Interview
 
23/05/2007

« Nous développons une plate-forme de sponsoring publicitaire des appels »

Jajah, le nouveau Skype, vient de réaliser une levée de fonds de 20 millions de dollars en majeure partie auprès de Intel Capital. Son fondateur explique sa stratégie et ses objectifs : atteindre 5 millions d'utilisateurs fin 2007, et collaborer avec Intel pour élaborer le futur de la mobilité.
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Daniel Mattes
 
 
  •  Fondateur et directeur technique, Jajah.com
 

Jajah est une jeune pousse spécialisée dans les solutions de téléphonie mobile sur Internet. Sa spécificité : aucune application n'est à télécharger et il n'est pas nécessaire de disposer d'un micro et d'un casque. Les appels en VoIP sont en effet routés automatiquement vers le téléphone fixe des correspondants.

 

Quel a été votre parcours avant de créer Jajah ?

Daniel Mattes. J'ai lancé en Autriche la société Aufrag.at, une place de marché pour les appels d'offres publics. J'ai ensuite créé une solution de vidéo conférence en 2004 revendue à un spin off de Ericsson, ce qui m'a permis de me concentrer sur le développement du noyau de Jajah vers la fin de l'année 2004.

 

Pourquoi vous êtes-vous soudainement dirigé vers la VoIP ?

A cause des factures de téléphone de ma femme. En voyant les montants astronomiques, nous nous sommes demandés ce que nous pouvions faire pour y remédier. Bien sûr il y avait Skype, mais beaucoup de nos proches refusaient de l'utiliser parce que c'est trop compliqué et que personne ne veut rester collé devant son PC pour discuter. On préfère nettement se détendre dans son canapé en discutant avec ses amis. Nous avons donc voulu créer une application aussi simple à utiliser qu'il est facile de faire une recherche dans Google.

 

Aujourd'hui le marché de la VoIP tend à gagner en maturité, les prix sont tirés vers le bas, pour ne pas dire zéro. Comment comptez-vous faire la différence ?

La VoIP tend effectivement à devenir un marché de masse, ce qui implique une valeur potentielle équivalente à celle des autres gros marchés de masse. Nous ne souhaitons pas proposer uniquement des appels téléphoniques mais surtout des services à valeur ajoutée. Ce sont eux qui feront la différence. Avec Jajah, vous pouvez par exemple programmer un appel à l'avance ou à heure fixe. Le moment venu, nos serveurs vous appelleront et vous mettront automatiquement en contact avec votre correspondant. De même, nous proposons un service de conférence call. Nous allons bientôt dévoiler un service de secrétariat téléphonique automatique. Il faut savoir qu'aujourd'hui, 70 % des appels se terminent par un message dans un répondeur automatique. Notre service détectera qu'il s'agit d'une boîte automatique, ne laissera pas de message mais rappellera toutes les 5 minutes jusqu'à réussir à joindre votre correspondant. Vous serez alors mis en relation.

 

Comment comptez-vous gagner de l'argent sur un marché aussi tendu ?

Ces nouveaux services que nous développons seront facturés aux utilisateurs. Nous développons également une plate-forme de sponsoring publicitaire des appels qui permettra aux annonceurs de cibler les utilisateurs. Les clients de Jajah pourront s'ils le souhaitent choisir eux même le type d'annonce qu'ils désirent écouter et éventuellement être mis en contact gratuitement par téléphone pour obtenir des informations complémentaires, tout ça en un clic. Nous développons donc une toute nouvelle place de marché publicitaire automatisée, qui pour le moment n'existe pas sur le marché. Les publicités ne seront pas intrusives, une courte réclame sera diffusée en attendant que les deux correspondants soient mis en relation. A peine le temps de dire "cet appel vous est proposé par X". Une bannière visuelle sera aussi affichée en ligne au même moment. Nous lancerons ce service à l'échelle mondiale dès cette année.

 

En France et en Europe, le transfert de données mobiles reste très cher. Est-ce un frein ?

Non, pas vraiment, nous proposerons là aussi des offres sponsorisées par de la publicité dès cette année, afin d'offrir des appels gratuits ou à très bas coût.

 

Pourquoi ne pas enrichir Jajah de fonctionnalités vidéo comme le font Skype et Live Messenger ?

Aucun client de messagerie actuellement sur le marché n'est totalement fiable en ce qui concerne la vidéo. Nous ne voulons pas proposer un service dont la qualité n'est pas parfaite. Et puis, regardons la réalité en face : personne ne veut être vu et personne ne veux voir son correspondant pendant un appel. Les visions d'un futur où tout le monde discutera en visioconférence ne sont pas réalistes.

 

Justement, qu'elle est votre vision du futur des communications téléphoniques ?

Le prix sera un facteur clef : il faudra qu'il soit très faible ou gratuit. Passé ce cap il faut bien réaliser que les téléphones mobiles actuels vont converger avec les ordinateurs portables pour devenir des terminaux totalement mobiles et communicants. Le parallèle avec ce qui s'est passé pour le Wi-Fi est total. Aux premiers jours du Wi-Fi, les utilisateurs devaient acheter des cartes PCMCIA ou des clefs USB pour rajouter cette fonctionnalité à leurs PC. Aujourd'hui le Wi-Fi est directement intégré aux puces des ordinateurs, c'est devenu un composant de base. Il en sera de même dans les années à venir avec la 3G et ses déclinaisons futures. Tout le monde sera connecté partout, tout le temps et à très haut débit, on ne se posera même plus la question de trouver un réseau ou d'avoir un matériel compatible.

 

C'est pour cette raison que Intel a souhaité prendre une participation dans Jajah ?

Jajah vient en effet de boucler un troisième tour de table de 20 millions de dollars, dont Intel a pris une part importante. Nous allons les aider à créer un réseau global automatisé. Le fondeur devrait intégrer notre technologie dès 2008.

 

Combien avez-vous levé depuis le début de Jajah et comment utilisez-vous ce financement ?

Nous avons obtenu un financement total de 38 millions de dollars, dont la majeure partie est utilisée pour la R&D et des infrastructures. Tous nos efforts convergent vers une qualité de service optimale et durable quelque soit la montée en charge de notre infrastructure. Nous ne voulons pas de crachotements sur la ligne, pas de coupures intempestives. Nous allons également engager des campagnes de communication de masse par le biais de relations presse à l'échelle mondiale, et par des opération de "guérilla marketing" à l'attention de certaines communautés de prescripteurs tels que les étudiants sur les campus, en leurs proposant des services adaptés à leurs activités : faire la fête notamment.

 


 
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Où en est Jajah aujourd'hui et quels sont vos objectifs de croissance ?

Nous disposons d'une base de 2,5 millions d'utilisateurs dont 70 % sont actifs tous les mois. Nous ne pouvons pas dévoiler le nombre de minutes de communication que nous routons mais nous visons 5 millions d'utilisateurs dès la fin de l'année 2007. Nous nous sommes installés en partie en Israël car le pays dispose de toutes les compétences en matière de communications. Une grande partie des communications téléphoniques du pays sont internationales, alors qu'un opérateur comme France Télécom n'est pas historiquement un spécialiste du routage à l'échelle mondiale.

 


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