Ross Douglas (Autonomy) "Nous voulons créer un living lab international de la mobilité du futur à Paris"

Après avoir créé la première foire mondiale d'art contemporain en Afrique, Ross Douglas lance Autonomy, un événement dédié au transport de demain dont le JDN est partenaire.

Ross Douglas est entrepreneur et fondateur du salon Autonomy. © Autonomy

JDN. Vous organisez du 7 au 9 octobre prochain à Paris la première édition du festival de la mobilité urbaine Autonomy. Pourquoi lancer cet évènement cette année et à Paris ?

Ross Douglas. Nous voulons amener toutes les solutions intelligentes à collaborer, que cela soit les voitures, les navettes, les vélos, etc. Le marché des nouveaux moyens de transport s'apprête à exploser sous l'impulsion de villes comme Paris qui veulent mettre fin au diesel. J'ai choisi l'Europe car il y a ici une offre très développée, sur les vélos, notamment, contrairement aux Etats-Unis, et plus particulièrement à Paris. J'ai senti une réelle motivation de la mairie, qui est très active sur la question. Entre Autolib', Vélib' et la journée sans voiture, on sent bien que les autorités s'attaquent sérieusement à ce challenge.

Autonomy se déroulera en même temps que le Mondial de l'automobile. Pourquoi ce timing ?

Le Mondial est fait pour ceux qui veulent acheter et posséder une voiture alors qu'Autonomy est destiné à ceux qui veulent se déplacer autrement en ville. Mais les deux sont complémentaires, d'où l'importance de le faire en même temps. Cette année, seul Kia est partenaire de notre événement du côté des constructeurs automobiles, mais cela changera. Car leur marché va se réduire et la volonté de posséder son propre véhicule ne concernera bientôt que la population la plus âgée, contrairement à la mobilité partagée.

"Le marché des nouveaux moyens de transport s'apprête à exploser sous l'impulsion de villes comme Paris"

Les constructeurs automobiles peuvent être au cœur de cette révolution car ce sont eux qui ont le plus de moyens en recherche et développement et d'influence sur les politiques publiques. Nous voulons collaborer avec eux et certains comme BMW avec DriveNow ou Ford Smart Mobility ont bien compris l'enjeu.

A qui s'adresse votre festival ?

Il est à la fois BtoC, BtoB et BtoG (Business-to-Government). Les trois sont indispensables pour faire bouger les choses. Nous avons d'abord pour ambition de créer un living lab international de la mobilité du futur. Dans les salons automobiles traditionnels on ne peut que regarder or nous voulons que les gens touchent et testent les innovations qui les transporteront demain au quotidien. Il ne s'agit plus de montrer des véhicules par rapport à leur esthétique, mais de tester des concepts avant de les commercialiser.

"Il ne s'agit plus de montrer des véhicules par rapport à leur esthétique, mais de tester des concepts avant de les commercialiser"

Du point de vue business to business il faudra une industrie automobile qui collabore, même avec les géants du Web, comme Google. D'ailleurs, nous discutons avec Vente Privée pour notre prochaine édition car ils sont très concernés par la logistique du dernier kilomètre.

Comment imaginez-vous le futur de la mobilité urbaine ?

Trop de temps et d'énergie ont été dépensés à essayer d'adapter les voitures à la ville. La mobilité urbaine va complètement changer d'ici 5 à 10 ans. Il y aura les navettes autonomes, comme celles que Transdev présentera à Autonomy, sur une boucle de 150 mètres, ou encore des systèmes plus individuels comme le buggy électrique autonome à trois roues que vient présenter un spécialiste du MIT, capable d'aller se recharger seul dans la station de recharge la plus proche. Cela évite d'avoir, comme pour les Vélib', à déplacer des camions pour répartir équitablement le nombre de véhicules entre les bornes de libre-service. C'est très intéressant car sur le marché des vélos partagés, par exemple, le transport entre les stations représente 25% des dépenses des entreprises.

"Il faudra conserver la diversité et la multi-modalité"

Il y aura des dangers à éviter comme le fait que certains voudront financer la mobilité par la publicité, et ainsi la rendre gratuite, avec des écrans qui diffuseraient des spots commerciaux dans les véhicules autonomes, par exemple. Mais à ce moment-là, on peut imaginer que le trajet pourrait être rallongé ou la vitesse réduite pour montrer plus de publicités aux passagers.

Plus généralement, il faudra conserver la diversité et la multi-modalité. Le problème avec le véhicule autonome, s'il se généralise, est que plus personne ne s'arrêtera dans la rue et tous les commerces risquent de disparaître. Il ne s'agira plus que d'aller d'un point A à un point B sans discontinuer. Il ne faut pas perdre la culture de la marche et du vélo.

Quels conseils pourriez-vous donner aux entrepreneurs qui se lancent sur ce marché ?

Il faut d'abord ne pas sous-estimer l'argent à lever pour y parvenir. Ce ne sont pas que des algorithmes. Uber a levé des milliards de dollars et là où le business model se complique, c'est qu'Uber n'a aucune infrastructure qui lui permettrait de défendre sa position de leader. Tout le contraire d'Amazon qui, avec ses entrepôts partout dans le monde, sera très difficile à concurrencer.

"Les opportunités aujourd'hui se trouvent plutôt dans l'amélioration des services des grands transporteurs"

Les opportunités aujourd'hui se trouvent plutôt dans l'amélioration des services des grands transporteurs comme les compagnies aériennes. On pourrait par exemple inventer une application géolocalisée qui indique où sont les passagers et quand ils arriveront. La compagnie aurait ainsi des informations très précises et saurait quand fermer les portes de ses avions avec le maximum de clients à bord.

Combien d'éditions d'Autonomy faudra-t-il avant que la révolution de la mobilité n'ait lieu ?

Aujourd'hui c'est très coûteux, cela nous a pris trois ans de préparer ce salon, mais c'est un pari sur l'avenir. D'ici 2019 nous commencerons à voir une vraie communauté des professionnels de la mobilité du futur se former. Tout dépendra ensuite des politiques publiques.

Autonomy aura lieu du 7 au 9 octobre 2016 à la Grande halle de la Villette, à Paris (métro Porte de Pantin). Retrouvez ici la liste des exposants, le programme des conférences et la billetterie.