Checkout.com lève 450 millions de dollars et se valorise 15 milliards

Checkout.com lève 450 millions de dollars et se valorise 15 milliards Le prestataire de paiement britannique devient la fintech européenne non cotée la plus valorisée, devant le suédois Klarna et sa solution de paiement fractionné.

Ce n'est pas une surprise : l'e-commerce a explosé depuis le début de la crise sanitaire liée aux Covid-19. Une explosion ressentie par conséquent chez les acteurs du paiement en ligne. Qui en profitent pour lever encore des fonds. C'est le cas du britannique Checkout.com, qui annonce un tour de table de 450 millions de dollars mené par Tiger Global Management aux côtés de Greenoaks Capital et tous ses investisseurs historiques dont Insight Partners, DST Global ou encore le fonds souverain singapourien GIC. Au total, la fintech a levé près de 830 millions de dollars en deux ans, dont 150 millions en juin 2020. Avec ce nouveau financement, Checkout.com triple sa valorisation pour atteindre 15 milliards de dollars. Ce qui la positionne comme la fintech européenne non cotée la plus valorisée, devant le suédois Klarna (10,65 milliards de dollars), spécialisé dans le paiement fractionné. Elle reste en revanche loin derrière ses deux principaux concurrents, Adyen et Stripe, respectivement valorisés 52,7 et 36 milliards de dollars.

La start-up britannique, créée en 2012, est moins connue que les deux autres stars du secteur puisqu'elle n'est sortie du bois qu'en mai 2019 à l'occasion de sa première levée de fonds… de 230 millions de dollars. Depuis, la jeune pousse accélère sur le terrain de la communication. Mais pas seulement. "Checkout.com attaque en cassant les prix par rapport à Adyen, qui est très cher", souligne Maxime Mandin, investisseur chez BlackFin Tech, même si le Britannique ne rend pas publique sa tarification. Adyen facture 10 centimes de frais fixes et une commission d'interchange en moyenne comprise entre 0,9 et 1,1% pour une transaction par carte bancaire. La start-up néerlandaise cible principalement des grands comptes, qui ont souvent besoin de solutions personnalisables. De son côté, Checkout.com assure cibler aussi de gros retailers mais difficile de le vérifier. Sur son site, elle indique de belles références comme Deliveroo, Samsung ou encore Pizza Hut.

"Checkout.com attaque en cassant les prix par rapport à Adyen"

Mais les gros marchands ont plusieurs prestataires de paiement (PSP), souvent répartis par zone géographique. Checkout.com peut par exemple processer les transactions de Deliveroo au Moyen-Orient, où il est historiquement très actif, mais qui représente une petite part des transactions totales de Deliveroo. "Ils sont très secrets sur leurs références clients", confirme un expert du secteur. "Mais on commence à les voir sur des grands comptes", ajoute-t-il. La fintech assure avoir triplé son volume de transactions en 2020 par rapport à 2019 (elle ne communique pas de chiffre précis) et ne dévoile pas son nombre de clients. En revanche, le chiffre d'affaires de ses opérations européennes est connu et s'élevait à 146,38 millions de dollars en 2019, contre 74,83 millions de dollars en 2018 (soit une augmentation de 96%). Or, l'Europe est le premier marché de Checkout.com.

Manque de diversification

"Ils ont commencé par signer de gros deals en Asie et au Moyen-Orient pour pouvoir se développer ensuite en Europe. C'est ce qui les a différenciés des autres players comme Adyen et Stripe", fait remarquer notre expert. Les Etats-Unis font aussi partie des axes de croissance de Checkout.com, où elle est présente depuis 2017. En parallèle de sa levée de fonds, le PSP annonce l'ouverture de deux bureaux outre-Atlantique (New York et Denver), qui s'ajoutent à celui de San Francisco. Plus de 700 recrutements sont prévus en 2021 dans ses 17 bureaux à travers le monde, dont la France (qui compte actuellement 40 salariés).

"Nous serons obligés d'attaquer la Chine continentale un jour puisque c'est un énorme marché"

Checkout.com a aussi des licences dans plusieurs pays, en plus du Royaume-Uni : la France (ce qui lui permet de ne pas être impacté par le Brexit), Hong-Kong et Singapour. Elle a également demandé une licence au Brésil et envisage d'en demander une en Chine Continentale. "Le régulateur chinois a la volonté d'accorder des licences à des étrangers car il veut créer un peu de concurrence face aux mastodontes que sont Alipay et Wechat. De toute façon, nous serons obligés d'attaquer la Chine continentale un jour puisque c'est un énorme marché", nous confiait son CEO, Guillaume Pousaz, début 2020. Et plus vous avez d'argent dans votre bilan, plus il est aisé de discuter avec des régulateurs. C'est également la stratégie de Stripe qui a annoncé lors de sa dernière levée de fonds de 600 millions de dollars en avril 2020 avoir 2 milliards de dollars à son bilan.

Les deux fintech n'ont pas beaucoup d'autres points communs stratégiques. L'Américaine s'est beaucoup diversifiée ces derniers temps en proposant du crédit, des terminaux de paiement et prochainement des comptes courants à ses clients marchands. La Britannique est quant à elle restée sur le paiement avec récemment un produit d'émission de cartes et prochainement une solution de paiement dédiée aux marketplaces. Ce pari s'avère risqué puisque pour être premier dans ce secteur, il faut réaliser d'importants volumes. Et plus le temps passe, plus les marges dans le paiement baissent. Si Checkout.com n'arrive pas à des volumes importants, il n'aura pas d'autres sources de revenus pour compenser.