Uber et la bataille du dernier kilomètre pour la livraison

62% des dirigeants Français du retail se sentent menacés par les services de livraison le jour-même d’Amazon. Uber pourrait-il permettre aux distributeurs d’augmenter leur rentabilité dans le traitement de la demande omnicanale ?

Que ce soit au travers de livraisons par drone ou robot, de livraisons Premium, le jour d’après ou le jour même ou de l’étendue de son réseau de distribution, Amazon bouleverse les codes de la quête d’avantages concurrentiels. Alors, y aurait-il un sens à ce qu’une société comme Amazon s’associe à un prestataire de services comme Uber, qui a non seulement transformé le marché de la course en introduisant la notion de partage, mais qui propose désormais un service de livraison ? Est-ce que cela pourrait être une nouvelle étape dans la guerre de la livraison ? Personne ne le sait bien sûr mais il ne fait aucun doute que le dernier kilomètre est l’ultime illustration du rôle clé de la logistique dans la lutte pour l’acquisition client. Comment Uber peut-il s’inscrire au sein du paysage concurrentiel de la distribution ?

Uber a été fondée à San Francisco en 2009 en se positionnant  comme une solution simple et peu coûteuse pour mettre en relation des conducteurs avec des personnes ayant besoin d’une course. Cela a commencé avec un service premium de voitures de luxe qui est devenu BlackCar Service mais cette offre s’est rapidement étendue à toutes les catégories de véhicules. Vous pouvez maintenant effectuer une course dans tout type de véhicule, que ce soit une voiture hybride ou un SUV, dans 53 pays et 200 villes dans le monde.

Comme Amazon, Uber reste dynamique dans sa quête d’innovation et d’avantages concurrentiels. L’année dernière un nouveau service de course à vélo a été lancé à New York appelé UberRUSH avec une promesse séduisante : avoir un coursier à sa porte dans les 10 minutes pour récupérer votre pli et le livrer partout dans Manhattan jusqu’la 110ème avenue.  UberFRESH, un service de livraison de repas, a également été lancé à Los Angeles. Le principe est de pouvoir livrer des plats de nombreux restaurants dans les 10minutes. Ce service s’est ensuite étendu à beaucoup de quartiers de San Francisco et a été lancé à Barcelone sous le nom UberEATS.

Uber ne s’est pas arrêté là. Ils ont récemment annoncé un partenariat avec Carnegie Mellon University afin de créer le Uber Advanced Technologies Center afin d’effectuer des recherches sur les problématiques de transport, y compris les véhicules autonomes.

Quel est le point commun entre ces innovations, Amazon et la guerre du dernier kilomètre ? La réponse est les chauffeurs et les coursiers Uber pourraient être rapidement amenés à livrer des colis Amazon au client, pour un coût potentiellement plus bas que d’autres options de livraison. Il pourrait également y avoir des synergies entre UberFRESH et AmazonFresh en associant la livraison de courses à celles de plats préparés.

La couverture géographique étendue d’Uber et la synergie avec les efforts d’Amazon pour une livraison le jour-même pourraient séduire Amazon,  mais potentiellement aussi d’autres distributeurs souhaitant améliorer leur performance sur le dernier kilomètre pour concurrencer Amazon. Les distributeurs comprennent que l’innovation doit être l’élément clé dans une stratégie d’entreprise et que la logistique et le transport sont des composantes critiques  pour offrir une expérience d’achat omnicanale supérieure. En effet, cette dernière départagera de plus en plus les leaders des autres acteurs dans le monde de la distribution.

Le problème pour les distributeurs est que la guerre de la livraison est très chère. Une étude récente menée par PwC auprès des dirigeants du retail pour JDA Software a montré que seuls 10% des dirigeants Français ont déclaré pouvoir répondre à la demande omnicanale de manière rentable. Lorsqu’on leur a demandé quels étaient les plus gros centres de coûts, deux des trois réponses les plus fréquemment citées avaient un lien direct avec le transport.

Toutefois, une association avec Uber sur la livraison du dernier kilomètre pourrait convenir à beaucoup de distributeurs pour plusieurs raisons :

Tout d’abord, le modèle low-cost d’Uber en matière de livraison pourrait aider les distributeurs dans leur lutte pour la rentabilité dans le traitement de la demande omnicanale. Cela serait certainement moins cher que de payer l’expédition d’un colis ou d’investir dans leur propre service de livraison.

Deuxièmement, l’utilisation d’Uber serait valorisante pour certains retailers qui souhaitent apparaître comme étant à la pointe de l’innovation. Avec une génération Y technophile, qui représente une part de consommateurs de plus en plus importante et de plus en plus concernée par les problématiques environnementales, un partenariat avec Uber pourrait aider à instaurer une image positive de la marque.

Troisièmement, un partenariat avec Uber dès à présent pourrait permettre aux distributeurs de prendre un avantage concurrentiel alors même qu’Uber continue d’innover. Les sociétés prennent conscience qu’elles ne peuvent pas porter  toutes les innovations. De plus en plus l’innovation viendra de la capacité à nouer des partenariats stratégiques au sein d’un écosystème où l’on peut s’enrichir mutuellement. Un partenariat avec Uber dans le cadre l’Uber Advanced Technologies Center peut offrir un avantage significatif.

Qui va donc franchir le pas et s’associer avec un service de transport à la demande pour prendre l’avantage sur le dernier kilomètre ? Est-ce que ce sera sous forme d’exclusivité ou devenir une tendance ? Tout cela n’est que pure spéculation à ce stade mais il ne vaut mieux pas être le distributeur qui arrive trop tard.