Tesla défie la gravité à Wall Street

Tesla défie la gravité à Wall Street Le fabricant de voitures électriques a dépassé General Motors en Bourse. Les investisseurs oublient les multiples face à la firme d'Elon Musk, et achètent un rêve plutôt que des cash flows.

Lorsque le titre de Tesla a passé la barre des 300 dollars il y a quelques jours, son patron Elon Musk a reconnu sur Twitter que la société était "survalorisée de façon absurde si l'on se fie au passé". Mais le fabricant de voitures électriques est allé encore plus loin et a franchi une étape historique le 10 avril dernier : après Ford, il a dépassé la capitalisation boursière de General Motors (51,2 milliards de dollars contre 50,2 milliards), et est ainsi devenu le premier constructeur automobile américain ! Cet événement paraît irrationnel si l'on se fie aux données des deux sociétés : Tesla a perdu 700 millions de dollars l'an passé tandis que General Motors, le constructeur centenaire de Detroit, a généré 9,4 milliards de dollars de profits, et le premier n'a délivré que 84 000 véhicules, contre 10 millions pour son concurrent.

Tesla est devenu une valeur que les investisseurs achètent car ils croient en sa capacité à chambouler le secteur

Les investisseurs auraient-ils perdu leur orthodoxie habituelle ? La firme d'Elon Musk a certes réussi à remettre en cause le business model des constructeurs automobiles historiques, qui à l'instar de General Motors ces derniers jours, pâtissent des ventes en berne. Et le titre a suivi, déjouant les prévisions les plus ambitieuses : il a gagné 1 730% depuis son IPO en 2010 et même 46% depuis le début de l'année ! Les acteurs de la tech comme Uber ou Google s'attaquent au marché automobile et promet des voitures autonomes d'ici quelques années, et les acteurs historiques ont du mal à suivre la cadence. Surtout, Tesla bénéficie de l'aura de son fondateur, Elon Musk, véritable superstar de la Silicon Valley qui jongle avec SolarCity, producteur de batteries électriques qui ont vocation à fournir toutes les Tesla, et SpaceX, son pari fou d'aller coloniser Mars. Lorsqu'il a lancé Tesla, ce dernier était considéré comme un serial entrepreneur excentrique, mais il a réussi à délivrer des voitures fiables et performantes. Et s'il n'a jusqu'à présent pas tenu son calendrier en termes de lancements de nouveaux modèles ou de livraisons, il a sans conteste de beaux challenges cette année : commercialiser le Model 3, à un prix plus abordable de 35 000 dollars, et arriver aux 500 000 livraisons.

Et Elon Musk a plus que jamais le vent en poupe, grâce à sa proximité avec le président américain, auprès de qui il compte plaider pour de nouvelles coupes fiscales au bénéfice des voitures et producteurs d'énergie "propres". Comme le constatait il y a quelques jours un journaliste du New York Times, Tesla n'est plus seulement un constructeur automobile, il est devenu une valeur "histoire", que les investisseurs achètent car ils croient en sa capacité à chambouler le secteur pour proposer le mode de transport de demain.

La force de ce type de valeurs est qu'elles sont préservées des chocs du secteur, tout en bénéficiant à plein de chaque bonne nouvelle : le titre Tesla a ainsi bondi de 7% quand il a livré plus de véhicules que prévu au premier trimestre. Le danger est qu'elles parient sur l'émergence d'une nouvelle tendance, comme l'ont fait Amazon et Uber avant elles, et que cela peut être un échec cuisant, comme l'ont vécu les start-up de la bulle Internet en 1999/2000, par exemple. Pour ces raisons, certains analystes sont alarmistes sur la valeur : Brian Johnson de Barclays considère que les investisseurs font preuve d'une euphorie ignorante. "Le fait que Tesla sorte un auto-pilote sur ses voitures ne signifie pas qu'elle est devant ses concurrents, mais qu'elle est prête à le tester sur ses clients". Et prévient que la société aura du mal à être compétitive sur le prix car ses concurrents "peuvent financer les pertes de leurs modèles électriques pour gagner des parts de marché". De l'autre côté, le milliardaire Ron Baron, fondateur de Baron Capital, a acheté 1,6 million de titres et considère que les titres Tesla vont quadrupler d'ici à 2020 puis tripler d'ici à 2025, et qu'elle sera alors la plus grosse capitalisation boursière mondiale…

Article originel publié sur WanSquare par Anne-Laure Peytavin le 11/04/2017.

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