Créa pub sur Snapchat : comment sortir du lot ?

Créa pub sur Snapchat : comment sortir du lot ? Alors que son IPO approche, Snapchat a ouvert son API publicitaire à tous les annonceurs. Entre autodérision et messages percutants, des experts en création média partagent leur recette.

En annonçant le 31 janvier qu'il ouvrait son API publicitaire à l'ensemble du marché, Snapchat a fait saliver bien des annonceurs. L'API de l'application de partage de contenus éphémères était jusque-là réservée à une centaine d'annonceurs partenaires. Et le ticket minimum pour pouvoir y diffuser une campagne s'élevait à une trentaine de milliers de dollars.

Un montant minimum qui a disparu depuis qu'Evan Spiegel a décidé de sauter le pas du programmatique. Tout annonceur qui travaille avec un service technologique certifié par Snapchat (Adaptly, Adglow, Kenshoo, Tubemogul, Videology…) peut désormais glisser ses publicités entre les contenus des stories des 300 millions d'utilisateurs de l'application. Sous réserve, bien évidemment, de remporter l'enchère.

Le format concerné est les Snap Ads, ces publicités présentées sous la forme d'une vidéo verticale de 10 secondes maximum, glissées entre les stories des utilisateurs et celles des médias partenaires. ils sont disponibles dans deux univers. Le premier est le pack "Discover" qui propose l'inventaire des médias partenaires de son service. Les impressions de ce pack sont trois à cinq fois plus chères que celles qui sont achetées au sein de l'inventaire UGC (user generated content), le second univers dans lequel sont proposées les Snap Ads.

Du contenu UGC... et des problèmes de brand safety 

"C'est le prix à payer pour être sûr de bénéficier d'un environnement qualitatif", précise Marina Coche, directrice display au sein de Dentsu Aegis Network. Royaume de l'éphémère, Snapchat peut en effet contenir des contenus "borderline" auxquels les marques préfèrent ne pas être associées. Pour préserver sa brand safety, l'acheteur Snapchat préfère donc souvent éviter d'être diffusé au sein des Stories des utilisateurs lambda. Client de Dentsu Aegis Network, l'Armée de l'Air entre, sans trop de surprise, dans cette catégorie.

Sur Snapchat, l'Armée de l'AIr joue la carte de la dérision. © S. de P. Dentsu Aegis

Le plus gros enjeu pour une marque qui s'essaie aux publicités Snapchat est de comprendre le langage de la plateforme. "Snapchat est d'un point de vue créatif complètement différent de ce que l'on retrouve sur Facebook et Instagram. C'est le royaume de l'autodérision. Les marques qui y pénètrent doivent accepter de se remettre en question, de jouer avec leur ADN et leur produit", conseille Pascal Crifo, la patron de l'agence média Blue 449, filiale du groupe Publicis Media.

Une créa qui dure entre 3 et 5 secondes

Alors que le cahier des charges impose une durée maximum de 10 secondes, les équipes de Snapchat recommandent dans les faits une durée qui va de 3 à 5 secondes. "Le temps d'attention moyen à une création publicitaire est de 8 secondes", révèle Marina Coche. S'il est possible de décliner une campagne TV sur Facebook et Instagram, mieux vaut éviter sur Snapchat, sous peine de faire un four. "La création est le cœur du succès de la campagne sur Snapchat", confie Marina Coche. Il faut faire court et être très incisif, en portant une attention toute particulière au rythme des 2-3 premières secondes.

L'autodérision et l'humour pour capter l'attention

Rien n'empêche toutefois l'annonceur d'embarquer une "Snap Card" au sein de sa création. L'utilisateur a alors le choix d'en voir et d'en savoir plus en balayant l'écran vers le haut, comme partout ailleurs dans l'application. L'action révèle des contenus additionnels comme une vidéo long format, un article, une publicité pour installer une application... Un patron d'agence média qui préfère rester anonyme reste plutôt sceptique concernant ce dernier volet. "Ça ne marche pas car les capacités de ciblage ne sont pas au niveau de celle de Facebook. Au final, le coût par installation est cinq fois plus élevé sur Snapchat que sur Facebook." Pascal Crifo est quant à lui plus nuancé et avance que l'outil reste pertinent pour un lancement d'application. "Si tout est à construire côté audience, Snapchat peut être un bel accélérateur d'installation. C'est particulièrement vrai dans le casual gaming."

Pas au niveau de Facebook côté ciblage d'audience

Côté ciblage, l'utilisateur retrouvera les fonctionnalités les plus classiques : socio-démographique et géolocalisation. "On peut paramétrer l'âge et le sexe de l'audience visée, tout en cappant la diffusion de la campagne pour ne pas être trop répétitif", suggère Pascal Crifo. Notre expert mentionne également la possibilité de cibler les utilisateurs selon des centres d'intérêts qui sont définis en fonction de leur utilisation de Discover. "On peut cibler ceux qui consultent plutôt des contenus people ou liés au sport, par exemple."

Conscient de ses lacunes, Snapchat a également annoncé le lancement d'un programme "audience match" fortement inspiré du "custom audience" de Facebook, qui permet à l'annonceur de croiser sa base de données email avec celles que récupère Snapchat lors de l'inscription de ses utilisateurs. De quoi permettre du retargeting et du ciblage "look alike". Evan Spiegel, qui a toujours clamé qu'il s'assurerait du respect de la vie privée, n'a pour l'instant pas franchi le pas du croisement des bases de données de numéros de téléphone.

Un univers qui reste fermé... et pauvre en KPI

La plateforme est également avare en informations dans ses reporting de campagnes où l'acheteur peut uniquement voir le nombre d'utilisateurs uniques touchés et le nombre d'expositions totales. Il lui faut passer par le DSP pour bénéficier d'un tableau de bord un peu plus détaillé et utiliser un tiers de confiance comme Moat pour avoir une analyse plus poussée de la visibilité de sa campagne. Par ailleurs, Snapchat ne permettant pas à ses utilisateurs de quitter sa plateforme (à part lorsqu'il fait la promotion d'applications), les indicateurs tels que le taux de clic ou de conversion ne sont pas présents.

Avec un temps de consultation qui avoisine la trentaine de minutes par jour et 18 sessions ouvertes par utilisateur par jour, Snapchat est un outil addictif. "La plateforme a même doublé Instagram chez les moins de 30 ans en France, côté audience", affirme Pascal Crifo. De quoi en faire un complément média très intéressant aux deux géants que sont Google et Facebook. "Snapchat doit occuper une place forte voire même centrale dans la stratégie d'un annonceur qui cible les 15-30 ans", estime Pascal Crifo. La plateforme, qui a atteint les 8 millions d'utilisateurs uniques par jour en France, ambitionne désormais selon nos informations de dépasser le seuil des 10 millions dès 2017.

Et toujours :