INTERVIEW 
 
Borey Sok
Auteur du livre "Musique 2.0 - Solutions pratiques pour nouveaux usages marketing"
Borey Sok
"Le marché du DRM bénéficie surtout à Apple "
Face à la crise de l'industrie musicale, Borey Sok propose dans un livre à paraître des pistes pour remédier à la baisse des ventes en utilisant au mieux l'outil marketing appliqué aux nouvelles technologies.
(07/12/2006)
 
JDN. Y'a-t-il vraiment une crise dans le marché de la musique si on considère l'explosion des spectacles vivants et les études contradictoires sur le P2P ?
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Borey Sok. Il y a bel et bien une crise de l'industrie musicale mais c'est une crise économique et pas artistique. Il est vrai que les études sur le P2P et son influence sur les ventes se contredisent mais on ne peut pas nier que de la musique téléchargée gratuitement ne constitue pas une fuite. Les ventes de CD sont en baisse car le rapport à la musique a changé. Les consommateurs veulent engager une relation d'un autre genre avec les artistes ce qui explique en effet le succès des concerts. Mais les maisons de disques ne bénéficient pas des résultats des concerts car l'organisation d'un tel évènement n'est pas leur métier.

Les maisons de disques peuvent-elle craindre pour leur avenir ?
Le fait est que les artistes auront toujours besoin d'une maison de disque pour accompagner leur développement au-delà d'un certain seuil. Ces dernières réalisent des investissements marketing, s'occupent de gérer des actifs et de traiter toute la partie administrative ce qu'un artiste n'a pas le temps de faire. Le rôle de la maison de disque est aussi de gérer la notoriété d'un artiste. L'idée d'une cocréation de valeur entre les consommateurs et les artistes est excellente pour la promotion et pour instaurer une communauté mais pas suffisante pour générer de la visibilité. La communauté qui peut se former autour d'un artiste, comme c'est le cas avec Kamini, lui donne par contre un pouvoir de négociation supérieur vis-à-vis des maisons de disque. A l'opposé, les artistes connus et déjà établis ont tout intérêt à opter pour l'auto-distribution.

Qu'elles sont les solutions pour sortir de cette crise ?
Les majors doivent changer leurs pratiques et évoluer malgré un environnement hostile. La long tail (produits des fonds de catalogue) en particulier est un point sur lequel les majors doivent insister. Elle favorise la diversité musicale et répond précisément à la crise de l'offre que le marché traverse actuellement. Les plates-formes de téléchargement légales permettent en effet aux internautes d'acheter des artistes alternatifs tandis que le coût de distribution de chaque morceau est marginal. Les distributeurs ont donc intérêt à amplifier au maximum le nombre de morceaux disponibles au téléchargement. Cela implique nécessairement un travail de recommandation important en se basant sur l'historique d'achat, sur le profil du consommateur, voire sur le profil des autres consommateurs qui ont des goûts sensiblement proches. Les internautes eux même peuvent aider à réaliser ce travail de recommandation, sur MySpace par exemple où les fans peuvent partager leurs morceaux favoris. Les majors doivent également modifier la gestion des budgets marketing en mettant l'accent sur la promotion des artistes sur Internet qui reste pour le moment faible. Elles doivent également travailler sur la R&D, un domaine dans lequel elles accusent un certain retard.

Les maisons de disque ne peuvent-elles pas aussi se concentrer sur l'univers de l'artiste ?

Les maisons de disque doivent privilégier la relation entre les fans et les artistes en allant plus loin que le simple CD ou DVD. La chanteuse Anaïs entretien une relation suivie avec les internautes en proposant des inédits en avant-première sur MySpace. Les majors devraient aussi inciter les consommateurs à la pratique musicale en capitalisant sur les supports numériques. Preuve en est le succès du DVD "Les leçons de musique" de M qui place l'artiste en position de professeur de guitare particulier. Les maisons de disque doivent aussi associer la musique à un matériel physique aux couleurs de l'artiste. Des efforts ont déjà été réalisés, par exemple par EMI qui a innové en proposant des albums sous forme de clés USB.

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La licence globale ne serait-elle pas une solution à cette crise ?
C'est un peu trop facile. Quid de la proportionnalité des revenus des artistes dans ces conditions. Le système ne serait pas forcement plus juste. Il en va de même pour les plates-formes de téléchargement qui proposent un modèle basé sur la publicité. Sommes-nous prêt à vendre de la musique au CPM ? Il n'en reste pas moins vrai que les DRM ne sont pas à l'avantage des consommateurs car ils limitent l'interopérabilité. On parle depuis un petit moment déjà de faire sauter ce verrou. Virgin et la Fnac viennent de faire le premier pas après les producteurs indépendants qui sont pourtant paradoxalement dans une situation financière qui offre moins de latitudes quant à la prise de risques. Le marché du DRM bénéficie surtout à Apple. L'argument qui consiste à dire que le DRM est un frein au piratage est fallacieux car le piratage existe déjà.
 
 
Propos recueillis par Guillaume DEVAUX, JDN

PARCOURS
 
 
Borey Sok est diplômé d'un Master en marketing de l'ISC Paris.

Son livre "Musique 2.0 - Solutions pratiques pour nouveaux usages marketing " est préfacé par Olivier Abecassis (Directeur de WAT). Il sortira au printemps 2007 chez IRMA édition.

   
 
 
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