Autopartage, VTC, voiture autonome... Daimler accélère dans les services
A coup d'investissements et de rachats, le groupe automobile propriétaire de Mercedes et Smart a su se positionner dans les services de mobilités et la voiture autonome.
La transformation numérique est un sujet brûlant pour les constructeurs auto. Conscients que la possession de voitures personnelles risque de baisser au profit de services comme le covoiturage, l'autopartage et les VTC, tous veulent tous se muer en opérateurs de mobilité afin de pouvoir proposer ces prestations eux-mêmes. La transformation est d'autant plus nécessaire qu'une autre révolution se profile, celle de la voiture autonome, qui renforcera elle aussi l'usage au détriment de la possession. Tout simplement parce que le coût de ces véhicules embarquant des technologies dernier cri va aller crescendo alors que l'absence d'un chauffeur promet des services de transports beaucoup moins chers.
Face à cet enjeu de transformation, le groupe allemand Daimler (propriétaire de Mercedes et Smart) fait partie des industriels automobiles les mieux préparés. D'abord parce qu'il est entré dans les services de mobilité… il y a 10 ans déjà. Le groupe lançait en 2008 un service d'autopartage baptisé Car2Go qui compte aujourd'hui 3,3 millions d'utilisateurs actifs, selon des chiffres communiqués par Daimler. Le service permet, depuis une appli, de louer instantanément des véhicules Mercedes et Smart, dans huit pays et une vingtaine de villes.
"Daimler va apporter à Chauffeur Privé les ressources nécessaires pour entrer dans de nouveaux marchés"
C'est ensuite par croissance externe que le groupe s'est renforcé dans les transports à la demande, avec l'acquisition des applis de réservation de taxis Mytaxi en 2014 et CleverTaxi en 2017. Sans oublier les rachats la même année des VTC Beat et Chauffeur Privé, le numéro 2 du marché français. "Chauffeur Privé complète idéalement notre portefeuille, explique un porte-parole de Daimler. L'entreprise a réussi à se développer en France avec des ressources très limitées. Daimler peut lui apporter les ressources nécessaires pour entrer dans de nouveaux marchés et c'est ce qui va bientôt se passer."
Ce portefeuille de services permet aujourd'hui à Daimler de revendiquer 15,9 millions de clients actifs dans les taxis et VTC à la demande. Pas rassasiée pour autant, l'entreprise de Stuttgart a également investi dans le concurrent européen de Chauffeur Privé, Taxify, ainsi que dans sa déclinaison au Moyen-Orient, Careem, ou encore dans le VTC haut de gamme allemand Blacklane.
Pour mettre un peu d'ordre parmi cette offre pléthorique, Moovel, une filiale de Daimler, développe également une application de transport multimodale, qui permet de payer à la fois des transports publics et des services de mobilités. Et afin de peser davantage en Europe face à des entreprises comme Uber qui se rêvent elles aussi en opérateurs de mobilités, Daimler a décidé en mars de s'allier avec l'un de ses plus gros concurrents : le groupe BMW. Les deux constructeurs vont fusionner tous leurs services de mobilités, solutions de parking et de recharge électrique inclues, au sein d'une joint-venture.
Tous ces mouvements ne sont toutefois qu'un tour de chauffe comparés aux bouleversements que va occasionner le véhicule autonome. Sur ce sujet, Daimler privilégie deux approches. "La première consiste à continuer à améliorer nos systèmes d'aide à la conduite (freinage d'urgence, maintien sur une voie, ndlr) afin qu'ils déchargent le conducteur de plus en plus souvent. La seconde vise à développer des voitures pleinement autonomes qui peuvent se passer d'un chauffeur dans certaines situations." Daimler réalise des tests en ce sens depuis plusieurs années déjà, en Allemagne et en Californie où les règles de tests sont plus souples qu'en Europe. Le groupe allemand est même devenu en juillet la première société étrangère autorisée à tester des véhicules autonomes en Chine.
"Nos services de mobilités sont un débouché à nos futures voitures sans chauffeur"
Si Daimler s'est pour l'instant focalisé uniquement sur le sujet de la conduite autonome, il sera bientôt temps d'intégrer ce type de véhicules à d'autres services. En 2019, le constructeur et l'équipementier Bosch lanceront une expérimentation de service de véhicules autonomes à la demande en Californie. Et le groupe espère bien pouvoir capitaliser sur l'expérience acquise dans l'autopartage et les transports à la demande pour en faire un succès. "Grâce à nos services de mobilités, nous acquérons des compétences cruciales pour gérer des flottes de véhicules autonomes, justifie Daimler. Et par la même occasion, nous trouvons des débouchés à nos voitures sans chauffeur."
Pour soutenir cette transition, Daimler a également dû recruter des profils tech, historiquement peu présents dans l'entreprise. "Alors que les données sont de plus en plus importantes, les développeurs, data scientists et data analysts sont essentiels à nos services de mobilités. Une grande part de nos succès actuels et futurs repose sur le travail des codeurs et mathématiciens et nous en sommes pleinement conscients", reconnaît Daimler. La vieille maison allemande, fondée à la fin du XIXe siècle, n'aura pas trop d'une armée de codeurs talentueux dans la bataille des véhicules autonomes. Car sur son chemin, elle trouvera les mastodontes des services numériques comme Google et Uber qui, eux, n'ont nullement besoin de se transformer.
Cet article est extrait du dernier numéro d'Adtech News, le supplément trimestriel du JDN et de CB News consacré à l'adtech et au martech. Au programme : une enquête sur le monde post-cookie, une interview du patron du Geste, Bertrand Gié, un comparatif des solutions de monétisation du podcast, un guide spécial Dmexco...