Abandon de la 4ème licence 3G : l'Elysée teste l'opinion

L'Elysée serait prêt à ne plus attribuer la dernière licence 3G. Le cabinet du Président veut toutefois éviter que cette décision ne soit perçue comme un cadeau aux trois opérateurs, notamment Bouygues Telecom.

Coup de théâtre dans l'attribution de la quatrième et dernière licence 3G. Alors que l'avis favorable du Conseil d'Etat en février dernier sur l'étalement des paiements du prix de la fréquence avait donné le feu vert à un nouvel appel d'offres, l'Elysée aurait finalement décidé de faire marche arrière le 31 mars dernier, explique La Tribune.

Selon une source proche du dossier citée par le quotidien économique, "le paquet de fréquences hertziennes de la quatrième licence pourrait être saucissonné en plusieurs blocs attribués à différents acteurs. Une mise aux enchères de ces lots est envisagée." Le lobbying d'Orange, SFR et Bouygues Telecom pourrait donc avoir eu raison de la volonté de relancer la concurrence dans le secteur. Une volonté pourtant affichée par Bercy pour y tirer les prix à la baisse, mais aussi par l'Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), la commissaire européenne Viviane Reding, ou bien les consommateurs, par l'intermédiaire de l'UFC-Que Choisir. "Créer le même oligopole dans la 3G que celui qui existe déjà dans le GSM serait scandaleux du point de vue des consommateurs", estime Julien Dourgnon de l'UFC-Que Choisir.

Toutefois, la décision finale ne semble pas encore avoir été prise. "Rien n'a encore été arrêté par le gouvernement, toutes les options restent ouvertes et sont aujourd'hui analysées ", indique une source gouvernementale. Différentes options seraient toujours étudiées, comme l'attribution de la licence en un bloc, ou son découpage par blocs de 5 MHz et leur attribution entre le nouvel entrant et les opérateurs mobiles établis, qui gagneraient ainsi des capacités réseaux supplémentaires.

"L'Elysée teste la réaction de l'opinion face à une telle décision", explique un observateur. En effet, la présidence ne serait pas très chaude à l'entrée d'un nouvel opérateur. Mais le cabinet de Nicolas Sarkozy craindrait les conséquences d'une telle décision sur l'image du chef de l'Etat. "Cette affaire est potentiellement sulfureuse pour Nicolas Sarkozy qui pourrait être taxé de favoriser Martin Bouygues, avec lequel il ne cache pas sa très grande proximité (lire l'article du JDN Economie : Les grands patrons proches de Nicolas Sarkozy : Martin Bouygues, le meilleur ami). En faisant courir cette rumeur, l'Elysée veut s'assurer que cette décision ne se retournera pas contre le président."

Le risque est d'autant plus grand pour le chef de l'Etat que Bouygues Telecom serait le premier à pâtir du succès de Free dans le mobile. Et fermer la porte à Free ou à un opérateur qui baisserait les prix reviendrait à donner un sérieux coup de pouce à l'ensemble des acteurs en place, mais surtout à la filiale de Bouygues. Ainsi, selon Exane BNP Paribas, Free pourrait obtenir 10 %de parts de marché sur le mobile en 2015 en baissant de 4 euros la facture moyenne des abonnés. Ce qui entraînerait une baisse de la valorisation des trois opérateurs mobiles de 10 milliards d'euros. Une situation qui affaiblirait principalement le numéro trois du secteur avec 17 % de parts de marché. La décision de l'Elysée sera donc très lourde de conséquences. Et elle ne devrait plus tarder à être officialisée. Une réunion interministérielle prévue dans les 10 jours devrait permettre de faire la lumière sur les intentions de la présidence. En attendant, le directeur général d'Iliad-Free, Maxime Lombardini, le dit et le répète : "Free est plus que jamais candidat à la fonction de quatrième opérateur mobile pour les besoins du marché et des consommateurs."