel Gotlib
Directeur commercial et marketing services
Coca-Cola France
Michel Gotlib
"Nos investissements digitaux seront 2,5 fois plus importants en 2007 qu'en 2006"
Où en sont les marques de grande consommation en matière de communication en ligne ? Pour
Coca-Cola, l'interactivité est au centre de la stratégie. Le directeur commercial et marketing services de Coca-Cola France détaille sa politique et revient sur les grandes campagnes des marques du groupe.
(18/05/2007)
 
JDN. Comment définissez-vous la stratégie du groupe Coca-Cola sur Internet ?
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 Michel Gotlib
  Le site
Coca-cola.fr
Michel Gotlib. La Compagnie Coca-Cola vient de fêter ses 120 ans avec une présence dans plus de 200 pays et un portefeuille de plus de 200 marques de boissons. Notre métier est d'abord et avant tout de créer de la valeur pour ces marques en répondant au mieux aux attentes des consommateurs. Nous connaissons actuellement une période de forte croissance, qui repose entre autres sur de nouveaux modes de conversation et de communication que nous engageons désormais avec nos consommateurs.

Internet modifie en profondeur la relation entre une marque et son public et il est essentiel de bien appréhender les enjeux de l'interactivité. Le consommateur possède un pouvoir très important qu'il n'avait pas il y a quelques années, qui l'amène à choisir et à consommer les marques de manière fondamentalement différente.

Notre stratégie en matière d'Internet et de manière plus large d'interactivité repose sur une idée simple : l'enjeu est de passer d'une logique de communication unilatérale à une logique de véritable dialogue en adaptant le contenu de nos messages aux nouveaux modes de communication. Le Web nous permet d'engager ce dialogue de manière innovante et une marque comme Coca-Cola, de par son histoire et ses valeurs, possède une forte légitimité pour dialoguer avec son public. En résumé, l'interactivité occupe aujourd'hui une place stratégique dans notre approche marketing et les enjeux qu'elle présente sont pour nous de véritables opportunités d'innover et de nous différencier.

Quelle place assignez-vous aux médias interactifs dans votre stratégie média ?
Coca-Cola France a été en 2006 le premier investisseur sur le Net dans le secteur des produits de grande consommation et cette évolution va se poursuivre pour les prochaines années. Notre stratégie média a évolué de manière significative depuis quelques années, nous permettant d'avoir aujourd'hui un mix-media qui reflète assez bien le temps de consommation des media de nos cibles et prioritairement les jeunes. Bien évidemment, les médias interactifs y occupent une place centrale. L'interactivité de manière plus large est pilotée de manière transversale : elle ne vient pas en remplacement d'autres initiatives marketing, elle est au centre de la stratégie. Si Internet est un complément aux autres médias, tout média peut devenir interactif. Dès la conception d'une nouvelle plate-forme de communication, comme ce fut récemment le cas pour le lancement de Coca-Cola Zero ou pour le partenariat entre la marque Coca-Cola light et Olivia Ruiz, nous réfléchissons au rôle de l'interactivité. La question est toujours la même : comment instaurer un véritable dialogue avec le public autour des valeurs de nos marques.

Comment cela se traduit-il dans l'allocation des budgets en France ?
Sur la marque Coca-Cola, le digital en 2007 représentera plus de 20 % du mix média ."
Nos investissements digitaux - Internet et mobile - seront 2,5 fois plus importants en 2007 qu'en 2006. Sur la marque Coca Cola, le digital va représenter plus de 20 % du mix média en 2007, soit deux fois plus qu'en 2006. Sur l'ensemble de nos marques en 2007, 14 à 15 % du mix va être consacré aux médias digitaux. Ceci est possible car nous sommes une entreprise en croissance et nos investissements média continuent à progresser. En effet, la télévision continue à occuper une place prépondérante dans notre mix, plus de 50 %, et possède plus que jamais un rôle majeur pour le développement de nos marques et la diffusion de nos messages.

Qu'est-ce que l'interactivité a changé dans votre manière de faire du marketing ?
Beaucoup de choses ! A la fois en interne et en externe. Le nouveau rapport entre les marques et le consommateur a des impacts sur notre organisation en interne en favorisant la notion de transversalité et de collaboration. Nous avons mis en place un comité de pilotage Internet il y a un an et demi, dont la mission est de définir la stratégie interactive de l'entreprise et la feuille de route pour y parvenir. Y participent notre président Christian Polge, la majorité des membres du comité de direction et les équipes marketing, communication, études et ressources humaines. La formation est également un axe de travail important permettant de toujours mieux appréhender les enjeux de l'interactivité. Pour l'externe, nous mettons en place de nouvelles relations avec nos partenaires agences. FullSix et Isobar pour Internet, Screentonic pour le marketing mobile, et Xeres pour le conseil en stratégies interactives participent à nos comités opérationnels.

Comment mesurez-vous l'impact de vos actions de communication en ligne ?
Coca-Cola.fr, a enregistré plus de 900.000 visiteurs uniques en décembre."
Dans un contexte de multiplication des messages adressés chaque jour aux consommateurs, nous cherchons à optimiser la pertinence et l'efficacité de nos actions et à mieux comprendre le rôle des points de contacts utilisés. Les modèles de mesure d'efficacité doivent également être réinventés et ce n'est pas un chantier facile ! Nous mesurons aujourd'hui plus d'une trentaine de points de contact et leur contribution au résultat final, de la télévision au Web, en passant par le packaging. De manière simplifiée, cette contribution mesure les volumes et la préférence de marque. Sur Internet et le mobile, nous mesurons bien sûr le trafic. En décembre, sur le site Coca-Cola.fr, nous avons enregistré plus de 900.000 visiteurs uniques selon Nielsen NetRatings et dépassons aujourd'hui le million de visiteurs uniques par mois. Nous cherchons également à identifier la contribution de chaque initiative aux indicateurs de préférence de marque classiques. La durée de visite est également un indicateur permettant de mesurer l'attractivité des contenus proposés par nos sites.

Quelles sont vos recettes ?
Nous sommes convaincus que la relation entre une marque et son public se construit dans la durée et qu'elle doit partir de valeurs fortes et partagées. Nous cherchons à être les plus fidèles possible au positionnement de la marque et à trouver les modes d'expression les plus innovants pour s'adresser à nos cibles. Une marque comme Coca-Cola a bâti son développement autour des valeurs de convivialité et d'optimisme. Nous devons entrer en relation à partir de ces valeurs en proposant un contenu suffisamment riche et laissant une liberté d'expression à notre public. L'initiative Talent Coke sur Coca-Cola.fr a été conçue dans cet esprit. Le pilotage de l'interactivité et celui d'un site de marque nécessite une attention de tous les instants, une posture éditoriale, ce qui est nouveau pour nous, mais finalement proche de notre cœur de métier qui est aussi de créer des histoires autour de nos marques.

Néanmoins, sur Coca-cola.fr, on trouve des contenus de divertissement qui n'ont pas de lien direct avec le produit (création musicale, graphique...). Est-ce vraiment le rôle de la marque de divertir les internautes ?
Internet permet d'engager une relation encore plus riche"
La marque Coca-Cola a toujours été très impliquée dans les univers du sport, de la musique et du cinéma par de multiples associations et partenariats. En 2007, nous serons à nouveau associés à de nombreux événements comme la Coupe du Monde de Rugby, des festivals de musique, des lieux emblématiques comme l'Olympia et le Stade de France, et cet historique d'engagement nous donne une légitimité importante dans ces univers pour proposer des contenus et engager un dialogue avec le public. Internet enrichit le contenu visuel et l'environnement graphique autour de la marque. Ce média offre un champ d'expression plus large et permet d'engager une relation encore plus riche.

Parlons du dispositif Talents Coke, par lequel Coca propose de faire découvrir de jeunes talents européens, en partenariat avec iTunes. Quels en sont les retours ?
Avec Talent Coke, nous mettons notre notoriété au service de la diffusion de nouveaux talents. La recherche de nouveaux talents n'est pas notre métier. Ce que nous amenons, c'est la mise en relation entre ces nouveaux talents et le grand public. L'association avec iTunes est une formidable opportunité de concilier monde réel et monde virtuel sur le thème de la musique. Plus de 1.000 titres ont déjà été déposés en France et en Europe. Nous allons aussi offrir à certains groupes la possibilité de rencontrer leur public en s'exprimant sur des scènes de festivals en France et en Europe. En tant que marque faisant partie de la culture populaire, il est intéressant de nous associer à ce type d'initiatives.

Pensez-vous que ce type d'opération change l'attitude des consommateurs vis-à-vis de la marque ?
J'en suis convaincu, à partir du moment ou l'on s'exprime en affinité avec une cible en proposant un contenu qualitatif apportant une véritable valeur ajoutée. Je ferais le parallèle avec la relation que nous avons avec le public dans l'univers du football. Nous sommes passés de simples publicités sur les panneaux d'affichage autour des terrains il ya dix ans, à un véritable accompagnement des clubs amateurs. Nous avons apporté à plus de 10.000 clubs depuis sept ans plus de 500.000 équipements pour la pratique de ce sport en partenariat avec la Fédération Française de Football. Et aujourd'hui, les footballeurs amateurs considèrent Coca-Cola comme une marque légitime dans leur univers.

Et pour les marques autres que Coca-Cola, l'utilisation des médias interactifs est-elle envisagée de la même manière ?
Il faut aller toujours plus vite dans notre prise de décision pour rester à l'avant-garde"
Fanta, Sprite, Powerade ou Burn ont toutes une cible jeune et des territoires très forts : l'imagination et l'audace pour Fanta, la fraîcheur et l'authenticité pour Sprite, le sport pour Powerade, le monde de la nuit pour Burn. Ces univers sont bien sûr déclinables dans la communication interactive.

Votre communication en ligne est plutôt innovante. Le groupe a-t-il toujours pris des risques et innové sur les médias apparus au fur et à mesure ?
Nous cherchons toujours à apprendre lorsque de nouveaux médias apparaissent. Dans les années 40 ou 50, Coca-Cola était en avance sur l'affichage, qu'il a toujours considéré comme un média de proximité. Le groupe travaillait à l'époque avec des artistes pour que les créations de ses affiches soient le reflet de la culture populaire. Aujourd'hui, il faut aller toujours plus vite dans notre prise de décision pour rester à l'avant-garde. Et s'il nous arrive de prendre de mauvaises décisions, nous cherchons à apprendre de nos échecs.

Pouvez-vous citer un de ces échecs ? Quelle analyse en faites-vous ?
Nous avons mis en place en 2003 une opération de promotion appelée "Coke Up To You", dont le centre de gravité était Internet et qui proposait aux consommateurs des dotations très attractives. Innovante dans son contenu, conçue avec un système de codage unique, elle s'est révélée trop complexe et coûteuse à mettre en œuvre à l'époque et nous avons du l'arrêter en cours de route. Le principal enseignement en tant que marque de grande consommation est d'utiliser les technologies qui sont suffisamment diffusées et utilisées par le grand public. Ne pas être prêt trop tôt…

Quelle est votre approche du marketing mobile ?
Nous avons mené de nombreuses initiatives en ce sens, notamment dans le cadre de la campagne Happiness Factory (lire l'article Coca-Cola investit dans le marketing mobile pour toucher les jeunes du 27/12/06). Nous avons lancé en mars 2006 un site Wap permanent, sur lequel nous avons enregistré 150.000 visites sur l'année, et plus de 100.000 téléchargements de publicités ou de jeux.

Quelles grosses campagnes sont prévues cette année ?
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 Michel Gotlib
  Le site
Coca-cola.fr
Nous avons réalisé un film d'animation parodiant le jeu vidéo best-seller GTA, diffusé uniquement sur Internet à partir du 6 avril. Nous avons lancé cette campagne aux Etats-Unis et sa notoriété auprès des Français de 12-25 ans était déjà de 11 %, avant son lancement en France ! La campagne de lancement de Burn est également en cours. Pour Coca-Cola Zero, nous avons créé un site produit. Idem pour Coca-Cola Blak. Quant à Fanta et Sprite, elles seront parmi les marques les plus actives sur le Net cette année, avec un nouveau site de marque. Powerade prendra la parole au moment de la Coupe du Monde de Rugby. De nombreux partenariats vont prochainement être lancés dans les jours à venir sur le thème de la musique avec Skyrock et My Space, sur le sport avec Yahoo, et sur d'autres thèmes encore avec MSN et AuFéminin.com.

Testez-vous vos campagnes en ligne avant de les diffuser ?
Oui, et nous réalisons aussi des post-tests, dans cette même logique de mesure de points de contact.
 
 
Propos recueillis par Raphaële KARAYAN, JDN

PARCOURS
 
 
Michel Gotlib, 41 ans, diplômé de l'ESCP, est rentré chez Coca-Cola en 1988 comme responsable du sponsoring. En 1992 il prend la direction du programme des Jeux Olympiques d'Albertville.

Après deux années passées en Amérique Centrale et en Afrique en tant consultant spécialisé dans les problématiques de développement dans les pays du Tiers-Monde, pour la Banque Mondiale et la Communauté Européenne, il revient en 1994 chez Coca-Cola où il a successivement occupé les fonctions de directeur de la Communication Corporate et de l'Environnement, puis de la Communication et du Marketing.

Michel Gotlib est aujourd'hui directeur commercial et marketing services pour Coca-Cola France.

  
 
 
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