Sean Finnegan (Vibrant Media) : "La publicité 'in text' apporte une nouvelle forme de revenus aux sites Web"

La technologie de Vibrant Media permet d'afficher des publicités, notamment vidéo, au passage de la souris dans un texte. Une forme de liens sponsorisés innovante qui suscite des interrogations. Explications avec son nouveau directeur général.

 

Vous dirigiez OMG Digital, au sein du groupe publicitaire Omnicom. Pourquoi avoir choisi de quitter ce groupe pour rejoindre Vibrant Media, où vous êtes en charge du marketing, développement et innovation ?

Je suis resté neuf ans à Omnicom, au cours desquels j'ai contribué à faire prendre à ce groupe le virage vers le numérique. Via des acquisitions et par la croissance organique, nous avons construit un vrai groupe de publicité numérique. Le travail est terminé. Il y a environ un an, j'ai décidé de retrouver ce côté "entrepreneur" en rejoignant Vibrant Media.

Quels sont l'historique et l'activité de cette société ?

Vibrant Media a huit ans. Ce n'est pas une start-up. Mais son offre unique de publicité dans le texte, qui permet de faire apparaître une publicité textuelle ou vidéo quand l'internaute passe sa souris sur un mot souligné, est toujours innovante et nécessite encore de convaincre le marché. Ceci dit, Vibrant Media n'avait pas cette technologie "dans le texte" avant 2004 mais faisait de la publicité contextuelle simple. Nous sommes présents aux Etats-Unis et avons aussi trois bureaux en Europe, à Londres, Paris et Hambourg. L'Europe représente 40 % de notre chiffre d'affaires global, qui a été de près de 100 millions de dollars en 2007. La croissance de l'entreprise est spectaculaire puisqu'elle a doublé ses revenus chaque année depuis cinq ans.

Qui sont vos clients ?

Côté annonceurs, nous avons beaucoup de grands comptes, comme Intel, Sony, Renault, Toyota, ou en France IBM, Peugeot et le Club Med. Côté sites Web, nous essayons d'avoir de grands éditeurs, comme Gannett, où les sites de MSNBC et Fox. Nous avons 3.400 sites clients dans le monde. Chaque mois, nous "soulignons" 4 milliards de mots. En France, nous travaillons avec 160 sites environ et il y a entre 30 et 40 campagnes diffusées en même temps. Notre réseau ici nous permet de toucher un internaute sur deux, comme au Royaume-Uni, contre un sur trois en Allemagne et aux Etats-Unis. Parmi les éditeurs français, on peut citer Libération, Cityvox, Lagardère, Sporever. Pour ces éditeurs, il s'agit d'une nouvelle source de revenus.

Ce sont vos clients "direct" ou bien passez-vous seulement par des agences ?

Uniquement par des agences. Nous n'avons aucune intention de nous substituer à elles. Le premier contact est toujours avec elles. Et puis en France, le secteur publicitaire est ainsi fait que ce sont les agences qui contrôlent l'essentiel du marché.

Vous avez commencé avec la publicité textuelle. Depuis quand proposez-vous aussi de la vidéo et quel est le poids de cette offre pour vous ?

Nous avons lancé la vidéo en juin 2006 (lire Vibrant Media lance l'e-pub vidéo dans le texte, du 11/09/06). L'internaute qui passe sa souris sur un de nos mots-clé voit une vidéo s'ouvrir automatiquement, sans avoir à cliquer. Nous avons encore amélioré la technologie avec un format vidéo "expand" en novembre 2007, dans lequel le spot s'agrandit si l'internaute passe sa souris sur la vidéo. Désormais, 10 % de nos campagnes sont vidéo, mais c'est beaucoup plus en termes de revenus car nous facturons davantage les annonceurs pour ce format.

"Un effort dans des contenus élaborés"

Sur quelle base facturez-vous vos clients ?

Uniquement quand l'internaute clique sur la vidéo. Nous ne touchons rien si la vidéo apparaît uniquement et ne faisons pas de CPA (paiement à l'action). Ce modèle au clic se justifie car nos clients recherchent surtout de la notoriété.

Avez-vous un studio pour fabriquer ces vidéos ?

Non, nous ne les produisons pas. Les vidéos diffusées aujourd'hui sont généralement des films réalisés pour la télévision. Notre technologie accepte n'importe quel format vidéo et le convertit en Flash. Mais nous espérons qu'à l'avenir, de plus en plus d'annonceurs et d'agences produiront des films spécifiques pour les vidéos "in text".

Vous faites apparaître de la publicité au coeur d'articles. Ce mélange des genres n'est-il pas dangereux ? Par exemple, on pourrait "inviter" un journaliste à utiliser tel ou tel mot, qui serait un mot-clé Vibrant Media...

Non, c'est impossible car notre technologie n'est utilisée que lorsque l'article est écrit. Et puis tous nos sites forment un réseau, donc nous ne décidons pas quels mots-clé seront utilisés sur chaque site. C'est automatisé. L'équipe éditoriale d'un site ne sait pas quel mot sera utilisé. Mais c'est vrai que nous devons continuer à expliquer cela... [Le site américain Forbes avait essayé en 2004 la publicité dans le texte (lire Forbes teste un nouveau type de liens promotionnels, du 09/08/04). Mais après les protestations des journalistes, l'expérimentation avait cessé, ndlr].

Pensez-vous pouvoir convaincre les hésitants avec ces arguments ?

Bien sûr. Je peux faire un parallèle avec les liens sponsorisés à la fin des années 90. Les gens se disaient alors "Qu'est-ce qui est du référencement naturel ? Qu'est-ce qui est payé ?". Regardez où en est le marketing sur moteur de recherche (SEM) aujourd'hui ! Nous sommes un peu dans la position de Google alors.

"Les annonceurs veulent aller plus loin dans l'innovation"

Avez-vous des blogs dans votre réseau ?

Nous sommes là où les annonceurs veulent être, principalement dans les domaines de l'automobile, du high-tech, du loisir et de la santé. Notre réseau compte très peu de blogs, en-dehors de certains qui ont un contenu de grande qualité.

Votre technologie est utilisée uniquement par des annonceurs. Pourtant, on peut envisager d'autres utilisations, notamment pour ajouter de l'information à un article.

C'est vrai que nous avons surtout des annonceurs, mais pas seulement des marques. Par exemple, nous avons comme clients des services "pages jaunes" et des guides de restaurants. Concernant les contenus éditoriaux, nous avons des projets dans ce sens. Nous annoncerons prochainement aux Etats-Unis un partenariat de ce type avec un éditeur.

Vous avez une longue expérience dans la publicité en ligne. Comment voyez-vous ce secteur évoluer ?

Je crois beaucoup à la vidéo. Aujourd'hui, 90 % du Web est textuel. Mais la vidéo va se généraliser, car elle peut être diffusée sur plusieurs supports, et pas que sur le Web. On pourra faire de la publicité vidéo à l'intérieur d'une vidéo, sur mobile...

Par ailleurs, au-delà de la convergence des formats, je pense que les méthodes et outils utilisés dans la publicité en ligne vont être transposés sur d'autres médias. Je pense par exemple à la possibilité de mesurer finement les campagnes, à la capacité de diffuser des contenus ciblés selon les consommateurs.