JDN.
Quels sont les principaux changements avec cette nouvelle
procédure de dépôt de noms de domaine
?
Jean-Yves Babonneau.
L'objectif est d'assouplir l'enregistrement
des noms de domaine par l'intermédiaire des prestataires
techniques.Le dépositaire dûment
identifié peut choisir librement le nom de domaine
sans justificatif. Auparavant, le dépôt
devait respecter trois critères : territorialité,
l'identification et le droit au nom. Les deux premiers
éléments sont conservés, le dernier
est supprimé. Nous pensons
limiter fortement les abus tout en automatisant la procédure.
Désormais, les transferts de documents papier
sont supprimés. Tout est transmis en ligne entre
le prestataire technique et l'Afnic à travers
une plate-forme que nous avons développée
en interne. Le travail au quotidien des prestataires
membres de l'Afnic va être facilité. Avec
l'automatisation des procédures, nos membres
devraient également percevoir une réduction
des coûts.
Quels
sont les nouveaux principes de contrôle d'identité
qui régissent le dépôt de noms de
domaine ?
Le contrôle se fera a posteriori
par l'équipe de l'Afnic pour valider définitivement
l'identité de la personne morale ayant demandé
l'enregistrement d'un nom de domaine. Nous prenons en
référence les bases de données
de l'Insee, de l'Inpi et des greffes des tribunaux pour
effectuer les vérifications.
Identifiez-vous une problématique
spécifique pour le dépôt des noms
de domaine liés aux nouvelles marque ?
Il peut y avoir un risque pour les PME
si elles n'ont pas pris la précaution de déposer
le nom de domaine qui colle à une nouvelle marque.
Depuis le 1er janvier, il est possible de déposer
simultanément une marque et un nom de domaine
éponyme en .fr. De notre côté, nous
sensibilisons les entreprises à travers un CD-Rom
(GeNIC) disponible gratuitement. Fin 2003, le conseil
général des Bouches-du-Rhône a pris
l'initiative de diffuser 40.000 exemplaires à
destination du grand public. Le CD-Rom est aussi diffusé
dans les centres de formalités entreprises (CFE,
rattachés aux chambres de commerce et d'industrie)
qui sont partenaires de l'Afnic. Ce CD-Rom comprend
un mode d'emploi pour guider les PME dans le dépôt
de noms de domaine ainsi qu'un mémento sur la
problématique des marques. Pour le dépôt
d'une nouvelle marque, un entrepreneur doit toujours
vérifier sa disponibilité au préalable.
Mais là, on sort de nos prérogatives.
Ne craignez-vous pas une résurgence
du cybersquattage sur l'extension .fr, qui avait quasiment
disparu ?
Oui, le risque
existe avec l'instauration de ce nouveau système.
Mais nous maintenons deux gardes-fous sur la territorialité
et l'identification. Depuis deux ans, nous n'avons recensé
qu'un problème de cybersquatting sur le .fr.
En prolongement de cet assouplissement,
vous allez inaugurer un outil de médiation en
cas de litiges...
C'est un système de résolution
de litiges type DNDRP (Domain Name Dispute Resolution
Policy) réservé à l'extension .fr.
L'Organisation mondiale de la propriété
intellectuelle (Ompi) a mis au point ce type de procédure
pour l'extension .com. L'Afnic ne sera pas partie prenante
pour les litiges qui apparaissent avec le système
en .fr. Si deux parties de bonne foi souhaitent régler
un différent en dehors des voies de justice traditionnelles,
il pourront utiliser ce recours de médiation
en ligne. Ce sera un service payant mais moins onéreux
qu'une action en justice et plus rapide. Nous souhaiterions
installer deux services de DNDRP en France, gérés
par deux organismes distincts. Après l'assemblée
générale de l'Afnic qui aura lieu mi-février,
nous devrions être en mesure de révéler
leurs noms.
Du côté des internautes,
en quoi consiste le nouveau "dispositif de qualification"
que vous préconisez ?
Nous allons proposer
un plug-in aux internautes qui sera intégré
à leur navigateur Web. Cet outil permettra de
pointer sur les bases de données des sites de
l'Inpi, de l'Insee et des greffes des tribunaux au cours
du surf de l'utilisateur. Par exemple, dans le cas d'un
site marchand, le visiteur pourra vérifier instantanément
l'identité officielle de l'éditeur d'un
site en .fr avant de passer une commande.
Au
dernier pointage, l'Afnic recense 177.000 noms de domaines
enregistrés en .fr. Quelle proportion représentent
les entreprises dans ces dépôts ?
C'est la très grande majorité
(95% environ). Je dirais qu'il existe au moins autant
d'entreprises françaises en .com qu'en .fr.
Cela reste une faible proportion
par rapport aux 5 millions d'entreprises en France...
Soyons honnête : ll reste un travail colossal
à réaliser en la matière. La pénétration
de l'Internet dans les entreprises n'est pas à
la hauteur de nos espoirs. L'Afnic fait des efforts
pour sensibiliser les entreprises à l'Internet
: dans le cadre d'un partenariat avec une trentaine
de CCI, tout entrepreneur peut pré-enregistrer
de manière provisoire son nom de domaine lié
à la création d'une nouvelle entreprise.
C'est très simple à travers des bornes
interactives installées dans les CFE qui reprend
des éléments du CD-Rom GeNIC. Après,
il reste à l'entrepreneur à valider le
choix de son nom de domaine en prenant contact avec
un prestataire technique pour le dépôt
définitif.
Comment se comportent les
collectivités locales en termes de dépôts
de noms de domaine ?
Elles vont arriver à une échéance
importante. Jusqu'ici, nous avons protégé
les noms de domaines liés aux collectivités
territoriales et aux communes de France. A partir du
11 mai prochain, jour d'ouverture officiel du nouveau
système, la protection de ses noms de domaines
liés aux collectivités locales va disparaître.
Ils vont être mis sur le marché. En l'état
actuel, 5.000 communes [NDLR : sur 36.000 en tout]
ont pris le soin de déposer leur nom de domaine
en .fr. Ce n'est pas suffisant. C'est un enjeu considérable
: nous en avons informé l'Association des maires
de France et avons envoyé mi-décembre
une lettre à toutes les communes de France. La
balle est maintenant dans leur camp.
Comment évolue le marché
des prestataires spécialistes des noms de domaines
en France ?
Nous recensons 1.100 prestataires adhérents
à l'Afnic au premier janvier 2004. Ce sont généralement
des acteurs qui proposent de l'hébergement de
sites Internet. Au sein de l'association, nous n'avons
pas réellement observé de purge sectorielle
après l'éclatement de la bulle Internet.
On trouve beaucoup de "prestataires dormants"
qui réalisent peu de chiffre d'affaires avec
le dépôt de noms de domaine. Mais ils préfèrent
garder cette corde à leur arc qui reste un argument
commercial.
Comment expliquez-vous le
désintérêt des entreprises vis-à-vis
des nouvelles extensions (.biz, .info...) ?
C'est une situation navrante. Les entreprises
se rabattent sur ces nouvelles extensions si elles n'ont
pas obtenu satisfaction pour obtenir une extension plus
générique en .com ou .fr. Lors des lancements
de ces nouvelles extensions courant 2002, les entreprises
ont eu le réflexe de déposer ses noms
de domaines en guise de protection. Mais elles n'y voyaient
aucun intérêt en termes d'exploitation
Internet. Les entreprises se passeraient bien volontiers
de ce genre de dépenses.
La
prochaine extension en .eu vous paraît-elle fédératrice
?
Nous avons été le premier
Nic à soutenir la création d'un .eu il
y a trois ans. Nous estimions que le .fr qui permet
d'enraciner l'activité en ligne tandis que le
.eu était susceptible de donner une première
image internationale. Nous avons contribué à
une solution territoriale concernant le .eu : une entreprise
ne pourra pas obtenir ce type d'extension si elle n'a
pas de relations avec l'Union européenne. C'est
quand même plus précis qu'un .com. A l'instar
du .fr, nous avions proposé qu'une identification
soit faîte a posteriori sur l'ensemble des bases
publiques européennes pour les attribution des
noms de domaines en .eu et que le système de
qualification soit étendu à ce nouveau
nom de domaine. Cela n'a pas été retenu
pour le moment. En l'état actuel, le système
retenu pour le .eu est souple voire laxiste. Ce nouveau
nom de domaine pourrait éventuellement apparaître
au second semestre 2004 mais rien n'est sûr.
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