La Loi Sapin 2 : contrainte ou opportunité pour les entreprises ?

L’échéance approche… D’ici au 1er juin, les entreprises devront être en conformité avec les mesures anticorruption de la loi Sapin 2. Mais, plus qu’une contrainte, elle doit être considérée comme une nouvelle opportunité de croissance.

    

Toutes les nouvelles normes, comme la Loi Sapin 2, sont la plupart du temps, perçues comme une contrainte mais elles contribuent fortement à la vie économique du pays en apportant plus de transparence. Elles sont une opportunité, pour toutes les organisations, d’améliorer leur image, de créer un lien de confiance avec leurs clients et d’opérer dans un écosystème assaini.

 

Alors comment les entreprises doivent-elles appréhender cette nouvelle réglementation ? Quelles sont les obligations imposées et quelles dispositions doivent-elles prendre pour agir de manière proactive et avoir une vision globale de l’ensemble des risques ?

La Loi Sapin II : Quelles nouvelles obligations pour les entreprises ? 

Avec la Loi Sapin 2, toute entreprise d’au moins 500 salariés (ou filiales de groupes étrangers) dont le chiffre d’affaires est supérieur à 100 millions d’euros est désormais tenue à de nouvelles obligations préventives de lutte contre la corruption et le trafic d’influence.

Ce chantier de grande ampleur est d’autant plus difficile à mettre en œuvre que la nouvelle Agence française anticorruption, tout juste constituée pour accompagner et contrôler ce dispositif, n’a pas encore eu le temps de se mettre au travail.

Le programme de conformité imposé aux entreprises comporte huit mesures ou procédures différentes :


  • Un code de conduite définissant et illustrant les différents types de comportements, susceptibles de caractériser des faits de corruption ou de trafic d’influence, à proscrire ;
  • Un dispositif de lanceur d’alertes destiné à permettre le recueil des signalements émanant d’employés et relatifs à l’existence de conduites ou de situations contraires au code de conduite de la société ;
  • Une cartographie des risques, régulièrement actualisée et évaluée, qui aura pour objectif d’identifier, d’analyser et de hiérarchiser l’ensemble des risques encourus par la société, par secteurs d’activités, lignes de métiers et zones géographiques ;
  • Des procédures d’évaluation de la situation des clients, fournisseurs de premier rang et intermédiaires au regard de la cartographie des risques ;
  • Des procédures de contrôles comptables, internes ou externes, destinées à s’assurer que les livres, registres et comptes ne sont pas utilisés pour masquer des faits de corruption ou de trafic d’influence ;
  • Un dispositif de formation des cadres et des personnels les plus exposés aux risques de corruption et de trafic d’influence ;
  • Un régime disciplinaire spécifique en cas de violation du code de conduite de la société ;
  • Un dispositif de contrôle et d’évaluation interne des mesures mises en œuvre.
Une loi qui n'est pas uniquement réservée aux grandes entreprises 

La loi Sapin 2 s’inscrit dans une tendance globale de fond qui vise à sensibiliser et responsabiliser les « grandes » entreprises. Toutefois, par capillarité, elle concernera également l’ensemble de leurs sous-traitants et prestataires externes. En effet, les procédures imposent aux entreprises concernées d’évaluer la situation de leurs clients, fournisseurs et autres intermédiaires. La loi Sapin 2 va donc au final impacter une grande partie des entreprises françaises quelle que soit leur taille.

 

En France, deux entreprises sur trois sont victimes d'une fraude chaque année. En cinq ans, ce risque a augmenté de façon considérable : alors qu'en 2009, 29 % des entreprises déclaraient avoir été touchées, ce chiffre a bondi à 55 % en 2014 puis à 68 % en 2015 alors même que le taux mondial restait relativement stable à 36 % (Etude PWC 2016). Cette dynamique propre à la France traduit une vulnérabilité des entreprises françaises aux fraudes et souvent la défaillance ou l'absence d'un système opérationnel de lutte contre ce risque.   

Si cette progression constante concerne les entreprises de toute taille, PWC a observé en 2016 un doublement des fraudes identifiées au sein des entreprises de plus petite taille, comptant moins de 100 salariés. Il est donc plus qu’opportun pour les « petites entreprises » de s’intéresser également à ces problématiques. D’autant plus que des mesures résultant de la loi Sapin II, tel que le mécanisme des « lanceurs d’alerte », s’appliqueront également aux PME (de plus de cinquante personnes).

Une opportunité pour les entreprises 

Il ne reste que quelques jours aux entreprises pour se préparer. Il convient dès lors pour elles de s’atteler d’urgence, si ce n’est déjà fait, à l’analyse de la situation, à la rédaction de procédures adaptées et à la mise en place de leur « plan anticorruption » pour transformer cette obligation réglementaire en opportunité.

Au-delà des préjudices financiers - qui peuvent même aller jusqu’à la faillite d’une entreprise - les dommages liés à la fraude, à la corruption etc…. ont également un impact majeur sur l'image d’une entreprise, sur la confiance des clients, sur le moral des salariés et enfin sur la responsabilité pénale et personnelles des dirigeants


Cependant, une gestion efficace des risques ne s’improvise pas. Nombre d’entreprises s’en remettent encore à Excel ou à des méthodes manuelles similaires pour gérer les exigences en matière de conformité et de réglementations. Or, les réglementations évoluant très vite, ce type de solutions classiques ne suffit plus aux entreprises pour avoir une vision globale et prospective de l’ensemble des risques en temps réel.

Ce vaste projet va sans doute exiger des entreprises d’être accompagnée pour mettre en place de dispositifs opérationnels de prévention, de détection et d’investigation adaptés à leurs structures.

C’est un processus qui ne se limite plus au simple contrôle interne mais qui nécessite de s’équiper d’outils de gouvernance et de techniques spécifiques capables de gérer non seulement les normes de la Loi Sapin 2 mais également celles des différentes réglementations actuelles, comme la RGPD (Règlement Européen relatif à la protection des données personnelles) ou la Loi sur le devoir de vigilance.

 

Comme toute réglementation, la Loi Sapin 2 peut être perçue par les entreprises et leurs dirigeants comme un exercice coûteux et pénible mais plus qu’une contrainte, elle permettra davantage de transparence et sera considérée comme une nouvelle opportunité de croissance car elle constituera un véritable gage de confiance pour les clients et les prestataires.