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Fabien Baunay
Directeur général
Plurimedia |
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Fabien Baunay
"Nous allons adopter une stratégie offensive sur Internet"
Déjà parmi les plus gros annonceurs en presse magazine, l'éditeur de services mobiles Plurimedia, filiale de Lagardère Active Broadband, annonce qu'il va monter en charge sur la publicité en ligne. L'occasion également de faire le point sur le marché des services mobiles, en plein 3GSM.
(15/02/2006) |
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JDN.
Pouvez-vous d'abord nous rappeler la structure et le périmètre
d'activité de Plurimedia ?
Fabien Baunay. Nous sommes la filiale française
de Lagardère Active Broadband, qui gère les activités
nouveaux médias du groupe Lagardère et qui est présent
en France, en Allemagne et aux Etats-Unis. Nous comptons
environ 250 salariés dans le monde et sommes présents
sur le marché mobile et celui des contenus numériques.
En France, nous sommes essentiellement positionnés sur
deux métiers : la distribution et l'édition de contenus
sur mobile. Nous développons plusieurs types de produits.
Tout d'abord des sites d'information et de contenus, Web
et Wap, par exemple la plate-forme Europe1.fr sur Internet,
le podcast de la station ou la plate-forme d'information
de SFR sur mobile. Ensuite, nous développons des contenus
liés à la personnalisation, l'un de nos métiers historiques,
avec les sonneries, les fonds d'écran, etc. Nous évoluons
aussi sur le relationnel et le communautaire : chat,
SMS ou encore la chaîne de télévision Live1.
Quel est votre analyse sur
l'état actuel du marché des services mobiles ?
C'est un marché qui évolue très vite. Les utilisateurs
commencent à vieillir. Aujourd'hui, le chat et la personnalisation
représentent encore l'essentiel du marché, mais cela évolue.
Dans le même temps, l'arrivée de la 3G suscite de nouveaux
usages et permet l'essor de la vidéo et de l'Internet
mobile.
Ces changements,
vous avez déjà pu les constater depuis un an que la 3G
a été lancée en France ?
C'est encore un peu tôt. Le nombre d'usagers
est en croissance, c'est aussi pour cela que nous nous
positionnons sur la distribution, afin de développer l'usage.
Il s'agit aussi de réaliser une vraie prouesse technique,
afin de rendre compatibles, par exemple, nos sonneries
hi-fi avec 400 modèles de terminaux multimédia différents.
Par ailleurs, nous investissons beaucoup en achat d'espaces.
En 2005, nous étions deuxième sur notre secteur en termes
d'investissements, très proches du premier. Ce que l'on
peut dire, néanmoins, c'est que les abonnés 3G sont très
réactifs, notamment sur les usages classiques comme le
téléchargement. On a tendance à consommer davantage quand
le débit est plus important et, en 3G, le confort est
bon.
Quels sont, selon vous, les
faits marquants de ces derniers mois sur le marché des
services mobiles ?
On assiste à un retour de la notion de convergence. Un
certain nombre d'acteurs du Net arrivent d'ailleurs sur
le mobile, on l'a vu avec MSN, eBay, etc. Avec la 3G,
qui est certes améliorable mais déjà relativement confortable,
cela devient intéressant car les gens vont retrouver des
usages qu'ils ont sur Internet, surfer comme ils savent
le faire. L'Internet mobile ne va pas remplacer le Web,
on ne va pas y retrouver exactement les mêmes contenus,
mais c'est un point de départ important pour intéresser
les gens.
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6
millions de téléchargements
en France et aux Etats-Unis pour Blingtones" |
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Vous avez lancé en France,
il y a près d'un an, le premier label dédié au mobile,
Blingtones (lire l'article
du 06/04/2005). Quel bilan
en faites-vous ?
C'est une énorme satisfaction. Il s'agissait en effet
de lancer des productions originales destinées à la personnalisation
du mobile : sonneries, ringback tones, vidéos, etc.
Nous en sommes à six millions de téléchargements, à la
fois sur le marché américain et sur le marché français
depuis novembre 2004, date de lancement aux Etats-Unis.
Notre plus gros hit, "Décroche pas", a par exemple été
téléchargé à 100.000 exemplaires. Au total, une cinquantaine
d'artistes, américains ou français, participent à Blingtones
et nous disposons à ce jour d'un catalogue de 800 sonneries.
C'est aussi une satisfaction dans le sens où la contrainte,
des formats courts, sous forme de sonneries, a stimulé
la créativité de ces artistes.
Vous venez d'ailleurs de signer
un accord de partenariat avec EMI Publishing, qui vous
ouvre ainsi l'accès à certains de ses artistes sous contrat.
Une forme de reconnaissance ?
C'est certain, nous sommes en train d'entrer dans une
deuxième phase, avec des artistes encore plus reconnus,
comme Amine, et une diversification de notre offre, vers
d'autres sous-genres du hip hop. Nous avons de plus en
plus de contacts avec les producteurs, avec les maisons
de disques. Le marché a compris notre démarche, nous n'avons
jamais dit que nous allions remplacer le Top 50 et l'industrie
du disque a réalisé que nous étions seulement un canal
de distribution supplémentaire. Il faut savoir que, dans
le cas de nos partenariats, la maison de disque conserve,
bien sûr, les droits. Il s'agit donc uniquement d'une
question de distribution.
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Les
sonneries ont comme vertu de rémunérer
toute la chaîne de création de
valeur" |
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Quelle est la suite logique
concernant le marché de la musique sur mobile ? Le
téléchargement de morceaux entiers, vous y croyez ?
C'est la grande question. Si l'on reste sur un modèle
où le titre est vendu à un euro, on peut s'interroger.
Aujourd'hui, personne ne gagne sa vie avec des morceaux
à ce prix, encore moins sur le mobile où les coûts sont
plus importants. Une sonnerie originale à trois euros,
ce n'est pas un prix exagéré. Mais il faut tester différentes
formules. Pourquoi pas des bundles avec une sonnerie,
une image et un titre, par exemple ? Les exclusivités
sur le mobile vont aussi se multiplier, avec des sonneries
originales, et même des titres en exclu ou en preview.
Je pense que toute la chaîne va se réorganiser autour
de cela car les sonneries ont comme vertu de rémunérer
toute la chaîne de création de valeur. Il faut, enfin,
régler le problème des DRM, qui pourrait être un frein
au développement du secteur.
Où en est l'audience des sites
Wap ?
Nous ne raisonnons pas en termes d'audience sur le mobile,
mais plus en termes de téléchargement. Evidemment, il
s'agit de donner à un site Wap une visibilité maximale.
C'est pour cela que l'on investit massivement pour être
bien référencés sur le portail des opérateurs. Mais ensuite,
il s'agit surtout de fidéliser le mobinaute, grâce à des
mécanismes classiques de gestion de la relation avec l'abonné.
Dans cette logique, le modèle de l'i-Mode est assez efficace,
la relation avec l'abonné y est très étroite et l'on retrouve
certains principes du Web, comme des newsletters, etc.
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Le
marché se resserre autour de quelques
sites de référence" |
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Et concernant les acteurs présents
sur le marché des services mobiles ?
La tendance est à la rationalisation et à la concentration,
du fait de la prime à la visibilité. Pour être bien référencé,
il faut investir beaucoup en marketing, cela limite le
nombre d'acteurs. Le marché commence à se resserrer autour
de quelques sites références. Pour notre part, dans chacune
des catégories où l'on est présent, la personnalisation,
l'information, l'astrologie par exemple, nous sommes dans
le trio de tête.
Comment jugez-vous la navigabilité
des sites Wap aujourd'hui ?
Il reste de gros progrès à faire dans ce domaine, et c'est
sans doute l'un des grands enjeux de demain. L'avenir
est à l'ergonomie et à l'usage. Chez Plurimedia, nous
travaillons avec des sémiologues sur le choix des mots,
avec des graphistes sur l'ergonomie des sites. Il faut
absolument se rapprocher des consommateurs. L'exemple
pourrait, une fois de plus, venir du Japon. NTT DoCoMo,
par exemple, travaille sur l'intégration dans le mobile
de navigateurs Web. On retrouve alors des ergonomies logiques
et connues.
Le secteur des jeux sur mobile
semble également vous intéresser. Vous développez notamment
l'offre Virgin Mega Games. Comment vous positionnez-vous
sur ce marché déjà fortement concurrentiel ?
En effet, nous avons lancé une plate-forme de jeux pour
SFR en 2005, puis l'offre Virgin Mega Games. Le jeu sur
mobile correspond à une forte attente du consommateur,
avec des usages complémentaires à ceux du jeu sur console.
Il s'agit d'un produit à forte valeur ajoutée. Le potentiel
est surtout important sur le casual gaming, en dehors
des grandes licences. Le fait d'être éditeur et distributeur
nous permet de jouer un rôle central sur ce marché car
la clé est la distribution. Lagardère Active North
America va d'ailleurs très prochainement lancer une offre
aux Etats-Unis.
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Le
podcast est une technologie typiquement adaptée
au mobile" |
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Vous avez également participé
au lancement du podcast d'Europe 1. Cette technologie
est en vogue. Comment comptez-vous vous y positionner ?
Je crois beaucoup au podcast, et particulièrement au podcast
sur mobile. C'est typiquement la technologie adaptée au
téléphone portable et qui permet de renforcer la relation
au consommateur. Il reste un modèle économique à trouver,
mais Blingtones a d'ores et déjà lancé son podcast, sous
forme d'émissions que l'on peut trouver sur le Web, et
que nous allons bientôt décliner sur mobile.
Quels sont les autres grands
axes de votre stratégie pour l'année 2006 en termes d'offre ?
En 2006, nous allons beaucoup réfléchir évidemment à l'intégration
de la vidéo. On en est encore à un stade embryonnaire
dans ce domaine, cela revient encore cher de développer
de la vidéo sur mobile. Notre rôle est d'accompagner les
opérateurs, afin d'intégrer davantage de vidéo dans leur
portail, d'articuler nos produits avec la vidéo. Par exemple,
quelqu'un qui lit une information Europe 1 sur son mobile
a plutôt envie de voir les coulisses de la radio, comme
cela est possible avec le podcast vidéo que vient de lancer
la station. Par ailleurs, il faut réfléchir à l'ensemble
de l'environnement, afin de fidéliser le client. Si quelqu'un
a téléchargé la sonnerie d'un artiste, peut-être voudra-t-il
aussi recevoir des informations sur cet artiste. Il faut
travailler cette relation sans être trop intrusif.
Vous êtes l'un des principaux
annonceurs sur le secteur, mais, paradoxalement, vous
réalisez assez peu de publicité en ligne. Quelle est votre
stratégie de communication pour 2006 ?
Notre investissement publicitaire brut tournera autour
de 30 millions d'euros cette année. Jusqu'ici, nous avons
surtout choisi la publicité en presse magazine. Tous secteurs
confondus, nous sommes dans le top 30 des investisseurs
en presse magazine. Mais, désormais, nous allons nous
tourner vers la télévision et Internet. 2006 sera pour
nous l'année d'Internet, nous allons y adopter une stratégie
offensive, notamment dans la vente de produits "lifestyle".
La part de ce budget va augmenter et devenir importante.
Nous allons, par exemple, intégrer davantage les liens
sponsorisés de type Google. Pour l'instant, nous sommes
en test sur ce domaine, avec, comme toujours chez nous,
le souci de rentabiliser nos investissements. |
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Propos recueillis par Nicolas RAULINE, JDN |
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