Le Sénat américain invite à une révolution des consciences et des pratiques en matière de lutte anti-blanchiment d'argent

Quels sont l'impact et les répercussions qu'entraîne le nouveau rapport du Sénat américain sur le blanchiment d'argent ?

A nouveau la question complexe de la lutte contre le blanchiment d'argent a ressurgi dans les médias avec le cas HSBC et le rapport sur la Banque du Vatican. Récemment aux Etats-Unis, le sous-comité permanent en charge des enquêtes, le comité sur la sécurité intérieure et les affaires gouvernementales dirigés par Carl Leven, ont rendu public un rapport intitulé "US Vulnerabilities to Money laundering, Drugsand Terrorist Financing" parallèlement aux récentes auditions des cadres d'HSBC.
En premier lieu, les conclusions du rapport auront des répercussions sur l'industrie bancaire mondiale, pour les institutions et les régulateurs. La manière dont les régulateurs américains conçoivent et évaluent désormais la lutte contre le blanchiment d'argent a fondamentalement changé. Le sous-comité du Sénat américain plaide pour une approche différente de la LAB : le blanchiment d'argent n'est plus un sujet de conformité, mais bel et bien un sujet du système bancaire.

L'intégrité du système bancaire dépend de la solidité et de la sûreté de chaque institution financière. Aux États-Unis, cette évaluation se fait au travers d'un système de notation appelé CAMELS (pour C : Capital adequacy / A : Asset quality / M : Management effectiveness / E : Earnings / L : liquidity / S : Sensitivity to market risk). Le rapport du Sénat suggère que les contrôles sur le blanchiment d'argent se retrouvent au cœur de l’évaluation de la sécurité et de de la solidité de l'institution financière et soient désormais intégrés dans le calcul et la gestion de CAMELS. En résumé, cela signifie que des contrôles LAB robustes sont au cœur de la sécurité et de la solidité des institutions financières et que des contrôles robustes participent à l'intégrité du système bancaire. Cela peut paraître une évidence, mais jusqu'à présent cette approche était très peu suivie.
Le résultat de ce rapport provoque un changement radical dans la façon dont le blanchiment d'argent sera régulé à l'avenir. Cet accord fait apparaître également l'importance, pour les institutions financières, de repenser en profondeur leurs programmes de lutte contre le blanchiment d'argent, de la mise en place d’un corpus de règles internes globales et étendues, de s’assurer de l’usage de meilleures pratiques dans l’ensemble du groupe, et d’utiliser des systèmes et des process identiques en matière de gestion des risques.
En définitive, cela signifie la mise en place d'une approche commune en matière de sécurité financière au sein de l'institution financière, dans sa globalité.

Pour poursuivre, le rapport souligne que les règles et procédures relatives à la lutte contre le blanchiment d'argent auront des répercussions non seulement au niveau de la direction des institutions bancaires mais également chez les régulateurs eux-mêmes. Prenons l'exemple du régulateur OCC (Office of the Comptroller of the Currency) aux États-Unis : trois recommandations sur les dix les plus importantes du rapport concernent directement le régulateur.
Elles pointent des problèmes sur son approche de la réglementation, sur la manière dont l'OCC mène ses contrôles, communique vis-à-vis des actions correctives à mettre en œuvre, ainsi que sur son incapacité à faire évoluer sa réflexion au regard de la manière dont elle traite ces problèmes.
Ainsi, l'OCC a pu identifier 83 sujets nécessitant l'attention au cours des cinq dernières années sans toutefois mentionner quelque violation de la loi fédérale relative au blanchiment d'argent.
Les autres régulateurs suivront probablement cet exemple quant à la réflexion et à la manière dont ils contrôlent et évaluent les institutions financières.
Un thème sous-jacent émerge du rapport du Sénat américain : un régulateur ne regarde pas uniquement ce qui se passe dans une juridiction, mais dans toutes les juridictions où une institution financière opère. Nous avons également noté que le corpus de règles internes et les procédures ne suffisent pas.
Mettre en place des solutions et des approches communes, ainsi que des plates-formes standardisées permet à une institution financière de comprendre comment les contrôles sont menés et optimise la visibilité et l’auditabilité que les régulateurs exigent à présent. Cet effort de réflexion permet une mise en œuvre efficace et une approche combinée de la sécurité financière, qui permet aux institutions financières de répondre avec efficacité et davantage de transparence à des règlementations toujours plus exigeantes.