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ENQUETE
 
11/01/2007

Kapla, ou comment faire fortune avec du pin des Landes

Difficile de faire plus simple que le jeu de construction Kapla, composé uniquement de planchettes de bois. Pourtant, ce Noël 2006 comme lors des précédents depuis 1987, le succès était au rendez-vous.

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Le néerlandais Tom van der Bruggen imagine Kapla en 1974 en restaurant un château dans l'Aveyron. Photo © Kapla

Comment faire fortune avec des morceaux de bois ? Tom van der Bruggen a trouvé la réponse un jour de 1987 dans l'Aveyron. Cette année là, il a inventé Kapla, jeu de construction bien connu de nos chères têtes blondes.

Vingt ans après, le jeu Kapla n'est toujours qu'une planchette toute simple de pin des Landes dont les dimensions ne varient jamais. Une "planchette de lutin" pour être exact, puisque c'est de là que vient son nom, contraction des mots hollandais kabouter (lutin) et plankjes (planchette).

Pour retrouver la source de son inspiration, Tom van der Bruggen fait remonter ses souvenirs à 1974. A l'époque, il a quitté sa Hollande natale pour "assouvir un vieux rêve" : habiter dans un château français. A 25 ans, il a donc vendu le magasin d'antiquités qu'il tenait depuis cinq ans à La Haye. Il a trouvé dans l'Aveyron l'objet de ses désirs : une vieille bâtisse qui ne demande qu'à être restaurée.

Tom van der Bruggen se met alors à "faire des plans, des dessins que je jetais les uns après les autres". Pour être plus efficace, il fabrique des maquettes à base de cubes, mais se rend vite compte que ceux-ci ne conviennent pas : trop massifs pour certains éléments comme les planchers et les toitures. Mieux vaut une planchette, conclut-il.

Une longue pierre, une poutre courte et une planche épaisse

Il crée un premier prototype en 1981. Ses dimensions répondent à une règle stricte : trois épaisseurs pour une largeur et cinq largeurs pour une longueur.

Les planchettes de couleur ne sont apparues qu'en 1999. Elles ont permis de maintenir la croissance du jeu Kapla. Photo © Kapla

Ainsi, "Kapla est une longue pierre, une poutre courte et une planche épaisse. Les dimensions retenues sont le compromis entre des qualités constructives et expressives". Plus longues, les planchettes permettent plus de stabilité, mais limitent les possibilités. Plus courtes, les édifices s'effondrent.

Second principe de ce qui deviendra Kapla : "l'importance de n'avoir qu'un seul élément qui se répète, pour conserver l'aspect casse-tête du jeu". Alors, pendant quelques années, parallèlement à son atelier de restauration de vieilles pierres, Tom van der Bruggen s'amuse avec le jeu qu'il s'est créé. Jusqu'à ce qu'un jour il réalise avoir "eu une idée formidable et ne pas en profiter". Nous sommes en 1987.


Dans les premiers temps, il fabrique lui-même les planchettes dans son atelier. Avec un partenaire, ils font "de la vente directe dans un supermarché, la période a été assez difficile". Ce sont les écoles qui seront les premiers gros clients de Kapla. "Elles ont plus vite compris l'intérêt du jeu", se rappelle l'inventeur. Les expositions, comme celle réalisée pour le Musée des arts décoratifs de Paris, permettent aussi à Kapla de se faire connaître. Notamment auprès de la présidence de la République, qui lui commande 300 boîtes.

Tom van der Bruggen, inventeur de Kapla. Photo © Kapla
"J'avais une idée formidable et je n'en profitais pas"

La première année, seules 400 boites sont ainsi vendues, le chiffre d'affaires se limite à 800.000 euros. Mais dès 1988, la croissance est au rendez-vous : ce sont 8.000 boîtes qui trouvent preneurs, notamment en Allemagne et en Belgique. En 1989, la création à Paris d'un Centre Kapla (racheté depuis par sa directrice) et le salon du jouet de Nuremberg permettent à la marque de franchir un palier, surtout à l'export.

Deux ans plus tard, Kapla quitte donc le petit atelier d'Albi pour s'installer près de Bordeaux, à Saint Louis de Montferrand. Kapla France, la société créée en 1994 pour commercialiser le jeu y est toujours implantée. Elle compte six salariés. La Montferrandaise, l'atelier qui prépare les lattes de bois destinée aux planchettes, en totalise quinze.

Un atelier au Maroc

Le chiffre d'affaires de Kapla France est monté à 3,7 millions d'euros en 2006. Après des années d'exercices bénéficiaires, la société a accusé des pertes légères en 2004 et 2005.

Prévoyant cette mauvaise passe, Tom van der Bruggen, qui, s'il se revendique artiste n'en est pas moins homme d'affaires, a décidé en 2003 la délocalisation du gros de la fabrication au Maroc. Entre 70 et 110 personnes travaillent toute l'année pour lui dans une entreprise indépendante qui lui appartient, tout comme la marque Kapla. Kapla France et La Montferrandaise, elles, sont propriété d'un holding hollandais, Kapla Holding B.V. Tom van der Bruggen ne veut pas en dire plus. Selon lui, Kapla France, dirigée par son fils Jean-Daniel, devrait renouer avec les bénéfices en 2006.

TomTecT, le nouveau jeu inventé par Tom van der Bruggen rompt avec les principes de Kapla en proposant un système d'attaches. Photo © Kapla

Pour cela, il compte sur la réduction de ses coûts de fabrication mais aussi sur les multiples nouveaux produits qui ont enrichi la gamme Kapla : une dizaine de conditionnements différents, des planchettes de couleurs apparues en 1999, des livres d'art...

"Ce sont ces nouveaux produits, et en particulier la couleur, qui ont fait la hausse du chiffre d'affaires ces deux dernières années", se félicite Tom van der Bruggen. Dans le futur, d'autres produits complémentaires, "peut-être une table, d'autres couleurs ou d'autres livres", s'ajouteront encore.

Mais pour l'heure, ce qui retient toute l'attention de Tom van der Bruggen, ce sur quoi il fait travailler ses méninges dans son atelier de Monaco où il réside depuis 1994, s'appelle TomTecT. Ce nouveau jeu, également commercialisé par Kapla France depuis début 2006, rompt avec les principes de Kapla : des planchettes plus longues et surtout, sacrilège, un dispositif d'attaches.

Pour l'instant, seule une boîte simple est commercialisée. 9.000 en ont été vendues l'année dernière. Mais Tom van der Bruggen planche actuellement sur des produits complémentaires, d'autres formes, d'autres attaches, qui devraient arriver sur le marché en septembre. Pour faire fortune avec du bois et du plastique ?

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