JDNet.
Plus de trois an après sa création, quels sont les résultats
de PlaNet Finance ?
Jacques Attali.
PlaNet est maintenant la plateforme reconnue de soutien,
de professionalisation et de financement des 8.000 banques
des pauvres du monde. Nous sommes actifs dans une cinquantaine
de pays, nous avons financé quinze institutions de microfinance,
créé des dizaines de sites Web. Ce n'est qu'un début
[cf encadré].
Concrètement,
de quelle manière utilisez-vous Internet dans les activités
de PlaNet Finance ?
Nous aidons les IMF a faire
leurs sites Web, à disposer d'ordinateurs. Nous leur
offrons une bibliothèque virtuelle, des échanges
d'expériences, une université virtuelle. Nous permettons
aussi de donner en ligne, pour financer des banques
des pauvres, dans la plus grande transparence. C'est
un formidable outil de désenclavement du financement
des IMF. Et par là, c'est le seul moyen d'utiliser Internet
contre la pauvreté. Si nous avions plus de moyens, nous
pourrions faire cela dans beaucoup plus de pays. Cela
ne veut pas dire que nous n'allons pas sur place : nous
avons une agence de notation qui contrôle toutes
les banques des pauvres sur place, et des bureaux dans
chacun des continents. PlaNet Finance constitue la meilleure
preuve de l'efficacité de l'Internet pour le développement.
Je dirais même, qu'à mon avis, c'est le seul exemple
réussi d'un usage des nouvelle technologies contre la
pauvreté.
Avez-vous
toujours autant de grands donateurs "high tech", compte
tenu des difficultés que rencontrent les entreprises
du secteur ?
Oui, nous en avons même
de plus en plus. Depuis le 11 septembre, les entreprises
européennes et américaines comprennent mieux que jamais
les nécessités de lutter contre la misère. Et beaucoup
d'autres comprennent les exigences de l'éthique et de
l'économie solidaire. Même si les entreprises
sont parfois en situation difficile, elles prennent
de plus en plus conscience que la solidarité est dans
leur intérêt et qu'elle crée les conditions,
ainsi, pour attirer les cadres soucieux d'éthique, et
pour renforcer leur image.
Vous
considériez Internet comme un "septième continent".
Avec le revers de la nouvelle économie, est-ce toujours
pertinent ?
Je le disais il y a cinq ans...
et je continue à le penser. L'Amérique a aussi été le
théâtre de faillites, de crises, de déceptions,
d'escroquerie. Cela ne l'a pas empêché d'être
le continent de toutes les promesses et des plus fabuleuses
réussites. Il en ira de même sur Internet.
De
quelle manière le monde industriel entame-t-il sa mutation
Internet ? Peut-on parler d'une lame de fonds ?
Bien sûr, plus personne
ne peut imaginer aujourd'hui une entreprise sans infrastructure
Internet, comme le téléphone était indispensable. Internet
transformera aussi les relations avec les clients, les
fournisseurs, les employés, le CRM, le ERM, et
tout cela continuera à bouleverser l'économie.
En
tant qu'investisseur, quand pressentez-vous une éclaircie
boursière pour les valeurs "high tech" ?
Elle est déjà là pour de nombreuses
activités. Des entreprises ont vu leur cours de Bourse
doubler depuis un an. Et même plus. Certaines
ne se relèveront pas. Un peu comme les compagnies
pétrolières qui ont beaucoup promis et rien trouvé.
Etes-vous
toujours intéressé par des projets Internet ?
Bien sûr, nous sommes
toujours intéressés à conseiller, aider à des
fusions, à des regroupements, à imaginer des stratégies
nouvelles, et il y a beaucoup de projets à lancer, en
particulier maintenant, pour des entreprises qui veulent
saisir de nouvelles opportunités. A condition de connaître
parfaitement le marché mondial et de faire un pari correct
sur l'évolution des technologies.
Faisons
un point sur des dossiers
que vous suivez particulièrement. Comment
intervenez-vous auprès de sociétés comme Citations du
Monde , Keeboo ou Chapitre.com ?
Vous citez des entreprises dans
le domaine de l'Internet culturel, auquel je crois beaucoup.
Pour elles, nous servons de conseil dans la définition
de leur stratégie, nous les aidons à penser leur avenir,
à imaginer des produits nouveaux, ou des stratégies
d'alliance.
Existe-il
un ou des projets Internet avec lesquels vous avez dégagé
une plus-value significative ?
Plusieurs.
A
l'inverse, combien de "start-downs" recensez-vous dans
votre portefeuille ?
Pour l'instant, trois sur
une vingtaine de participations.
Comment
expliquez-vous ce paradoxe : Internet perçu à la fois
comme un outil symbolique de la mondialisation et comme
le média privilégié des organisations
anti-mondialisation ?
Internet réduit les distances
et, en cela, il accélère la prise de conscience
de la petitesse de la planète. Ceux qui manifestent
contre la mondialisation demandent, pour la plupart,
plus de mondialisation, et non pas moins. Plus de contrôle
global. Et Internet sera un formidable instrument de
gouvernance.
A
l'occasion des deux forums mondiaux qui se sont déroulés
simultanément à New York et à Porto Alegre, vous avez
assisté à quelle manifestation
?
Au cours de cette période,
j'avais des réunions importantes avec des Banques des
pauvres.
Au
sujet des nouvelles extensions des noms de domaine,
êtes-vous favorable à la création d'une zone en .eu
?
Oui, bien sûr. Et je voudrais
que tous les Européens, y compris les Russes et les
Turcs, puissent l'utiliser.
A
long terme, estimez-vous qu'Internet peut modifier considérablement
le droit international ?
Ceci est un enjeu
majeur, il faut créer un droit international du nomadisme,
réel et virtuel. En même temps, il faut créer
les institutions publiques qui décideront de ce qui
doit être gratuit, de ce qui doit être confidentiel.
Si on laisse, comme aujourd'hui, ces choix au marché,
le
cadastre, c'est à dire le cryptage et la commercialisation
s'installeront partout. Internet aura perdu sa raison
d'être.
Etes-vous
satisfait du développement de l'administration électronique
en France ?
ServicePublic.fr
est un outil formidable mais mal connu. Ce n'est pourtant
rien à côté de ce qui devra ëtre fait pour
permettre à chacun de connaître ses droits, de
se former et de se distraire sur le Net. La culture
des nouvelles technologies n'est pas répandue aujourd'hui.
Si
vous aviez une proposition liée au développement de
l'Internet en France à soumettre aux candidats à
l'élection présidentielle, ce serait laquelle ?
La promesse de fournir à chaque
citoyen une adresse
e-mail personnalisée, où il recevrait en permanence
toutes les informations sur ses droits sociaux. C'est
possible. D'autres pays sont en train de le faire.
Le
groupe bancaire Dexia s'associe à PlaNet Finance
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En
décembre dernier, PlaNet Finance a dressé
un bilan de son action depuis sa création en octobre
1998. L'ONG a mis en place deux pôles d'action
: la professionnalisation des institutions de
microfinance et le financement de ses structures
d'aide au développement. Pour la première
partie, PlaNet Finance a contribué à
la création de 47 sites web d'IMF, 470
professionnels ont été formés aux techniques de
la microfinance, et 40 IMF ont été équipées en
matériel informatique. Par son intermédiaire,
un financement de "plusieurs millions d'euros"
a pu être dégagé.
Pour le deuxième axe de travail, PlaNet
Finance lance PlaNet Fund, un fonds d'investissement
éthique entièrement dédié à la microfinance, avec
l'appui du groupe bancaire Dexia. PlaNet Fund
aura un double objectif, social et financier:
Ce fonds sera structuré sous la forme d'une SICAV
de droit luxembourgeois. Il sera doté d'un capital
initial de 10 millions d'euros. Dexia en est le
premier actionnaire, à hauteur de 1,5 million
d'euros. La levée de fonds se poursuivra auprès
d'autres investisseurs durant le premier semestre
2002.
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