Après deux ans de récession, l’activité pourrait reprendre en Espagne et au Portugal entre fin 2013/début 2014

Pour ces deux économies la contraction du PIB a ralenti au premier trimestre 2013. L’atténuation de la récession devrait se confirmer au cours des 2e et 3e trimestres.

Même si elles se situent toujours en zone de contraction de l’activité, les données d’enquêtes de la Commission européenne sur le climat des affaires montrent un redressement tendanciel. 

D’où viendra la croissance ?    

La récession en Espagne et au Portugal résulte pour l’essentiel du resserrement budgétaire. En 2011 et 2012, la réduction cumulée du déficit structurel a atteint 2,0 points en Espagne et 4,6 points au Portugal. En conséquence, la demande intérieure (hors stocks) a chuté : -8,2 % en Espagne et -14,1 % au Portugal du T4 2010 au T4 2012 pour des baisses d’activité respectives de 1,9 % et 6,8 %. Dans les deux pays, la contribution du commerce extérieur a été fortement positive, mais insuffisante pour empêcher la récession. Le récent délai accordé par la Commission européenne pour réduire leur déficit public se traduit par une modération de l’effort de consolidation. Après 1,8 point de PIB en 2012, l’Espagne doit fournir un effort structurel de 1,1 point en 2013 et 0,8 point en 2014. Pour le Portugal, le resserrement budgétaire passe de 2,4 points en 2012 à 0,5 point en 2013 et 1,4 point en 2014. Mécaniquement, l’effet récessif sur la demande intérieure devrait être moindre, d’autant que le secteur privé est aujourd’hui en meilleure position pour l’absorber. Le redressement spectaculaire des comptes courants opéré depuis le début de la crise traduit d’abord le désendettement des ménages et entreprises non financières. En 2012, les secteurs privés espagnol et portugais affichaient des capacités de financement respectives de 9,8% de PIB et 4,5% du PIB (contre un besoin de financement moyen de l’ordre de 6% de PIB en 2000-2008). Si les niveaux de dettes (publiques et privées) demeurent très importants et incompatibles avec un fort rebond de la demande, le désendettement constitue désormais un frein moins puissant à l’activité. En conséquence, la contribution positive du commerce extérieur pourrait rapidement devenir supérieure à celle, négative, de la demande intérieure. Certes, une contraction moins marquée de la demande intérieure s’accompagnera aussi d’une moindre baisse des importations. Mais, compte tenu de l’élasticité des importations à la demande intérieure (autour de 1,6 au Portugal et 1,8 en Espagne) et du poids relatif de la demande intérieure (environ 100%) et des importations (environ 35%) dans le PIB, l’effet sur la demande intérieure devrait l’emporter [1]. 
Par ailleurs, la contribution du commerce extérieur vient aussi pour partie de la hausse des exportations. Entre le T4 2010 et le T4 2012 celles-ci ont, à elles seules, ajouté 2,5 points à l’activité espagnole et 1,9 point à l’activité portugaise. Ces bonnes performances sont le fruit des efforts réalisés depuis 2010 pour regagner en compétitivité. Mais leur poursuite repose avant tout sur la vigueur de la demande extérieure. La reprise de l’activité dépendra finalement de la conjoncture mondiale et, en particulier, de l’activité en zone euro. L’Union monétaire absorbe environ 60 % des exportations portugaises et 50% des exportations espagnoles. Si la situation demeure difficile aujourd’hui, la forte intégration commerciale pourrait, néanmoins, accélérer la reprise. De la même manière que la synchronisation des politiques d’austérité en zone euro en a accentué les effets récessifs, leur ralentissement simultané [2] pourrait libérer une nouvelle demande européenne rapidement entretenue par le jeu des multiplicateurs.
Enfin, pour être durable et soutenu, le rebond de l’activité ne pourra pas reposer uniquement sur l’extérieur. Bien qu’en forte baisse depuis le début de la crise, la consommation des ménages représente toujours plus de 60 % du PIB en Espagne et au Portugal. L’enjeu sera donc de recréer rapidement des emplois. A cet égard,  les réformes de flexibilisation du marché du travail de 2011 et 2012 pourraient finalement porter leurs fruits. Mises en œuvre en pleine crise, elles ont contribué à accentuer la chute de l’emploi mais ont aussi donné davantage de flexibilité et de maîtrise des coûts aux entreprises qui ont augmenté taux de marge et capacité d’autofinancement. En faisant converger productivité du travail et salaire réel, les réformes ont aussi accru les incitations à l’embauche. Pour cela il faut, toutefois, un minimum de demande anticipée et donc de croissance (autour de 1,5 %) et de crédit.
Une situation qui n’arrivera probablement pas avant 2015.
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[1] Si la demande intérieure croît de 1 %, les importations augmentent de 1,8 %. En termes de contribution, la demande ajoute 1 point à la croissance, tandis que les importations en retranchent 0,63 point. (35 %*1.8 %).
[2] Pour la zone euro dans son ensemble, l’effort structurel passe de 1,5 point de PIB en 2012 à 0,8 point en 2013.